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vie qui n’est point pure produit des divisions. « Quiconque fait le mal, hait la lumière ». (Jn. 3,20) Il y a en effet aussi une amitié entre les méchants ; les brigands aiment les brigands, les meurtriers aiment les meurtriers ; celle-là ne part point d’une bonne conscience, mais d’une mauvaise ; non d’un cœur pur, mais d’un cœur impur ; elle ne part point d’une foi sincère. La foi enseigne le vrai ; une foi véritable fait naître la charité ; car celui qui croit véritablement en Dieu ne peut perdre la charité.
« Quelques-uns », continue le texte, s’en sont a écartés pour s’égarer en de vains discours ». Oui, ils se sont égarés, car il faut être habile pour choisir la direction vraie et ne pas se détourner du but, en sorte qu’on se laisse diriger par l’Esprit ; beaucoup d’impulsions nous écartent du véritable but, et il faut avoir toujours en vue le terme unique. « Voulant », continue l’apôtre, « être docteurs de la loi ». Vous voyez ici une autre cause de ce désordre, l’amour de la domination. C’est pourquoi le Christ a dit : « Vous ne vous ferez point appeler rabbi ». (Mt. 23,8) Et l’apôtre à son tour : « Ils n’observent point eux-mêmes la loi, mais veulent se glorifier dans votre chair ». (Gal. 6,13) Ils désirent être honorés, et à cause de cela ne considèrent point la vérité. « Ne comprenant ni ce qu’ils disent, ni l’objet de leurs affirmations ». L’apôtre les accuse ici de ne point connaître le but de la loi, et de ne point savoir jusqu’à quel temps elle devait régner. Mais, me dira-t-on, si leur conduite vient d’ignorance, comment dites-vous qu’ils pèchent ? C’est que leur faute vient non seulement de ce qu’ils veulent être docteurs de la loi, mais encore de ce qu’ils ne conservent pas la charité, et que de là résulte l’ignorance. En effet, quand l’âme se donne aux objets charnels, sa vue se paralyse ; jetée hors de la charité, elle tombe dans une jalousie querelleuse, et désormais l’œil de son intelligence est éteint. Celui qui se laisse posséder par le désir des choses temporelles, s’enivre de sa passion et ne saurait être le juge intègre de la vérité. – « Ils ne connaissent point ce qu’ils affirment ». Sans doute ils débitaient de vaines paroles au sujet de la loi, et s’étendaient en longs discours sur les cérémonies purificatoires et les autres observances matérielles.
Sans s’arrêter à démontrer que ces observances n’étaient que les ombres des préceptes spirituels et de simples figures, l’apôtre aborde un sujet plus digne d’attrait. Et quel est-il ? C’est l’éloge de la loi, par laquelle il entend ici le décalogue, dont il a séparé les observances légales. Car si les violateurs de celles-ci, qui sont inutiles aux chrétiens, ont encouru des châtiments, combien plus ceux du décalogue. « Nous savons », dit-il, « que la loi est bonne, si l’on en fait un usage légitime en sachant qu’elle n’est pas faite pour le juste (8, 9) ». La loi, dit-il, est bonne, et elle n’est pas bonne. Quoi ! si l’on en fait un usage illégitime, la loi cesse-t-elle d’être bonne ? Non, elle l’est toujours ; mais voici ce – que veut dire l’apôtre : Il la déclare bonne lorsqu’on l’accomplit par les œuvres. Tel est ici le sens de ces mots : « Si l’on en fait un usage légitime ». Mais l’interpréter en paroles et la violer dans sa conduite, c’est là en faire un usage illégitime ; ils en usent, mais non pour leur avantage. Il y a encore quelque chose à ajouter, c’est que si vous faites de la loi un usage légitime, elle vous conduit à Jésus-Christ. Le but de la loi en effet étant de justifier l’homme, et la loi ne le pouvant faire par elle-même, elle conduit à celui qui en a la puissance. Et l’on fait de la loi un usage légitime, lorsqu’on l’observe par surcroît. Et comment cela ? De même qu’un cheval obéit au frein de la façon la plus convenable, s’il ne se cabre ni ne mord, mais s’il ne le porte que pour la forme ; de même l’homme qui fait de la loi un usage légitime est celui qui ne doit pas sa conduite sage à la lettre de la loi. Et quel est-il ? C’est celui qui sait qu’il n’a pas besoin d’elle. Car celui qui s’efforce d’arriver à une si haute vertu, que la rectitude de sa conduite soit due, non à la crainte que la loi inspire, mais à la vertu même, celui-là fait de la loi un usage légitime et sûr ; agir sans craindre la loi, mais en ayant devant les yeux le jugement de Dieu et le châtiment, c’est faire un bon usage de la loi. L’apôtre appelle ici « juste » celui qui pratique la vertu. Celui-là fait un excellent usage de la loi, qui veut être formé par un autre que par elle.
2. De même en effet que l’on met la ponctuation dans les écritures à l’usage des enfants, mais que celui qui la supplée dans les écritures où elle n’est pas mise est en possession d’une science plus haute et sait mieux faire usage des lettres ; de même celui qui est