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mon témoignage est véritable, parce que je « sais d’où je viens ». Que veut dire ceci ? Je suis de Dieu, et Dieu, et Fils de Dieu. Dieu est pour soi un témoin digne de foi pour vous, vous ne connaissez point Dieu, vous faites le mal volontairement ; vous savez et vous feignez de ne point savoir ; vous parlez selon vos sentiments humains et terrestres, et vous ne voulez rien savoir, rien connaître de plus que ce qui paraît au-dehors. « Vous jugez selon la chair (15) ». Comme vivre selon la chair, c’est mal vivre ; de même, juger selon sa chair, c’est mal juger. « Je ne juge personne, et si je juge, mon jugement est véritable (16) » ; c’est-à-dire, vous jugez injustement. Mais si nous jugeons injustement, répliquent-ils, pourquoi ne nous reprenez-vous pas ? pourquoi ne nous punissez-vous pas ? pourquoi ne nous condamnez-vous pas ? C’est, dit-il, parce que je ne suis point venu pour cela. Voilà ce que signifie cette parole : « Je ne juge personne. Et si je juge, mon jugement est véritable ». Car si je voulais juger, vous seriez au nombre des condamnés. Mais si je ne dis pas ceci, dit-il, pour vous juger ; et si j’ai dit : « Je ne parle pas pour juger », ce n’est pas que je craigne de ne pouvoir vous confondre, si je vous mettais en jugement, si je jugeais, vous seriez condamnés justement ; mais le temps de juger n’est pas encore venu. Jésus-Christ fait aussi entrevoir le jugement futur, quand il dit : « Parce que je ne suis pas seul, mais moi, et mon Père qui m’a envoyé ». Enfin il insinue ici qu’il n’est pas seul à les condamner, mais que son Père les condamne aussi. Plus loin, il exprime encore la même chose d’une manière enveloppée, lorsqu’il tâche de les gagner à son témoignage : « Il est écrit dans votre loi que le témoignage de deux hommes est véritable (17) ».
3. Quoi donc ! diront les hérétiques ? Si nous prenons cette parole simplement et dans le sens naturel qu’elle présente, qu’aura Jésus-Christ de plus que le reste des hommes ? Car si cette loi est établie parmi les hommes, c’est que nul homme n’est croyable parlant de lui-même. Mais, à l’égard de Dieu, comment pourrait-on admettre cela ? Examinons donc en quel sens Jésus-Christ a dit ce mot d’eux s’est-il servi de ce terme pour désigner deux hommes ? Si c’était là son intention, pourquoi n’a-t-il pas apporté le témoignage de Jean-Baptiste, et n’a-t-il pas dit : Je me rends témoignage à moi-même ? Jean rend aussi témoignage de moi. Pourquoi ne s’est-il pas servi du témoignage des anges ? pourquoi pas de celui des prophètes ? Il pouvait produire une infinité d’autres témoignages. Mais Jésus-Christ ne veut pas seulement indiquer deux personnes, mais encore deux personnes de même substance.
« Ils lui disent : Qui est votre Père ? Jésus leur répondit : Vous ne connaissez ni moi ni mon Père (19) ». Comme, le sachant, ils feignaient de ne le point savoir, et l’interrogeaient pour le tenter, Jésus ne daigne même pas leur répondre. Dans la suite, il a parlé plus clairement et plus librement, s’autorisant du témoignage de ses œuvres et de sa doctrine, parce qu’alors le temps du crucifiement et de sa mort était fort proche. « Je sais », dit-il, « d’où je viens » : cela pouvait ne pas les toucher beaucoup. Mais quand il ajouta : « Où je vais » ; cette parole devait les troubler et les effrayer davantage, comme indiquant qu’il ne devait point demeurer dans la mort.
Et pourquoi n’a-t-il pas dit : « Je sais que je suis Dieu », mais « je sais d’où je viens ? » Toujours il mêle les choses basses aux choses sublimes, et encore cache-t-il un peu celles-ci. Après avoir dit : « Je me rends témoignage « à moi-même », et l’avoir montré, il passe à quelque chose de moins élevé ; c’est comme s’il disait : Je connais celui qui m’a envoyé, et vers qui j’irai. De cette manière, les Juifs, entendant que le Père l’avait envoyé, et qu’il retournerait à lui, ne pouvaient contredire ce qu’il disait. Je n’ai rien dit que de véritable, dit-il, c’est de là que je viens et j’y retourne, je vais au Dieu de vérité. Mais vous, vous ne connaissez point Dieu, voilà pourquoi vous jugez selon la chair. En effet, après avoir vu tant de témoignages et de preuves, vous dites encore : « Il n’est point véritable ». De Moïse vous dites : Il est digne de foi, et lorsqu’il parle des autres, et lorsqu’il parle de soi ; mais vous parlez autrement au sujet de Jésus-Christ, c’est là juger charnellement.
« Je ne juge personne (15) ». D’ailleurs il dit aussi : « Le Père ne juge personne » ; « pourquoi dit-il : Et si je juge, mon jugement est juste, parce que je ne suis pas seul ? » (Jn. 5,22) Jésus-Christ parle encore selon l’opinion des Juifs. Cela signifie : Mon jugement est le jugement du Père, car le jugement du Père ne