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insinué, il les réprimande vivement et fait voir que s’ils n’avaient pas su croire en lui, cela provenait de la même disposition d’esprit et de cœur, qui les avait portés à mépriser Jean. Car ils n’avaient admiré Jean que « pour un peu de temps » : s’ils n’avaient pas été si légers et si inconstants, Jean les aurait bientôt amenés à Jésus-Christ.
Après avoir ainsi montré que les Juifs sont tout à fait indignes de pardon, Jésus-Christ ajoute : « Mais pour moi, j’ai un témoignage plus grand que celui de Jean ». Lequel ? Celui des œuvres. « Car les œuvres », dit-il, « que mon Père m’a donné pouvoir de faire, les œuvres », dis-je, « que je fais, rendent témoignage de moi que c’est mon Père qui m’a envoyé ». Par là, il rappelle la guérison du paralytique et de plusieurs autres. A l’égard du témoignage de Jean peut-être quelqu’un aurait-il pu le soupçonner d’emphase et de complaisance, bien qu’il ne convînt guère de parler ainsi de Jean de cet homme si sage, si appliqué à la philosophie, qui excitait parmi eux tant d’admiration ? mais les œuvres ne pouvaient donner prise aux mêmes soupçons, même de la part des hommes les plus insensés. Voilà pourquoi Jésus-Christ apporté un autre témoignage en disant : « Les œuvres que mon Père m’a donné pouvoir de faire, les œuvres », dis-je, « que je fais, rendent témoignage de moi que c’est mon Père qui m’a envoyé ». Ici Jésus-Christ repousse et anéantit l’accusation de n’avoir pas gardé le sabbat. (Jn. 9,16) Les Juifs disaient : Comment cet homme serait-il de Dieu, puisqu’il ne garde pas le sabbat ? Voilà pourquoi il dit : « Les œuvres que mon Père m’a donné pouvoir de faire », quoiqu’il agît par sa propre autorité ; mais il voulait prouver plus fortement qu’il ne faisait rien de contraire au Père ; c’est pourquoi il ne craint point d’employer ce langage qui le rabaisse.
3. Et pourquoi, direz-vous, n’a-t-il pas dit : Les œuvres que mon Père m’a donné pouvoir de faire rendent témoignage que je suis égal au Père ? Certainement par les œuvres on pouvait facilement connaître ces deux vérités, et qu’il ne faisait rien de contraire à son Père, et qu’il était égal à son Père ; ce qu’il prouve ailleurs quand il dit : « Si vous ne me croyez pas, croyez à mes œuvres, afin que vous sachiez et que vous croyiez que je suis dans mon Père et que mon Père est en moi » (Jn. 10,38) ; ses œuvres donc rendaient témoignage de ces deux choses, et qu’il était égal à son Père, et qu’il ne faisait rien de contraire à son Père. Pourquoi donc n’a-t-il pas ouvertement déclaré tout ce qu’il est, et a-t-il omis ce qu’il y a de plus grand en lui pour ne découvrir que ce qui l’est moins ? Parce que c’était premièrement là de quoi il s’agissait. Quoiqu’il fût beaucoup moins grand pour lui qu’on le crût envoyé de Dieu, qu’égal à Dieu (les prophètes, en effet, avaient prédit sa mission, mais non son égalité), toutefois il a grand soin d’insister sur ce titre inférieur, sachant bien que ce point, une fois accordé, le reste sera désormais admis sans difficulté ; il omet donc ce qu’il y a da plus grand, et parle seulement de ce qui l’est moins, afin que la première de ces choses passât à l’a faveur de l’autre. Après quoi, il ajoute encore : « Mon Père qui m’a envoyé a rendu lui-même témoignage de moi (37) ». Où l’a-t-il rendu, ce témoignage ? Sur le Jourdain, lorsqu’il a dit : « C’est mon Fils bien-aimé, écoutez-le ». (Mt. 3,17) Mais ce témoignage n’était pas bien clair, il avait besoin de quelque explication ; celui de Jean au contraire, était manifeste : les Juifs avaient eux-mêmes député vers lui, et ils ne pouvaient le nier ; les miracles aussi étaient évidents : ils les avaient eux-mêmes vu opérer ; ils avaient ouï parler de la guérison du paralytique, et ils y avaient cru ; c’est même pour cela qu’ils accusaient Jésus-Christ de n’avoir pas gardé le sabbat. Enfin il ne manquait plus que d’apporter le témoignage du Père ; pour le produire Jésus-Christ a ajouté : « Vous n’avez jamais ouï sa voix ». Comment donc Moïse dit-il.: Dieu parlait, Moïse a répondu ? (Ex. 20,19) Comment David dit-il : « Il entendit une voix qui lui était inconnue ? » (Ps. 80,6) Moïse dit encore : S’il y a un « peuple qui ait entendu la voix de Dieu ». (Deut. 4,33)
« Ni vu sa figure ». Et toutefois il est écrit d’Isaïe, de Jérémie, d’Ezéchiel et de plusieurs autres qu’ils ont vu Dieu. Que fait donc maintenant Jésus-Christ ? Il élève ses disciples à la plus haute et à la plus sublime philosophie, leur montrant insensiblement que dans Dieu il n’y a ni voix, ni figure, et qu’il est au-dessus et des sons, et de ces sortes de figures qu’ils imaginaient ; comme en disant : « Vous n’avez jamais ouï sa voix », il ne veut pas dire que le Père parle et qu’on ne l’entend pas ; de