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bien haut, afin que cette vérité éclate à tous les yeux. Ainsi, si celui qui a été préposé au gouvernement de l’Église et qui a été honoré de la dignité d’évêque, n’indique pas au peuplé ce qu’il doit faire, il encourt une grande responsabilité ; mais le laïque n’est tenu par aucune nécessité de ce genre. C’est pour cette raison que l’apôtre Paul dit : « Selon le commandement de Dieu notre Sauveur ». Et voyez comme la suite s’accorde avec ce que je viens de dire. Paul venait de dire : « Dieu qui ne ment point » ; il dit maintenant : « Par le commandement de Dieu notre Sauveur ». Si donc il est notre Sauveur, et qu’il nous donne des commandements, par le désir qu’il a de nous sauver, la prédication n’est point une œuvre d’ambition, c’est une mission de foi, c’est un commandement de Dieu notre Sauveur.
« A Tite mon vrai fils ». Il y a en effet des fils qu’on ne reconnaît point pour ses vrais fils, comme celui dont il est dit : « Si quelqu’un, qui se nomme frère, est fornicateur, ou avare, ou idolâtre, ou médisant, ou ivrogne, ou ravisseur, ne mangez pas même avec un tel homme ». (1Cor. 5,11) Un tel homme est un fils, mais ce n’est point un vrai fils ; c’est un fils, car il a reçu la grâce une fois et il a été régénéré ; ce n’est point un vrai fils, car il est indigne de son père, car il se met sous un autre maître. En effet, dans l’ordre de la nature, le vrai fils se distingue du fils illégitime par sa mère, et il porte le nom de son père. Dans l’ordre de la grâce il n’en est pas ainsi, c’est par choix qu’on est fils ; aussi appartient-il à celui qui est un vrai fils de ne pas demeurer tel, et à celui qui ne l’est pas, de le devenir. En effet, ce n’est point par la nécessité de la nature que cette question est décidée, c’est par la liberté du choix : de là tant de changements. Onésime, par exemple, était un vrai fils, mais il cessa de l’être pour un temps, parce qu’il devint méchant. Ensuite il le redevint au point que l’apôtre l’appelait ses entrailles.
« A Tite mon vrai fils, selon la foi qui nous est commune ». Qu’entend-il par ces mots : « Selon la foi qui nous est commune ? » Après l’avoir appelé son fils et s’être lui-même donné pour un père ; pourquoi diminue-t-il et affaiblit-il cet honneur ? En voici la raison : « Selon la foi qui nous est commune », ajoute-t-il, c’est-à-dire, selon la foi je n’ai rien de plus que toi ; car elle nous est commune et c’est par elle que toi et moi nous avons été engendrés. Mais alors pourquoi l’appelle-t-il son fils ? C’est ou pour montrer seulement qu’il a l’affection d’un père, ou parce qu’il l’a précédé dans l’apostolat, ou parce que Tite a été baptisé par lui. C’est pour cette raison qu’il appelle les fidèles ses fils et ses frères : ses frères, parce qu’ils ont été engendrés parla même foi ; ses fils, parce qu’ils ont été engendrés à la foi par son ministère. Lors donc qu’il dit : « Selon la foi qui nous est commune », il indique qu’il est le frère de Tite.
« Grâce et paix de la part de Dieu le Père et de Jésus-Christ notre Sauveur ». Après avoir dit : « Mon fils », il ajoute : « De la part de Dieu le Père », pour élever son âme, et lui apprendre de qui il est fils ; il ne se contente pas de dire : « Selon la foi qui nous est commune », il ajoute encore : « De la part de notre Père », et par là il lui montre une fois de plus qu’il est son égal en dignité.
3. Voyez comme il demande pour le maître les mêmes grâces que pour les disciples et la foule des fidèles. C’est qu’il a besoin des mêmes prières, et même il en a plus besoin que les, autres, parce qu’il a un plus grand nombre d’ennemis, parce qu’il lui est plus difficile d’éviter la colère de Dieu. Car plus grande est la dignité de celui qui, est chargé du saint ministère et plus grands sont ses dangers. Il suffit souvent d’une seule grande œuvre apostolique pour l’élever au ciel, comme aussi d’une seule faute pour le précipiter dans l’enfer. En effet, pour passer sous silence ce qui survient tous les jours, si par amitié ou par quelqu’autre motif, il lui arrive d’élever un indigne à l’épiscopat et de lui confier le gouvernement des âmes dans une grande ville, voyez comme il s’expose aux flammes de l’enfer. Il ne sera pas puni seulement pour toutes les âmes qui périssent, parce que celui qu’il a ordonné manque de piété, mais, encore pour toutes les actions de l’évêque indigne. Celui qui dans l’ordre laïque n’était pas religieux, le sera encore, bien moins, lorsqu’un tel homme aura le gouvernement des âmes ; pour celui qui était pieux auparavant, il lui sera difficile de rester tel sous un indigne pasteur. Car la vaine gloire, l’amour des richesses, l’arrogance ont plus de puissance lorsqu’ils s’autorisent des vices de l’évêque, et de même pour les offenses, les outrages, les insultes et mille autres péchés. Si donc quelqu’un n’est pas