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Mais ce n’est pas là l’unique raison qui les fait asseoir sous nos portiques ; il sont là aussi pour vous faire pratiquer l’aumône, pour vous attendrir, pour vous apprendre à admirer la bonté de Dieu. Si Dieu n’a pas honte de ces infortunés, s’il les a introduits sous ces portiques, faites de même à bien plus forte raison, vous ; ils sont là pour vous apprendre à ne pas vous glorifier des royautés de la terre. Ne rougissez donc pas quand, un pauvre vous appelle ; s’il s’approche de vous, s’il vous prend les genoux, ne le repoussez pas. Les pauvres sont en quelque sorte d’admirables, chiens des palais du Roi et je ne leur adresse pas un outrage en les appelant des chiens, au contraire, je prétends par là faire d’eux un, noble éloge ils gardent, le palais du Roi ; donc nourrissez-les. L’honneur remonte jusqu’au Roi. Dans les palais tout est faste insolent, j’entends les palais de la terre ; dans les palais du vrai Roi. tout est humilité. Les choses humaines ne sont rien ; les vestibules, des églises suffisent pour vous l’apprendre. La richesse n’a aucun charme, pour, Dieu ; ceux que vous voyez assis là, suffisent pour vous l’apprendre. Cette assemblée qui séjourne là, c’est comme un avertissement, à la nature humaine, c’est une voix sonore et retentissante qui dit : Les choses humaines ne sont rien qu’ombre et fumée. Si les richesses étaient de vrais biens, Dieu n’aurait pas établi, des pauvres à ses propres portes ; s’il reçoit même des riches ; ne soyez pas étonnés ; ce n’est pas à cause de leurs richesses, qu’il les reçoit, ce n’est pas pour qu,'ils se conservent riches, mais, pour qu’ils déposent leur vanité. Écoutez ce que, leur dit, le Christ : « Vous ne pouvez, pas servir Dieu et Mamon[1] » ; et encore : « Il sera difficile aux riches, d’entrer dans le royaume des cieux, » ; et encore : « Il est plus facile pour un câble d’entrer dans le trou d’une aiguille, que pour un riche dans le royaume des cieux ». (Mt. 6,24 ; 19,23-24) S’il reçoit les riches, c’est pour qu’ils entendent ces paroles, pour leur apprendre à désirer les éternelles richesses, à soupirer après les biens du ciel. Étonnez-vous, qu’il ne dédaigne pas de les voir assis sous ces portiques, quand il ne dédaigne pas de les convier à sa table spirituelle, de les admettre ; au divin banquet ; mais le boiteux, le mutilé, le vieillard en haillons, souillé, couvert d’ulcères, côte à côte avec le jeune homme élégant, le superbe décoré de la pourpre, et celui qui porte en tête le diadème, vient à la table prendre sa part, et il est admis au festin spirituel ; et, les uns comme les autres, jouissent des mêmes biens sans différence, sans distinction.

5. Eh quoi ! le Christ ne dédaigne pas, de les appeler à sa table, en même temps que l’empereur ; ils sont, tous conviés en même temps Et toi peut-être, tu t’avises de faire le dédaigneux, tu ne veux pas qu’on te voie donnant aux pauvres, ou même leur adressant la parole. Ah ! quelle arrogance ! quel orgueil ! Prenez garde qu’il ne vous ; arrive la même chose qu’au riche d’autrefois. Il faisait le dédaigneux, ce riche ; il ne voulait pas voir Lazare, il ne daignait même pas lui donner un abri sous son toit ; ce pauvre était dehors, gisant sous le vestibule, et on ne daignait pas lui adresser une parole. Mais voyez, aussi comme au jour où le riche eut besoin de ce pauvre, il n’obtint pas son secours. Si nous rougissons de ceux dont le Christ n’a pas rougi ; le Christ rougit de nous, qui rougissons de ses amis, emplissez votre table de boiteux, de manchots, et de mutilés ; ce sont eux qui font venir le Christ, ce ne sont pas les riches. Peut-être que mon discours vous fait rire, eh bien ! ce n’est pas moi qui parle ; écoutez le Christ lui-même et ne riez pas, mais frémissez : « Lorsque vous donnerez à dîner ou à souper, n’y conviez, ni vos amis, ni vos frères, ni vos parents, ni vos voisins riches, de peur qu’ils ne vous invitent ensuite à leur tour, et qu’ainsi ils ne vous rendent ce qu’ils avaient reçu de vos dons ; mais, lorsque vous faites un festin, conviez-y les mendiants, les pauvres, les aveugles, et vous serrez bienheureux, parce qu’ils n’auront pas de quoi vous rendre, car cela vous sera rendu, dans la résurrection, des justes ». (Lc. 12,14)

Ajoutez, encore à cela une, gloire plus éclatante, si vous l’aimez cette gloire. Dans les festins du monde règnent l’envie, les jalousies, les accusations, les médisances, et la crainte excessive de manquer aux convenances ; et vous êtes là comme l’esclave du maître, et ; si l’on a invité des convives plus considérables que vous, vous redoutez leurs propos méchants ; dans les banquets du Seigneur rien de pareil, quels que soient les mets que vous offriez aux pauvres, ils les reçoivent volontiers, et de là, pour vous, de

  1. Mammon, dieu des richesses chez les Syriens,