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et sans interruption ; et de même qu’il est impossible qu’il n’existe pas, de même il est impossible qu’il ne soit pas le maître souverain. « Au jour de votre puissance. » On peut entendre par là soit le jour où sa puissance s’est déjà montrée, soit le jour où elle se montrera encore. À chaque fois il fera éclater souverainement sa puissance. Ne croyez-vous pas que ce soit une preuve extraordinaire de puissance, que d’anéantir la mort par sa propre mort, de briser les portes d’airain, d’effacer le péché, de supprimer la malédiction originelle, de détruire tout ce triste héritage de maux et de vices, qui nous avait légué le temps passé, et d’introduire à la place de nouveaux biens et de nouvelles vertus ? Quoi d’égale à cette puissance, soit que l’on considère les prodiges par elle accomplis, soit que l’on considère le succès final ? Les morts ressuscitaient, les lépreux étaient guéris, les démons chassés, la mer était enchaînée, les péchés effacés, les paralytiques recouvraient leurs forces, le paradis était ouvert, les rochers se fendaient, le voile du temple se déchirait, les rayons du soleil se détournaient et les ténèbres voilaient la face de la terre, les saints endormis du sommeil de la mort se réveillaient, l’ennemi du genre humain reprenait le chemin de son ancienne demeure, la voûte du ciel s’entrouvrait et s’élargissait, la nature humaine si longtemps foulée aux pieds s’élevait par-dessus les cieux jusqu’aux plus sublimes hauteurs, et, ce qu’il y avait de plus merveilleux, prenait place sur le trône royal, et voyait debout à ses côtés les anges et les dominations : tous les vices étaient mis en fuite, la vertu était ramenée, le Saint-Esprit répandait sa grâce ; des pêcheurs, des publicains et des faiseurs de tentes fermaient 1a bouche aux philosophes et aux orateurs, et détruisaient la tyrannie des démons ; ils détruisaient les autels, les temples, les fêtes elles solennités des païens ; ils supprimaient de vive force et l’odeur de la graisse des victimes, et la fumée de l’encens offert aux dieux, et les sacrifices impurs ; ils mettaient en fuite et les devins, et les quêteurs de la grande déesse, et toute la cohue de ces serviteurs du diable : sur toute la surface de la terre s’élevaient des églises, se fortifiaient des groupes de vierges, des troupes de moines ; la piété régnait sur les villes et dans les campagnes, et les chœurs des justes et des saints mêlés à la foule des anges et des dominations unissaient leurs voix pour chanter avec eux les louanges du Seigneur ; partout se propageait la race des martyrs et des confesseurs de la foi, partout régnait une vertu douce et séduisante ; les tribus barbares s’instruisaient à la sagesse chrétienne, et ces hommes, naguère plus féroces que les bêtes sauvages, mettaient toute leur ardeur à se conformer aux enseignements du Christ, et la divine parole parcourut autant de pays que le soleil en éclaire, après que le Sauveur eut été mis en croix et qu’il eut ressuscité. Le Prophète avait devant les yeux ce magnifique spectacle quand il disait : « La domination est avec vous au jour de votre puissance. »
6. Si vous voulez vous représenter le dernier jour, et comprendre comment ce jour-là, lui aussi, est le jour de sa puissance, songez quel imposant spectacle ce sera, que de voir le ciel se replier lui-même, de voir la nature entière se relevant enfin de sa longue corruption ; de voir, sur un signe du Christ, tous les morts apparaître, de voir le diable confondu, les démons humiliés, les justes couronnés, tous les hommes rendant compte de leurs péchés ou recevant le prix de leurs bonnes actions ; et quel imposant spectacle que de voir enfin commencer une autre vie ! Alors plus de mort, de vieillesse, ni de maladie, plus de pauvreté, de mauvais traitements, ni d’embûches, plus de maisons, de villes, de métiers, ni de voyages sur mer, plus de vêtements pour se couvrir le corps, plus de nourriture, ni de boissons, ni de toits, ni de lits, ni de tables, ni de lampes, plus d’embûches, de combats, ni de tribunaux, plus de mariages, de douleurs d’enfantement, ni d’accouchements. Tout cela se dissipe et disparaît comme de la poussière. À la vie d’ici-bas succède une vie meilleure, notre corps devient incorruptible, immortel et très-robuste. C’est à quoi font allusion ces paroles de saint Paul : « Car la figure de ce monde passe. » (1Cor. 7,31) Si vous ne croyez pas aux choses qu’on vous dit, parce que vous lie les voyez pas se réaliser maintenant, représentez-vous, d’après ce que vous voyez dès cette vie, ce qui aura lieu plus tard. Parcourez en esprit tous les pays habités, et les terres et les mers, la Grèce et les contrées étrangères, les pays habités et ceux qui ne le sont pas, les villes du continent et les îles, de la mer, les montagnes et les lacs, et en voyant éclater partout la puissance du Christ, en entendant son nom glorieux répété par toutes les