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était besoin d’un miracle pour les obliger de mettre un terme à ces mauvaises pratiques, par lesquelles ils déshonoraient la maison du Seigneur ? Ce grand zèle pour la maison de Dieu n’était-il pas un très-grand miracle et suffisant pour prouver sa vertu et sa puissance ? Au reste, cette action fit connaître les bons. Car ses « disciples se souvinrent qu’il est écrit : Le zèle de votre maison me dévore (17) ». Mais les Juifs ne se souvinrent pas de la prophétie ; ils disaient : « Quel miracle nous montrez-vous ? » Affligés de se voir arrêtés dans leurs trafics sordides et honteux, et comptant par là lui lier les mains, ils sollicitent de lui un miracle pour avoir lieu de s’inscrire en faux contre ce qu’il ferait ; c’est pourquoi il ne leur en donne point. Déjà, quelque temps auparavant, ils étaient venus le trouver pour lui en demander un, et il leur avait fait la même réponse : « Cette nation corrompue et adultère demande un prodige, et il ne lui en sera point donné d’autres que celui du prophète Jonas ». (Mt. 16,4) Mais sa première réponse était plus claire, celle-ci est plus enveloppée ; il en use ainsi à cause de leur folie. Celui qui prévenait ceux qui ne demandaient pas et leur donnait des miracles, n’aurait pas repoussé ceux qui lui en demandaient un, s’il n’avait connu leur fourberie et leur méchanceté. La manière même dont ils demandent, de quelle méchanceté et de quelle malignité ne témoigne-t-elle pas ? Faites-y attention, je vous en prie ; ils devaient louer son zèle et son amour, et admirer le grand soin qu’il prenait de la maison de Dieu, et au contraire ils le blâment, ils soutiennent qu’il leur est permis de vendre, et qu’il n’a pas le droit de les en empêcher, s’il ne le leur montre par un miracle.
Que leur répondit donc. Jésus-Christ ? « Détruisez ce temple et je le rétablirai en trois « jours (19) ». Il dit ainsi bien des choses qui sont obscures pour ceux qui les entendent, mais qui sont claires pour ceux qui viendront dans la suite. Pourquoi ? Afin que l’accomplissement de sa prédiction prouvât un jour la connaissance qu’il avait de l’avenir, et c’est ce qui arriva pour cette prophétie : « Après qu’il fut ressuscité d’entre les morts, ses disciples se ressouvinrent qu’il leur avait dit cela, et ils crurent à l’Écriture et à la parole que Jésus-Christ avait dite (22) ». Quand Jésus-Christ disait ces choses, les uns hésitaient sur le sens de ses paroles, les autres disputaient, disant : « Ce temple a été quarante-six ans à bâtir et vous le rétablirez en trois jours ? (20) ». En disant quarante-six ans, ils font voir qu’ils parlent de la dernière construction du temple ; car la première fut finie en vingt années.
3. Pourquoi donc ne résout-il pas cette énigme, et n’a-t-il pas dit : Je ne parle pas de ce temple, mais du temple de mon corps ? L’évangéliste, écrivant longtemps après, a donné cette explication, mais Jésus-Christ n’en a dit mot ; pourquoi ? Parce que les Juifs n’auraient pas ajouté foi à ses paroles. En effet, si alors les disciples mêmes ne pouvaient pas comprendre ce qu’il disait, le peuple l’aurait bien moins compris. « Après que Jésus fut ressuscité d’entre les morts », dit saint Jean ils se ressouvinrent, et ils crurent à la parole et à l’Écriture ». Jésus-Christ proposa alors deux choses à croire : la résurrection, et, ce qui est plus grand, que celui qui était dans ce corps qu’ils voyaient était Dieu ; il leur insinue l’un et l’autre, en disant : « Détruisez ce temple et je le rétablirai en trois jours ». Saint Paul ayant ces paroles en vue, dit qu’elles ne sont pas une faible preuve de la divinité, ce qu’il explique en ces termes : « Qui a été prédestiné » pour être « Fils de Dieu dans » une souveraine « puissance, selon l’Esprit de « sainteté, par sa résurrection d’entre les morts » ; touchant, dis-je, « Jésus-Christ Notre-Seigneur ». (Rom. 1,4)
Pourquoi là, et ici, et ailleurs, Jésus-Christ donne-t-il cette preuve, disant tantôt : « Quand j’aurai été élevé ». (Jn. 12,32) Et : « Quand vous aurez élevé en haut le Fils de l’homme, alors vous connaîtrez qui je suis ». Et tantôt : « Il ne lui sera point donné d’autre prodige a que celui de Jonas ». Et ici encore : « Je le rétablirai en trois jours ? » Il la donne, cette preuve, parce que c’est elle principalement qui fait connaître qu’il n’était pas simplement un homme, qu’il pouvait triompher de la mort, détruire sa longue tyrannie, et finir en peu de temps une guerre si difficile. Voilà pourquoi il dit : « Alors vous connaîtrez ». Quand, alors ? Lorsqu’après ma résurrection j’attirerai tout le monde, alors vous connaîtrez que, comme Dieu et vrai Fils de Dieu, « j’ai voulu être élevé sur une croix », pour venger l’outrage que les hommes ont fait à mon Père.