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étangs, les fontaines, les fleuves, les pluies et le mouvement de la nature, soit dans les semences, soit dans nos corps, soit dans ceux, des bêtes, et de toutes les autres choses qui composent ce monde, reconnaissez-y l’action continuelle du Père, « qui fait lever son soleil », dit l’Écriture, « sur les bonnes sur les « méchants ». (Mt. 5,45) Et encore : « Si donc Dieu a soin de vêtir de cette sorte une herbe des champs, qui est aujourd’hui et qui sera demain jetée au feu ». (Mt. 6,30) Et derechef, sur les oiseaux : « Votre Père céleste les nourrit ». (Mt. 6,29)
3. Ainsi, tout ce qu’a fait Jésus-Christ le jour du sabbat, il l’a fait par sa parole, sans rien de plus. Quant au crime dont on l’accusait, il s’en est justifié par ce qui se faisait dans le temple (Mt. 12,5), et par l’exemple même de ses accusateurs ; mais quand il commande de travailler, comme d’emporter le lit (ce qui, sûrement, n’est pas un travail bien considérable, mais tel néanmoins qu’il marque clairement l’inobservance du sabbat), alors il parle plus haut, il leur apporte des preuves plus relevées, pour les confondue et leur imposer silence par la dignité de son Père, et les élever à de plus grands sentiments. C’est pourquoi, lorsqu’il s’agit du sabbat, il ne se justifie pas comme homme seulement, ni comme Dieu seulement, mais tantôt d’une façon, tantôt de l’autre. Car il voulait qu’on crût à la fois, et à l’abaissement de son incarnation, et à la dignité, à la majesté de sa divinité. Voilà pourquoi maintenant il se justifie comme Dieu. En effet, s’il leur eût toujours parié humainement, toujours ils auraient eu de lui des sentiments bas et grossiers ; c’est donc pour les tirer de leur opinion et les éclairer, qu’il nomme sou Père.
Au reste, les créatures elles-mêmes agissent au jour du sabbat : le soleil poursuit son cours, les fleuves roulent leurs eaux, les fontaines coulent, les femmes accouchent ; mais afin que vous sachiez que le Fils de Dieu n’est pas du nombre des créatures ; il n’a point dit J’agis aussi, car les créatures agissent, mais quoi ? J’agis aussi, car mon Père agit : « Mais les Juifs cherchaient encore avec plus d’ardeur à le faire mourir, parce que non seulement il ne gardait pas le sabbat, mais qu’il « disait même que Dieu était son Père, se faisant ainsi égal à Dieu (18) ». Et il ne le démontra pas seulement par ses paroles, mais encore plus par ses œuvres. Pourquoi par ses œuvres ? Parce que, de ses paroles, ils pouvaient prendre texte pour lui faire des reproches, pour l’accuser d’orgueil et de vanité ; mais en voyant la vérité et la réalité des choses et des œuvres, qui manifestaient et publiaient sa puissance, alors ils ne pouvaient même pas ouvrir la bouche contre lui.
Ceux qui ne veulent pas croire pieusement ces vérités, disent : Jésus-Christ ne s’est pas fait égal à Dieu, mais seulement les Juifs l’en soupçonnaient : c’est pourquoi, revenons sur ce qui a été dit plus haut. Dites-moi : les Juifs persécutaient-ils Jésus-Christ ; ou ne le persécutaient-ils pas ? Certainement ils le persécutaient ; personne ne l’ignore. Le persécutaient-ils pour cette raison qu’il se faisait égal à Dieu, ou pour une autre ? c’était sûrement pour cette raison, comme tous le reconnaissent. Gardait-il le sabbat, ou non ? il ne le gardait pas, nul n’osera le nier. Disait-il que Dieu était son Père, ou ne le disait-il pas ? certes, il le disait. Donc tout le reste s’ensuit de même : comme les faits d’appeler Dieu son Père, de ne pas garder le sabbat, d’être persécuté des Juifs pour la première de ces raisons ; et encore plus pour l’autre, sont des vérités parfaitement établies ; quand il s’égalait à Dieu, il ne faisait que parler encore dans le même esprit : et ceci est encore plus évident par ce qui est rapporté ci-dessus ; car dire ces paroles. « Mon Père agit, et j’agis aussi », c’était la même chose que de se faire égal à Dieu. Jésus-Christ ne montre aucune différence entre ces paroles. Il n’a point dit : Il agit, et moi je le sers, je l’aide ; mais : comme il agit, j’agis aussi moi-même ; et il fait voir une grande égalité.
Que si, cette égalité, Jésus-Christ n’avait pas voulu la montrer, et si les Juifs l’en avaient vainement soupçonné, il n’aurait pas permis qu’ils gardassent cette fausse opinion de lui, mais il l’aurait corrigée. Et l’évangéliste ne l’aurait point passée sous silence, mais il aurait publiquement déclaré que les Juifs avaient eu ce soupçon, mais que Jésus-Christ ne s’était pas fait égal à Dieu ; c’est ainsi qu’il en use ailleurs, lorsqu’il voit que ce qui a été dit dans un sens, on le prend dans un autre ; par exemple, à propos de cette phrase : « Détruisez ce temple, et je le rétablirai en trois jours » (Jn. 2,19), qui concernait sa chair. Mais les Juifs, ne comprenant pas ce qu’avait dit Jésus-