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sage que celui dont l’âme est dans de si heureuses dispositions ? En effet, la vertu est véritablement la source et la racine de la prudence : la malice au contraire est la fille de la folie. L’homme superbe, arrogant et colère, n’est infecté de tous ces maux que parce que la prudence lui manque. C’est pourquoi le prophète disait : « Ma chair est toute malade… mes plaies ont été remplies de corruption et de pourriture, à cause de mon extrême folie » (Ps. 37,3, 5) : par où il montre que le péché, de quelque nature qu’il soit, naît de la folie ; et que celui qui est doué de vertu et qui craint Dieu, est le plus sage de tous les hommes. Voilà pourquoi le Sage dit : « La crainte du Seigneur est le commencement de la sagesse ». (Prov. 1, 7) Or, si celui qui craint Dieu possède la sagesse, le méchant, qui ne le craint point, en est donc absolument dépourvu : et puisqu’il est privé de la vraie sagesse, il est le plus fou de tous les hommes. Cependant, plusieurs respectent les méchants comme pouvant leur nuire et leur faire du mal, et ils ne voient pas, ils ne comprennent pas, qu’il les faut regarder comme les plus malheureux de tous les hommes, parce que c’est dans leur propre sein qu’ils plongent leur épée, lorsqu’ils croient en frapper les autres : signe visible d’une étrange folie, que de se percer soi-même, sans le savoir, et de se tuer, en pensant faire du mal à autrui.
Voilà pourquoi saint Paul qui savait parfaitement que lorsque nous voulons frapper les autres, nous nous tuons nous-mêmes, disait : « Pourquoi ne souffrez-vous pas plutôt les injustices ? Pourquoi ne souffrez-vous pas plutôt qu’on vous trompe ? » (1Cor. 6,7) Car celui qui n’offense personne n’est point offensé, et celui qui ne fait point de mal n’en reçoit point : je : d soutiens, quoique cela puisse paraître une énigme et un paradoxe à la foule incapable de raisonner : Sachant cela, mes frères, disons malheureux, et plaignons, non ceux qui sont offensés et outragés, mais ceux qui offensent et qui outragent. C’est véritablement se faire tort à soi-même que d’attaquer Dieu et lui déclarer la guerre, d’ouvrir la bouche à mille accusateurs, et de se faire une mauvaise réputation en ce monde, en se préparant dés supplices immenses dans l’autre : comme, au contraire, souffrir courageusement les injures et les outrages, c’est de quoi se rendre Dieu propice et favorable, et s’attirer la pitié, l’approbation et les louanges de tout lé monde : ceux donc qui donnent un si grand et si bel exemple de philosophie chrétienne, seront illustres et célèbres en cette vie, et ; en l’autre ils jouiront des biens éternels, que je prie Dieu de nous accorder à tous ; par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui la gloire soit au Père et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans tous les siècles ! Ainsi soit-il.