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enlève, pille et apporte-moi, pendant quelques instants bien courts tu peux plaire ; mais, bientôt tu as en lui un ennemi. Et, ce qui te montrera que ces ornements ne te rendent pas agréable pour ton mari, c’est que tu les quittes à la maison ; c’est dans l’église que tu portes ces parures. Si tu plaisais, par là, à ton mari, c’est à la maison que tu les porterais ; mais, comme je l’ai dit, c’est dans l’Église que tu entres toute dorée, sur les mains et sur le cou. Si Paul entrait, ce Paul terrible, aimable tout ensemble, terrible pour les pécheurs, aimable pour ceux qui vivent dans la piété, il ferait entendre ce cri pour vous dire : « Que les femmes ne se parent ni d’ornements d’or, ni de perles, ni d’habits somptueux. » (1Tim. 2,9) Et maintenant, si un gentil entrait au milieu de nous et voyait, en haut, ces femmes portant ces ornements, et en bas, Paul prononçant ces paroles, ne dirait-il pas qu’il y a ici une comédie ? non, non, nous ne jouons pas de comédie, quoi qu’il arrive ; mais le gentil a les regards blessés, et il dit : je suis entré dans une église chrétienne, j’ai entendu Paul qui disait : « ni or, ni perles » et j’ai vu cette femme dont la conduite contredit ces paroles.
6. A quoi te sert l’or, ô femme ? à paraître belle et jolie ? mais cet or ne fait rien pour la beauté de ton âme. Deviens belle par l’âme, et tu seras aimable, par le corps. « La sagesse de l’homme illuminera son visage. » (Qo. 8,1). Or, la sagesse appartient à l’âme. Rien n’engendre l’amour et le désir, comme la charité. Si ton mari t’aime, quoique tu n’aies pas de beauté, tu lui parais désirable ; mais s’il te hait, quelle que soit ta beauté, il refuse de te voir. La haine qui remplit l’âme ne permet pas aux yeux d’apercevoir la beauté. Quand tu vas lui demander des ornements et de l’or, il est prêt de te haïr, comme celui qui, sur la place publique vient lui demander quelque chose. Seulement, celui-là, il peut le fuir, tandis qu’il ne peut pas t’éviter, toi qui es toujours dans la maison pour lui adresser des demandes que la raison désavoue. O femme, ne te contente pas de prêter l’oreille à ces paroles, mais change ton cœur. Mes paroles sont des remèdes qui brûlent quelque temps, pour produire un soulagement, un plaisir sans fin. Je suis médecin, et je fouille les plaies ; je préviens les progrès du mal, si la blessure dure trop longtemps ; j’exerce la médecine, et c’est par la parole que je rends la santé. Les autres ne s’occupent que de la vie présente, éphémère, mal assurée, misérable. Mais, je parlais d’Abraham (il ne faut pas que j’oublie mon texte) : « Pétrissez vite ; » voilà des paroles que chaque femme doit graver dans sa pensée, que chaque homme doit mettre en réserve dans sa conscience.
Pourquoi portez-vous des habits de soie ? Pourquoi vos chevaux ont-ils des freins d’or, et vos mules, de si beaux ornements ? Une mule a des ornements par en bas : de l’or, pour la couvrir ; des fortunes sont employées à revêtir des mulets, des êtres sans raison ; ils ont des freins d’or ; des mulets, des êtres sans raison, vous les voyez parés, ornés ; et le pauvre, que la faim dessèche, est assis à votre porte, et c’est le Christ que dessèche la faim. O comble du délire ! et quelle excuse, quelle chance pie pardon lorsque le Christ est là, devant vos portes, sous la forme d’un mendiant ? et vous, rien ne vous touche. Qui vous délivrera des supplices qui vous attendent ? J’ai fait l’aumône, dites-vous ; mais ne vous bornez donc pas à donner seulement ce que le pauvre vous demande ; donnez tout ce que vous pouvez donner. Que direz-vous un jour, répondez-moi, lorsque les insupportables châtiments, les supplices à venir, les voix menaçantes, les puissances terribles, le fleuve de feu, lorsque ce bruit retentira autour de vous, lorsque devant ce tribunal épouvantable, ce juge incorruptible, l’Être incréé, dans l’évanouissement de toutes les choses humaines, ni père, ni mère, ni voisins, ni rois, ni voyageurs, ni étrangers, rien ne pourra vous secourir, à cette heure où l’homme sera seul avec ses œuvres, pour être condamné ou couronné par elles que direz-vous alors ? Alors vous vous rappellerez mes discours ; mais de quoi vous serviront-ils ? de rien. Ce riche d’autrefois avait aussi la mémoire et il redemandait le temps accordé au repentir ; mais sa prière fut inutile. Il disait « Envoyez-moi Lazare, afin qu’ il trempe le bout de son doigt dans l’eau, pour me rafraîchir la langue, parce que je souffre d’extrêmes douleurs. » (Lc. 16,24) Mais, on ne lui envoya pas Lazare. Ce n’est pas qu’une goutte d’eau, dérobée aux sources abondantes du paradis, eût été une perte pour le ciel ; mais c’est qu’entre la moindre goutte de l’aumône et la dureté du cœur, tout mélange impossible. A l’heure des couronnes, Lazare