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fut fortifié par la foi. » (Rom. 4,20) Oui, ta foi est un appui solide, un port sûr, ou l’âme, revenue des écarts du raisonnement, se repose en paix. « Bienheureux vos yeux, parce qu’ils voient ; » car Il nous faut revenir encore à cette même parole. Les Juifs pourtant voyaient aussi ce qui se passait. Mais ce n’est, pas cette vision extérieure qui est proclamée bienheureuse, ce n’est pas elle qui par ses organes voit les miracles, mais la vision intérieure. Ils ne voyaient que ténèbres et ils disaient : « C’est lui, ce n’est pas lui ; appelons ses parents. » (Jn. 9,8-9.18) Entendez-vous leur incertitude ? Voyez-vous qu’il ne suffit pas des yeux du corps pour voir les miracles ? Ceux qui étaient près de lui et le regardaient de leurs yeux, disaient : « C’est lui, ce n’est pas lui », et nous qui – sommes loin, nous ne disons pas : « C’est lui, ce n’est pas lui ; » mais c’est lui-même. Comprenez-vous qu’être loin, n’y fait rien, quand on a les yeux de la foi et qu’être, près ne sert de rien, quand on ne les a pas ? Qu’ont-ils gagné à voir ? Rien. Car nous avons une vision plus claire que la leur.
Puis donc que vos yeux voient et que vos oreilles entendent comme ceux que le Christ a proclamés bienheureux, je veux vous présenter les perles précieuses de l’Écriture. Car de même que le Christ, loin de répondre aux questions des Juifs augmenta encore leur ignorance, parce qu’ils ne comprenaient pas ; de même, puisque vous comprenez, vous devez avoir l’explication de ces mystères. Les disciples s’approchaient étonnés et lui disaient : « Pourquoi leur parlez-vous en paraboles ? » (Mt. 13,10, 13) Et il leur répondit : « Parce qu’ils voient sans voir. » Vous qui tout au contraire sans avoir vu alors, voyez maintenant, il ne faut pas que je vous parle en paraboles ; et il ajoutait : « Ils entendent sans entendre ; » vous qui, sans avoir entendu alors, n’entendez pas moins aujourd’hui que vous n’auriez entendu au moment même, il ne faut pas que je vous prive de vous faire asseoir à cette table. Car le Christ n’a pas proclamé moins heureux ceux qui sont comme vous que les autres : « Tu as vu, dit-il, et, tu as cru ; bienheureux ceux qui n’ont pas vu et ont cru. » (Jn. 20,29) Ne soyez donc pas moins ardents au bien, pour n’avoir pas vécu alors, pour être venus au monde seulement aujourd’hui. Car si vous le voulez, vous n’en souffrirez pas, de même que beaucoup de ceux qui ont vécu au temps du Christ, parce qu’ils n’ont pas voulu, n’y ont rien gagné.
3. Qu’avons-nous donc lu aujourd’hui ? « Sachez que dans les derniers jours il y aura des temps redoutables. » C’est de la seconde épître à Timothée que sont tirées ces paroles. Terrible menace ! mais relevons la tête : il laisse entendre sans préciser et les temps où nous sommes, et les temps futurs, et les temps jusqu’à la consommation des siècles. « Sachez que dans les derniers jours il y aura des temps redoutables. » Parole concise, et d’une grande force ! De même en effet que les aromates répandent leur parfum, non par leur masse, mais par leur vertu même : de même les saintes Écritures nous sont utiles, non par l’abondance des paroles, mais par l’énergie du sens. L’essence même d’un aromate est son parfum : si vous en jetez une parcelle au feu, elle développe toutes ses enivrantes vertus ; ainsi l’Écriture sainte en elle-même est pleine de suavité : et quand elle descend dans notre âme, c’est comme si elle était jetée dans un vase à brûler les parfums elle en remplit tout le dedans d’une suave odeur.
« Or sachez que dans les derniers jours il y aura des temps redoutables. » Il parle de la consommation des siècles. Que vous fait à vous, bienheureux Paul, la consommation des siècles, ainsi qu’à Timothée, et à veut qui vous entendent ? Dans peu d’années ils doivent mourir, échapper aux dangers futurs et au contact des méchants. Je ne borne pas mes regards au présent, répond-il, je les étends jusque sur l’avenir. Je ne veille pas seulement sur le troupeau qui m’entoure ; je, crains, je tremble aussi pour celui qui doit naître. Nous autres nous ne songeons guère qu’aux hommes qui vivent à nos côtés, mais lui, il porte sa sollicitude jusque sur ceux qui ne sont pas nés encore. Le bon pasteur n’attend pas de voir le loup attaquer ses brebis et se jeter sur elles, pour les avertir, mais il signale l’ennemi au loin. De même Paul, à l’exemple du bon pasteur, placé sur une hauteur, au rang des prophètes, et voyant de loin d’un regard prophétique les bêtes cruelles qui menacent le troupeau, prédit et prophétise leur attaque lors de la consommation des siècles, pour préparer ceux qui ne sont pas