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Juifs, le larron est devenu citoyen du ciel une prostituée a brillé par sa grande foi : de deux femmes, la chananéenne et la samaritaine, celle-ci femme débauchée comme la précédente ; l’une entreprend de convertir ses concitoyens et amène à Jésus-Christ tous les habitants de sa ville, comme pris dans un filet ; l’autre, par sa foi et sa persévérance, chasse le malin esprit de l’âme de sa fille ; d’autres, encore pires que ceux-là, passent tout à coup au nombre des disciples. En un instant tout se réformait, les infirmités des corps, les maladies des âmes : tous recouvraient la santé et arrivaient à la plus haute vertu. Ce n’était pas seulement deux, ou trois, ou cinq, ou dix, ou vingt, ou cent personnes qui changeaient de vie et se convertissaient facilement, mais des villes et des provinces entières. Et qui pourrait parler dignement de la sagesse des préceptes, de la force et de la vertu des lois célestes, de l’excellence d’une morale tout angélique ? Car, tel est le genre de vie que Jésus-Christ a introduit ici-bas, telles sont les lois qu’il a établies, et la morale qu’il a fondée, que ceux qui les suivent et s’y conforment deviennent aussitôt des anges, et semblables à Dieu, autant que cela est possible à l’homme, quand bien même ils auraient été les plus méchants de tous les hommes.
3. Voilà pourquoi l’évangéliste, rassemblant et se représentant tout à la fois tous les miracles que Jésus-Christ a opérés, soit dans les corps, soit dans les âmes, soit sur les éléments ; et aussi les préceptes, ces dons mystérieux (lui sont plus grands et plus sublimes que les cieux mêmes, les lois, la morale, la foi, l’espérance, les promesses des biens futurs, la Passion ; voilà, dis-je, pourquoi l’évangéliste a fait tonner sa voix, et prononcé ces admirables paroles qui renferment une sublime doctrine : « Nous avons vu sa gloire ; sa gloire », dis-je, « comme du Fils unique du Père, étant plein de grâce et de vérité ». Ce n’est pas seulement pour les miracles que nous l’admirons, mais nous l’admirons aussi dans sa Passion et dans ses souffrances : nous l’admirons attaché à une croix, flagellé, souffleté, couvert de crachats, et dans les coups que lui ont donné sur les joues ceux qu’il avait comblés de bienfaits. Il est juste en effet d’appliquer aussi les paroles de saint Jean à ces choses qui paraissent ignominieuses, puisque Jésus-Christ lui-même a appelé tout cela gloire. En effet, ces choses ne sont pas seulement des marques et des témoignages de sa providence et de son amour, mais encore de sa toute-puissance puisque c’est alors que la mort fut détruite, que la malédiction fut effacée (Gal. 3,13), que les démons furent confondus, qu’on triompha d’eux, et que la cédule de nos péchés fut attachée à la croix (Col. 2,14).
De plus, comme ces miracles se faisaient invisiblement, il s’en fit quelques-uns visiblement, qui prouvaient que Jésus-Christ était le Fils unique de Dieu, et le Seigneur de toute la nature ; son bienheureux corps étant encore attaché à la croix, le soleil retira sa lumière et s’obscurcit, la terre trembla et fut couverte de ténèbres, les sépulcres s’ouvrirent, les fondements de la terre furent ébranlés, une multitude innombrable de morts sortit du tombeau, ressuscita et vint dans la ville (Mt. 27,51, Lc. 23,44). Ensuite cet autre mort, qui avait été cloué et crucifié, ressuscita, sans déranger les pierres de son sépulcre, sans en briser les sceaux ; et ayant rempli les onze disciples d’un grand courage et d’une force invincible, il les envoya dans tout le monde pour être les médecins universels de la nature, pour réformer la vie des hommes, pour répandre partout la semence de la céleste doctrine, détruire la tyrannie des démons, et faire connaître aux hommes les vrais, les ineffables biens ; pour nous prêcher l’immortalité de l’âme, la vie éternelle du corps, des récompenses qui surpassent notre intelligence, et qui n’auront point de fin.
Le bienheureux évangéliste repassant donc dans son esprit toutes ces choses et plusieurs autres, que sûrement il connaissait bien, mais qu’il n’a pas voulu écrire parce que le monde n’aurait pu les contenir ; car « si », dit-il, « on rapportait tout en détail, je ne crois pas que le monde entier pût contenir les livres qu’on a en écrirait » (Jn. 21,25) ; considérant, dis-je, toutes ces choses, il s’est écrié : « Nous avons vu sa gloire ; sa gloire », dis-je, « comme du Fils unique du Père, étant plein de grâce et de vérité ». Il faut donc que ceux qui ont le bonheur de voir tant de merveilles, d’entendre une si belle doctrine, de recevoir de si grands dons, mènent une vie qui soit digne des dogmes, pour mériter de, jouir des biens futurs. En effet, Notre-Seigneur Jésus-Christ est venu pour nous faire voir non seulement sa gloire terrestre, mais encore sa gloire céleste. Voilà pourquoi il