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que vous vous préoccuperez de la beauté de vos vêtements, songez que, malgré tous vos efforts, vous trouverez parmi l’herbe des champs, des fleurs qui feront pâlir votre luxe, et avec lesquelles vous ne pourrez rivaliser. Laissez donc de côté cette absurde passion. Nous pourrions trouver bien d’autres sujets de méditation en considérant soit les animaux, soit les fleurs, soit les semences. « Il faut rendre hommage à la magnificence de l’œuvre de Dieu (2). »
C’est-à-dire, à la magnificence de chacune de ses œuvres, car il ne s’agit point ici d’une œuvre seulement. Un autre interprète a dit : « Il faut louer et célébrer ses œuvres », et le premier : « Il faut rendre hommage », c’est-à-dire, il faut rendre grâces à Dieu et le glorifier. Chacune des choses que nous voyons suffit à éveiller en nous le désir de lui rendre grâces, de lui chanter des hymnes, de le bénir et de le glorifier. Il n’est pas permis de dire : Pourquoi ceci ? à quoi bon cela ? Les ténèbres et le jour, la disette et l’abondance, le désert et les pays inhabitables, les terres grasses et profondes, la vie et la mort, en un mot tout ce que nous voyons suffit pour exciter, chez ceux qui savent s’en rendre bien compte, le désir de rendre grâces au Seigneur. C’est ce que Dieu lui-même nous démontre lorsque, parlant par la bouche d’un de ses prophètes, il fait voir que ses vengeances sont autant de bienfaits : « Je les ai détruits, comme Dieu a détruit Sodome et Gomorrhe ; je les ai frappés de fièvres brûlantes et de maladies de foie. » (Amo. 4,11) Dans une autre circonstance, il s’exprime ainsi par la bouche d’un autre prophète : « Je les ai ramenés de la terre d’Égypte, et je les ai rachetés de la maison de la servitude (Mic. 6,4) ; » et montre le bienfait caché sous le châtiment. Il en est de même de ce que nous voyons : c’est autant de bienfaits pour nous, autant de sages et instructifs enseignements destinés à combattre le vice. Les hommes agissent tantôt pour faire du bien aux autres, tantôt dans un esprit de haine et d’aversion tandis que Dieu fait tout dans un esprit de bienveillante, ainsi ce fut pour son bien qu’il plaça le premier homme dans le paradis terrestre, pour son bien aussi qu’il l’en chassa : ce fut pour le bien des hommes qu’il fit le déluge, et pour leur bien qu’il lança sur Sodome le feu qui la consuma. Considérez chacune de ses actions, et vous verrez qu’il a tout fait en vue du bien. C’est pour notre bien qu’il nous a menacés de la géhenne : si les pères, lorsqu’ils frappent leurs enfants, sont tout aussi bien leurs pères que lorsqu’ils les caressent, et tout aussi bons pères dans un cas que dans l’autre, pourquoi n’en serait-il pas de même de Dieu ? Ce qui faisait dire à saint Paul : « Quel est le fils que son père ne châtie pas ? » (Héb. 12,7) Et à Salomon : « Le Seigneur châtie celui qu’il aime, il corrige avec le fouet tous ceux de ses enfants qu’il veut instruire. Sa justice subsiste dans les siècles des siècles. » (Prov. 3,12)
4. Il me semble que dans ce passage Salomon s’adresse à ceux qui sont scandalisés à la vue des malheurs qui frappent ceux qu’on ne croirait pas devoir en être frappés, c’est à peu près comme s’il parlait en ces termes : ne vous troublez pas en voyant des hommes faussement accusés, à qui l’on nuit et que l’on maltraite sans qu’ils l’aient mérité : car il leur reste un tribunal incorruptible, il leur reste un juge intègre qui donne à chacun selon son mérite. Si maintenant vous voulez demander compte à ce juge de ses décisions, prenez garde d’attirer sur vous une sentence de condamnation. Car si, à chacun de nos péchés, Dieu devait répondre par un châtiment, si, à chacune de nos fautes il devait infliger la condamnation qu’elle mérite, il y a longtemps que le genre humain aurait disparu de dessus la terre. Et pourquoi parlé-je de tel ou tel ? Pour vous prouver ce que j’avance, je vais amener devant vous cet homme supérieur à tous les hommes, ce Paul dont la voix a été entendue de toute la terre, qui fut ravi au troisième ciel, qui fut transporté dans le paradis, que Dieu a initié à ses mystères redoutables, ce vase d’élection, ce paranymphe du Christ, cet homme quia mené la vie d’un ange, qui est arrivé à un tel degré de perfection. Si Dieu n’avait pas voulu patienter avec lui, s’il n’avait pas voulu le supporter à l’époque de ses erreurs, de ses blasphèmes et de ses persécutions, et s’il l’eût arrêté dans sa course en le frappant de la condamnation qu’il méritait, ne l’eût-il pas privé dès l’abord de tout moyen de se repentir ? Et saint Paul le savait bien, lui qui disait : « Je rends grâces à notre Seigneur Jésus-Christ, qui m’a fortifié, de ce qu’il m’a jugé fidèle en m’établissant dans son ministère ; moi qui étais auparavant un blasphémateur, un persécuteur et un ennemi outrageux.