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l’idée qu’on a des choses humaines, afin qu’ils ne lui disent pas : qui êtes-vous ? Toutes choses sont à moi, car je suis le Fils et je demeure dans la maison de mon, Père ; Jésus appelle ici maison l’autorité ; ailleurs il appelle maison le royaume : « Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père » (Jn. 14,2) Comme il parle de la liberté et de l’esclavage, il est naturel qu’il se serve de cette métaphore, pour montrer que ceux dont il parle n’ont point eu le pouvoir de remettre les péchés.
« Si donc le Fils vous met en liberté, vous serez véritablement libres (36) ». Ne remarquez-vous pas, mes frères, que, le Fils est consubstantiel à son Père, et qu’il a un pouvoir égal au sien ? « Si le Fils vous met en liberté », personne ne pourra plus vous la contester, votre liberté, mais elle sera ferme et stable : « Car c’est Dieu même qui justifie, qui osera condamner ? » (Rom. 8,33, 34) Jésus-Christ se montre ici pur et exempt de péché ; il parle et de la liberté que donnent les hommes, et qui n’en a que le nom, et de cette autre liberté que Dieu seul a le pouvoir de donner. C’est pourquoi il les exhorte à ne pas rougir de ce qu’on nomme ici-bas esclavage, mais seulement de l’esclavage du péché. Et voulant leur faire voir que, quoiqu’ils ne soient esclaves de personne, le mépris qu’ils ont fait de l’autre esclavage les a néanmoins rendus encore plus esclaves, il a incontinent ajouté : « Vous serez véritablement libres ». Et par là il déclare que leur liberté n’est point une liberté véritable. Ensuite, de peur, qu’ils ne disent qu’ils étaient exempts de péché, car il était croyable qu’ils le diraient : voyez de quelle manière il les accuse sur ce point. Il passe surtout ce qu’il y a de répréhensible dans leur vie, et se borne à leur représenter le crime qu’ils méditaient actuellement : « Je sais que vous êtes enfants d’Abraham : mais vous voulez me faire mourir (37) ». Insensiblement il les exclut de la famille d’Abraham, leur apprenant qu’ils ne doivent point se vanter d’en être. Comme ce sont les œuvres qui rendent l’homme libre ou esclave, ce sont elles aussi qui font la parenté. Il ne leur a pas dit tout d’abord ; Vous n’êtes point les enfants d’Abraham, cet homme juste, vous qui êtes des homicides ; il leur accorde leur filiation et leur dit : « Je sais que vous êtes enfants d’Abraham », mais ce n’est point là de quoi il est question. Maintenant, il va leur parler avec plus de force et de vigueur. En effet, on peut remarquer en général que Jésus-Christ, après avoir opéré quelque grande action qu’il avait dessein de faire, parle ensuite avec plus de force et de fermeté, parce qu’alors le témoignage des œuvres mêmes ferme la bouche aux contradicteurs.
« Mais vous voulez me faire mourir ». Et si c’est justement ? Non, certes, c’est pourquoi il en donne la raison : vous voulez me faire mourir, « parce que ma parole ne trouve point d’entrée en vous ». Comment dit-il donc qu’ils ont cru en lui ? Oui, ils ont cru, mais, comme j’ai dit, ils n’ont point persévéré : voilà pourquoi il leur fait une vive réprimande. Si vous vous glorifiez, dit-il, de cette filiation, il faut que votre vie y réponde. Et Jésus n’a pas dit : vous ne comprenez point ma parole, mais : « Ma parole ne trouve point d’entrée en vous » ; en quoi il fait connaître l’élévation et la sublimité de sa doctrine. Mais ce n’est point là une raison de me faire mourir, c’en est une plutôt de m’honorer, afin de vous instruire. Mais si vous dites cela, de vous-même ? Pour prévenir cette objection, il ajoute : « Pour moi, je dis ce que j’ai vu dans mon Père, et vous, vous faites ce que vous avez ouï de votre Père (38) ». Comme moi, dit-il, je fais connaître mon Père, et par mes œuvres et par mes paroles ; de même aussi vous, par vos œuvres, vous montrez qui est le vôtre. Car non seulement j’ai la même substance que mon Père, mais encore la même vérité.
« Ils lui répondirent : Nous avons Abraham pour père. Jésus leur repartit : Si vous aviez Abraham pour père, vous feriez ce qu’a fait Abraham ; mais maintenant vous cherchez à me faire mourir (39,40) ». Jésus-Christ leur reproche souvent ici leur humeur sanguinaire, et leur parle d’Abraham : mais c’est pour leur déclarer qu’ils se sont exclus de sa filiation, pour rabaisser leur vanité, leur en marquer l’inutilité et les convaincre qu’ils n’y doivent point mettre l’espérance de leur salut, ni compter sur une alliance charnelle, mais sur l’alliance spirituelle que produit la bonne volonté. C’était là ce qui les empêchait de s’attacher à Jésus-Christ : ils s’imaginaient qu’une si grande alliance leur suffisait seule pour les sauver.
Quelle est cette vérité dont parle ici Jésus-