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chargé, afin de vous en délivrer. « Ceignez votre épée sur votre cuisse, puissant, dans voire jeunesse et votre beauté (4). » D’après un autre : « Votre louange et votre dignité. » Suivant un autre : « Dans votre gloire et votre majesté. » Que signifie ce changement de ton et de langage ? Tout à l’heure il parlait d’un docteur ; c’est ce que veut dire, en effet : « La grâce a été répandue sur vos lèvres ;» et voici que subitement il nous dépeint un roi en armes, et cela non plus en forme de prophétie, mais en forme de supplication. Il ne dit pas, en effet : il ceindra son épée ; il demande : « Ceignez, dit-il, votre épée. » Ensuite, il revient à la beauté, et nous dépeint son héros, tantôt comme un guerrier, tantôt comme un beau jeune homme : « Dans votre jeunesse et votre beauté. » Puis, comme un archer : « Vos traits sont aiguisés, puissant. » Ensuite, comme un vainqueur, un triomphateur : « Les peuples tomberont sous vous, au cœur des ennemis du roi. » Enfin, il nous montre les parfums que répand sur son corps ce guerrier, ce roi, cet archer, ce vainqueur : « La myrrhe, l’aloès et la cannelle parfument vos habits. »
5. Quel rapport entre ces armes et ces odeurs, ces parfums et cette épée, entre l’enseignement et la guerre, les flèches et la beauté ? D’une part, des symboles de paix ; de l’autre des emblèmes de guerre et de combat. Qui est-ce donc, qui est fait à la fois pour la paix et pour la guerre ? qui exhale l’odeur des parfums, et se revêt d’une – armure ; qui habite des palais d’ivoire, et extermine des milliers d’ennemis ? Comment venir à bout de cette difficulté ? En considérant qu’il est ici question du Père en même temps. – Ailleurs encore le Prophète le montre armé, lorsqu’il dit, par exemple : « Si vous ne vous convertissez pas, il fera briller son glaive ; il a tendu son arc, il l’a préparé, et y a disposé les instruments de mort. » (Ps. 16,3) Et ailleurs encore : « Il revêtira la cuirasse de l’équité. » (Sag. 5,19) Observez que c’est toujours de son propre mouvement qu’il agit. De même qu’il est dit dans un de ces passages : « Il fera briller son glaive », sans que personne l’y pousse lui-même de son plein gré : de même on lit ici : « Les traits du puissant ont été aiguisés, les peuples tomberont sous vous au cœur des ennemis du roi. » Puis afin de montrer que Dieu n’obéit en cela à aucune impulsion étrangère, le Psalmiste ajoute : « Votre main vous guidera miraculeusement. » C’est comme s’il disait : Ce n’est pas d’autre part que vous recevez l’impulsion ; vous vous suffisez à vous-même. – Écoutez encore le Dieu de paix parler ainsi à ses disciples : « Je ne suis pas venu jeter la paix sur la terre, mais le glaive. » (Mt. 10,34) Et encore : « Je suis venu jeter un feu sur la terre ; et qu’est-ce que je veux, sinon qu’il s’allume ? » Notre Psalmiste parlant également de celui qui doit venir, prédit comment il viendra : « Il descendra comme une pluie sur une toison, et comme une goutte qui tombe sur la terre. » (Ps. 71,6) Je vous entretiens de ces choses, afin d’éveiller votre attention, et de vous exciter à chercher en vous-mêmes la solution, et le sens enfermé sous l’apparence des mots. Ces mots sont destinés à exprimer les opérations de la puissance divine. De même ici, quand vous entendez ces mots : « Ceignez votre épée sur votre cuisse ; » voyez là un mot destiné à marquer le pouvoir : de même pour l’arc et les flèches. Ainsi que l’Écriture dit de Dieu qu’il se met en colère, non qu’elle lui attribue une passion, mais afin de représenter par là le pouvoir de punir qui lui appartient, et de frapper l’esprit des hommes grossiers : ainsi elle parle ici d’armes, toujours dans le même but. En effet, comme les hommes pour se venger empruntent le secours de certains instruments, l’écrivain sacré, voulant montrer la puissance vengeresse de Dieu, a recours à des noms qui nous sont familiers, non pas pour que nous nous représentions le Seigneur en armes, mais pour que nous soyons plus, effrayés de ses châtiments. Mais beaucoup d’hommes, dira-t-on, ont trouvé là un sujet de scandale : c’est un simple effet de leur déraison, de leur étourderie : car, ait seul nom de Dieu, ils auraient dû comprendre que ces expressions étaient figurées. Et d’ailleurs l’Écriture, en d’autres endroits, ne se fait pas faute de témoigner par son langage de l’impassibilité divine. Écoutez comment ailleurs apparaît la facilité avec laquelle Dieu punit : « Que Dieu se lève, que ses ennemis soient dissipés. » (Ps. 67,2) Est-il besoin d’armes ? est-il besoin d’épée ? Qu’il se lève, cela suffit. Mais ceci même est encore un peu grossier : de là ces expressions plusieurs fois répétées : « Celui qui regarde sur la terre, et qui la fait trembler. » Et encore : « Par son aspect fut ébranlée la terre. » Mais ici même il reste de