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les écouter, pour se retirer et les quitter peu après : Jésus-Christ ne fait pas de même, connaissant parfaitement tout ce que ces hommes avaient de plus secret et de plus caché dans leurs cœurs. Tels sont aujourd’hui plusieurs, qui véritablement ont le nom de fidèles, mais qui sont inconstants et volages. Voilà pourquoi Jésus-Christ ne se fie point à eux, mais leur cache beaucoup de choses. Comme en effet nous ne nous fions pas à toute sorte d’amis, mais seulement aux vrais ; de même Dieu ne se fie pas indifféremment à tous. Écoutez plutôt ce que Jésus-Christ dit à ses disciples : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car vous êtes mes amis ». Comment ? pourquoi ? « Parce que je vous ai fait savoir. « tout ce que j’ai appris de mon Père ». (Jn. 15,15) C’est pour cette raison qu’il refusait aux Juifs les miracles qu’ils demandaient il savait qu’ils ne les demandaient que pour le tenter.
Est-ce maintenant, comme autrefois, tenter Dieu, que de lui demander des miracles ? Car il y a aujourd’hui des gens qui font la question suivante : Pourquoi maintenant encore Dieu ne fait-il pas des miracles ? Si vous êtes fidèles, comme vous devez l’être ; si vous aimez Jésus-Christ, comme il est juste de l’aimer, vous n’avez pas besoin de miracles les miracles sont pour les infidèles. Pourquoi donc, direz-vous, n’en a-t-on pas donné aux Juifs ? Sûrement on leur en a donné ! mais, quelquefois ils ont été repoussés, lorsqu’ils en demandaient, parce qu’ils ne les demandaient pas pour se guérir de leur aveuglement et de leur incrédulité, mais pour s’y fortifier davantage et devenir plus méchants.
« Or, il y avait un homme d’entre les pharisiens, nommé Nicodème, sénateur des Juifs (2), qui vint la nuit trouver. Jésus ». Cet homme semble défendre Jésus-Christ au milieu de la prédication de l’Évangile, car il dit : « Notre loi ne condamne personne sans l’avoir ouï auparavant ». (Jn. 7,51) Les Juifs se fâchent contre lui et lui répondent avec indignation : « Lisez avec soin les Écritures, et apprenez qu’il ne sort point de prophète de Galilée ». (Id. 52) De même, après que Jésus-Christ eut été crucifié, il eut un grand soin de la sépulture du corps de Notre-Seigneur. « Nicodème », dit l’évangéliste, ce qui était venu trouver Jésus, durant la « nuit, y vint aussi avec environ cent livres d’une composition de myrrhe et d’aloès ». (Jn. 19,39) Dès lors cet homme était bien affectionné pour Jésus-christ : mais néanmoins, non pas autant qu’il était juste, ni avec l’esprit qu’il fallait ; une certaine faiblesse juive le dominait encore. C’est pourquoi il vint de nuit ; car il n’aurait pas osé venir de jour. Mais Dieu, plein de bonté et de miséricorde, ne le rejeta point, ne lui fit aucun reproche et ne le priva pas de sa doctrine. Il lui parla au contraire avec beaucoup de douceur, il lui découvrit sa sublime doctrine, à la vérité d’une manière enveloppée, mais toutefois il la lui découvrit : car il était beaucoup plus excusable que ceux qui faisaient la même chose avec une maligne disposition. En effet, ceux-ci sont tout à fait indignes d’excuse ; celui-là était à la vérité blâmable, mais point tant que les autres. Pourquoi donc l’évangéliste ne l’a-t-il pas marqué ? D’abord il a dit ailleurs que plusieurs des sénateurs mêmes avaient cru en Jésus-Christ ; mais qu’à cause des Juifs ils n’osaient le reconnaître publiquement, de crainte d’être chassés de la synagogue. Mais ici il a tout dit, tout fait connaître par ces mots : il est venu durant la nuit. Que dit donc Nicodème ? « Maître, nous savons que vous êtes, venu de la part de Dieu pour nous instruire comme un docteur ; car personne ne saurait faire les miracles que vous faites, si Dieu, n’est avec lui (3) ».
2. Nicodème rampe encore à terre, il a encore de Jésus-Christ des sentiments tout humains, il parle de lui comme d’un prophète, les miracles qu’il a vus n’ont point élevé son esprit et ne lui ont rien inspiré de grand. « Nous savons », dit-il, « que vous êtes un docteur envoyé de Dieu. » Pourquoi donc venez-vous de nuit secrètement trouver celui qui dit des choses divines et qui est envoyé de Dieu ? Pourquoi ne l’abordez-vous pas avec confiance ? « Mais Jésus-Christ ne lui dit pas même cela, il ne lui fait aucune réprimande : « Car il ne brisera point le roseau cassé », dit l’Écriture, « et il n’éteindra point la mèche qui fume encore : il ne disputera point, il ne criera point ». (Is. 42,3 ; Mt. 12,19-20) Et-en un autre endroit : « Je ne suis a pas venu pour juger le monde, mais pour sauver le monde ». (Jn. 12,47)
Personne ne saurait faire les miracles que « vous faites, si Dieu n’est avec lui ». Cet homme parle encore selon, l’opinion des hérétiques :