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précède, et néanmoins s’y rapporte tout à fait. Car, après, avoir dit que le baptême procure aux hommes un très-grand bien, il découvre aussitôt la source de ce bienfait, et fait connaître qu’elle n’est pas moins, précieuse que l’autre, puisque le baptême tire toute sa vertu de la croix. Saint Paul, écrivant aux Corinthiens, en use de même, il joint ces biens ensemble, en disant : « Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous, ou avez-vous été baptisé au nom de Paul ? » (1Cor. 1,13). Par où l’apôtre fait parfaitement connaître l’ineffable amour de Jésus-Christ, en ce qu’il a souffert pour ses ennemis et est mort pour eux, afin de leur remettre entièrement leurs péchés par le baptême.
2. Mais pourquoi n’a-t-il pas clairement dit qu’il devait être crucifié, et a-t-il renvoyé ses auditeurs à l’ancienne figure ? Premièrement pour leur montrer la liaison et la concorde qu’il y a entre l’Ancien et le Nouveau Testament, et leur apprendre que ce qui s’est passé dans l’un, n’est pas contraire à ce qui se passe dans l’autre. En second lieu, afin que vous compreniez vous-mêmes et que vous soyez bien persuadés qu’il n’est pas allé à la mort malgré lui ; de plus que cette mort ne lui fait aucun tort, et enfin que c’est par elle qu’il procure le salut de plusieurs. Et de peur que quelqu’un ne dît. Comment peut-il se faire que ceux qui croient à un homme crucifié soient sauvés, puisque la mort l’a enlevé lui-même ? il nous rappelle une ancienne histoire. Si les Juifs qui regardaient la figure du serpent d’airain (Ex. 21), évitaient la mort, à plus forte raison, ceux qui croient en Jésus-Christ crucifié, recevront-ils de grands ors et des grâces plus excellentes. En effet, si Jésus-Christ a été crucifié, ce n’est pas qu’il ait été le plus faible ou les Juifs les plus forts ; son temple animé a été attaché à la croix, parce que Dieu a aimé le monde.
« Afin que tout » homme « qui croit en lui, ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle (15) ». Ne voyez-vous pas la cause de la mort et le salut qu’elle procure ? Ne voyez-vous pas l’accord de la figure avec la vérité ? Alors les Juifs évitèrent la mort, mais une mort temporelle ; maintenant les fidèles sont préservés de la mort éternelle. Là le serpent élevé en l’air guérissait les morsures des serpents ; ici, Jésus crucifié guérit les blessures que fait le dragon spirituel. Là, celui qui regardait des yeux du corps était guéri ; ici, celui qui voit des yeux de l’âme, se décharge de tous ses péchés. Là pendait une figure d’airain qui représentait un serpent, ici le corps du Seigneur que le Saint-Esprit a formé. Là, un serpent mordait et un serpent guérissait ; ici la mort a donné la mort, et la mort a donné la vie. Le serpent qui tuait avait du venin, celui qui donnait la vie n’avait point de venin. Ici c’est la même chose : la mort qui donnait la mort avait le péché, comme le serpent avait le venin ; mais la mort du Seigneur était exempte de tout péché, comme le serpent d’airain l’était du venin : « Car il n’avait commis aucun péché. », dit l’Écriture, « et de sa bouche il n’est jamais sorti aucune parole de tromperie ». (1Pi. 2,23) C’est là ce qu’a déclaré saint Paul par ces paroles : « Jésus-Christ ayant désarmé les principautés et les puissances ; les a menées hautement en triomphe à la face de tout le monde, après les avoir vaincues par lui-même ». (Col. 2,15) De même qu’un courageux athlète, qui, élevant fort haut son ennemi, le jette par terre, remporte une plus illustre victoire, ainsi Jésus-Christ, à la face de tout le monde, a terrassé les puissances qui nous étaient ennemies, et, après avoir guéri ceux qui avaient été blessés dans le désert, il les a, par son crucifiement, délivrés de toutes les bêtes ; aussi Jésus-Christ n’a point dit : II faut que le Fils de l’homme soit attaché à une croix, mais il a dit : Il faut qu’il soit élevé ; de manière à choquer moins celui qui l’écoutait, et à se rapprocher de la figure.
« Car Dieu a tellement aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique, afin que tout » homme « qui croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle (16) ». C’est-à-dire : Ne vous étonnez pas que je sois élevé, afin que vous soyez sauvés ; ainsi a décidé mon Père, et mon Père vous a tellement aimés, qu’il a donné son Fils pour ses serviteurs et pour des serviteurs ingrats ; quand personne n’en ferait autant pour son ami. Saint Paul dit même : « Et certes, à peine quelqu’un voudrait-il mourir pour un juste ». (Rom. 5,7). L’apôtre appuie davantage sur cet amour de Dieu, parce qu’il parlait à des fidèles ; Jésus-Christ l’exprime ici avec plus de ménagement, parce qu’il parlait à Nicodème ; mais ce qu’il dit est plus significatif encore, comme on peut s’en convaincre en pesant chacun des mots dont il