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même, lorsqu’il dit : « Vous n’avez point vu sa figure », il ne veut pas dire qu’ira une figure, et que néanmoins on ne la voit pas, mais il entend que Dieu n’a pas plus de figure que de voix, ni quoi que ce soit de pareil. Afin donc que les Juifs ne disent pas : C’est vainement que vous vous vantez, Dieu n’a parlé qu’à Moïse seul (ils disaient en effet : « Nous savons que Dieu a parlé à Moïse, mais pour celui-ci nous ne savons d’où il est » (Jn. 9, 29) ; Jésus-Christ dit ces choses pour leur apprendre qu’en Dieu il n’y a ni voix, ni figure. Mais que dis-je ? non seulement vous n’avez point entendu sa voix, ni vu sa figure, mais encore ce dont vous vous glorifiez tant, ce dont vous êtes si fiers, à savoir, d’avoir reçu ses commandements, et, de les observer, vous ne pouvez pas même vous en prévaloir, et voilà pourquoi il ajoute : « Et sa parole ne demeure point en vous (38) » ; c’est-à-dire, ses commandements, ses préceptes, sa loi, ses prophètes. Véritablement Dieu a donné ces choses, mais elles ne demeurent point en vous, puisque vous ne croyez pas en moi. Partout et à tous moments les Écritures répètent qu’il faut croire en moi, et vous, cependant, vous n’en faites rien ; il est donc évident que sa parole s’est retirée de vous ; aussi, Jésus-Christ ajoute encore : « Parce que vous ne croyez point à celui qu’il a envoyé ».
Ensuite, de peur que les Juifs ne répliquent Si nous n’avons pas entendu sa voix, comment a-t-il rendu témoignage de vous ? Jésus-Christ dit : « Lisez avec soin les Écritures, car ce sont « elles qui rendent témoignage de moi. (39) » ; par où il leur insinue que c’est dans lés Écritures que Dieu a rendu témoignage de lui. En effet, et sur le Jourdain, et sur là montagne, ce témoignage avait été rendu ; mais Jésus-Christ ne rapporte point les paroles que le Père fit entendre, peut-être ne l’auraient-ils pas cru. Car la voix que le Père avait fait entendre sur la montagne, ils ne l’avaient pas ouïe, et celle qu’il avait fait entendre sur le Jourdain, s’ils l’avaient ouïe, ils n’y avaient point fait d’attention. Voilà pourquoi il les renvoie aux Écritures, leur faisant connaître que c’est là qu’ils trouveront le témoignage du Père. Mais auparavant il détruit leurs anciennes prétentions, comme d’avoir vu Dieu, ou d’avoir entendu sa voix. Jésus-Christ donc renvoie les Juifs au témoignage des Écritures, parce qu’il était vraisemblable qu’ils ne croiraient pas à la voix du Père qu’il leur citait, et qu’ils s’imagineraient qu’il voulait parler de ce qui était arrivé sur le mont Sina. Mais auparavant il corrige le sentiment qu’ils pouvaient s’être formé à ce sujet, en leur faisant connaître que Dieu en avait usé de la sorte par condescendance et par bonté.
4. Nous aussi, mes frères, lorsque nous avons à combattre les hérétiques et à nous armer pour défendre la vérité contre eux, prenons nos armes dans les saintes Écritures. « Car », dit l’apôtre, « toute Écriture qui est inspirée de Dieu est utile, pour instruire, pour reprendre, pour corriger et pour conduire à la piété et à la justice, afin que l’homme de Dieu soit parfait ; étant propre et parfaitement préparé à tout bien ». (2Tim. 3,16-17) Mais il ne faut pas que l’athlète qui doit entrer en lice n’ait qu’une seule partie des armes, et soit dépourvu de l’autre ; il ne serait pas alors parfaitement préparé. De quelle utilité serait-il, je vous le demande, de prier assidûment et de ne pas donner largement l’aumône ? ou de répandre libéralement ses biens, et de ravir et voler le bien d’autrui, même de faire l’aumône par ostentation et par vaine gloire ? ou de distribuer véritablement ses aumônes avec les dispositions requises, et selon la volonté de Dieu, mais de s’en prévaloir ensuite et de s’en vanter ? ou d’être à la vérité humble et de jeûner, mais d’être néanmoins avare, usurier, attaché aux choses terrestres, et d’introduire dans son âme la mère de tous les maux ? car « l’avarice est la racine de tous les maux ». Ayons-la en horreur, fuyons ce vice.
C’est l’avarice qui renverse tout le monde c’est elle qui trouble tout et met tout en confusion : c’est elle qui nous fait sortir de l’aimable et très-heureuse servitude de Jésus-Christ. « Vous ne pouvez », est-il écrit, « servir Dieu et les richesses » (Mt. 6,24), qui ordonnent le contraire de ce que Jésus-Christ commande. Jésus-Christ dit : donnez aux pauvres ; les richesses disent : ravissez le bien des pauvres. Jésus-Christ dit : pardonnez à ceux qui vous dressent des embûches et à ceux qui vous offensent ; les richesses disent au contraire : à ceux qui ne vous ont nullement offensés, tendez-leur des pièges. Jésus-Christ dit : soyez doux, soyez bons ; celles-ci disent au contraire : soyez inhumains, soyez cruels, ne faites aucune attention aux larmes des pauvres, pour nous rendre