Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 8, 1865.djvu/289

Cette page n’a pas encore été corrigée

« dû aux bonnes ou aux mauvaises œuvres « qu’il aura faites, pendant qu’il était revêtu « de son corps ». (1Cor. 5,10) Pensons toujours à ce tribunal ; c’est là le vrai moyen de nous appliquer toujours à la vertu. Comme celui qui écarte ce jour de son esprit, semblable à un cheval qui a pris le mors aux dents, se jette dans les précipices (le Psalmiste dit : « Ses voies sont souillées en tout temps », et il en donne la raison : « Vos jugements ne se présentent point devant sa vue ») (Ps. 9,26) ; de même, celui qui craint le jugement, marchera avec modestie et sera retenu dans toutes ses actions : « Souvenez-vous de votre dernière fin », dit le Sage, « et vous ne pécherez point ». (Sir. 7,40) Celui qui à présent nous remet nos péchés, alors sera notre juge ; celui qui est mort pour nous viendra juger ici tout le genre humain. Jésus-Christ « apparaîtra », dit encore saint Paul, « non pour expier le péché, « mais pour le salut de ceux qui l’attendent ». (Héb. 9,28) C’est pourquoi le Sauveur dit ici : « Mon Père ne juge personne, mais il a donné au Fils tout pouvoir de juger, afin que tous honorent le Fils, comme ils honorent le Père ». Quoi donc ! direz-vous, l’appellerons-nous le Père ? Dieu nous en garde ! Car il dit le Fils, afin que demeurant le Fils, nous l’honorions comme nous honorons le Père : celui au contraire qui l’appelle le Père, n’honore pas le Fils comme il honore le Père ; mais il confond tout. Comme donc les châtiments rappellent plutôt les hommes à leurs devoirs que les bienfaits, Jésus-Christ nous fait de terribles menaces, afin que du moins la crainte nous porte à l’honorer.
Lorsque Jésus-Christ dit : « Tout », il nous fait entendre qu’il a le pouvoir de punir et de récompenser, et de faire l’un et l’autre selon qu’il lui plaît. Il dit : « Il a donné », afin que vous ne pensiez pas qu’il n’est point engendré, et que vous ne croyiez pas qu’il y a deux Pères : car tout ce qu’est le Père, le Fils l’est aussi, demeurant engendré et Fils. Mais, pour ne vous laisser aucun, doute que ce mot : « Il a donné » signifie la même chose que : « il a engendré », il le déclare expressément ailleurs, en disant : « Comme le Père a la vie en lui-même, il a aussi donné au Fils d’avoir la vie en lui-même (26) ». Quoi donc ! le Père a-t-il premièrement engendré le Fils, et n’est-ce qu’ensuite qu’il lui a donné la vie ? Celui qui donne, donne à quelqu’un qui est : le Fils était-il donc engendré sans avoir là vie ? Mais les démons mêmes, tout démon qu’ils sont, ne sont point capables d’une pensée si abominable, où éclatent également et l’extravagance et l’impiété. Disons donc que, comme ce mot : « Il a donné la vie », est la même chose que : il l’a engendré vivant ; de même. « Il a donné le pouvoir de juger », signifie : il l’a engendré juge. Et de peur qu’entendant ces mots, qui marquent que le Père est le principe du Fils, vous ne pensiez qu’il y a une inégalité de substance entre l’un et l’autre, et une moindre dignité dans celui-ci, il vient lui-même vous juger, pour vous montrer son égalité. Car celui qui a le pouvoir de punir et de récompenser ceux qu’il veut, peut faire les mêmes choses que le Père. En effet, s’il n’avait pas un égal pouvoir, s’il n’avait reçu cet honneur que dans la suite, après avoir été engendré, quelle aurait été l’origine de cette élévation ? par quels degrés serait-il parvenu dans la suite à une si éminente dignité ? Ne rougissez-vous pas d’avoir des sentiments si bas et si charnels de cette nature immortelle qui ne peut recevoir aucun accroissement ?
Pourquoi, direz-vous, parle-t-il donc de la sorte ? Afin que les hommes croient plus facilement ce qu’il dit, et pour les préparer à entendre des choses plus élevées ; de là ce mélange des deux langages. Mais voyez et examinez bien comment il opère ce mélange, et pour cela il ne sera pas hors de propos de reprendre les choses dès le commencement. Il a dit « Mon Père agit, et j’agis aussi » ; et par là, il montre qu’il est égal à son Père et qu’il doit être également honoré : « Et les Juifs cherchaient à le faire mourir ». Que fait-il ensuite ? Il tempère, il adoucit ses paroles, mais il leur conserve le même sens, en disant : « Le Fils ne peut rien faire de lui-même ». Après, il parle encore d’une façon plus élevée, et dit : « Tout ce que le Père fait, le Fils aussi le fait comme lui ». Puis il baisse le ton : « Parce que le Père », dit-il, « aime le Fils et il lui montre tout ce qu’il fait, et il lui montrera des œuvres encore plus grandes que celles-ci ». Après quoi, il remonte : « Car comme le Père ressuscite les morts et leur rend la vie, ainsi le Fils donne la vie à qui il lui plaît ». Puis viennent des paroles basses mêlées avec des paroles élevées : « Le Père ne juge personne, mais il a donné au Fils tout a pouvoir de juger ». Ensuite le langage se