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avait-il, chez eux, des recherches au sujet de la résurrection, des agents nombreux de troubles, non plus des persécutions, des dangers pour les personnes, mais de prétendus docteurs. De là ces mots : « Ce qui peut manquer encore à votre foi » ; de là le tour que prend l’expression ; l’apôtre ne dit pas : Afin de confirmer, mais « afin d’ajouter ». En effet, quand il avait craint pour la foi même : « Je vous ai », écrivait-il, « envoyé Timothée pour vous affermir » ; mais ici il n’est question que d’ajouter à ce qui peut manquer, ce qui est plutôt une œuvre d’enseignement qu’un effort pour raffermir ; c’est de même que Paul écrit ailleurs : « Pour que vous soyez parfaits pour toute bonne œuvre ». (1Co. 1,10) Or, ce qui est humainement parfait, c’est ce à quoi il ne manque que très peu de chose ; c’est là ce qui devient parfait.

« Que Dieu lui-même notre Père, et Notre-Seigneur Jésus-Christ nous conduisent vers vous. Que le Seigneur vous fasse croître de plus en plus dans la charité que vous avez les uns pour les autres, et envers tous, et qu’il la rende telle que la nôtre est envers vous (11, 12) ». C’est la marque de la plus tendre affection, non seulement de ressentir dans son cœur un tel désir, mais encore d’exprimer ce vœu dans sa lettre ; voilà la marque d’une âme brûlante et qui ne peut plus du tout se contenir ; il faut remarquer aussi l’usage qui se fait ici de la prière, et en même temps une justification d’une absence qui n’était ni volontaire, ni le fait de l’indifférence. C’est comme s’il disait : Que Dieu lui-même supprime les épreuves qui nous entraînent de tous les côtés, de telle sorte qu’il nous soit donné d’aller vers vous par le plus court chemin. « Que le Seigneur vous fasse croître de plus en plus ». Voyez-vous le transport d’un amour qui ne se possède plus, qui éclate dans les paroles ? « Fasse croître et surabonder », dit-il, « de plus en plus » ; expressions plus fortes que, augmente. On pourrait dire que l’apôtre désire obtenir d’eux l’excès de leur amour. Qu’il rende votre charité, dit-il, « telle que la nôtre est envers vous ». C’est-à-dire, l’amour, nous l’éprouvons déjà, nous voulons que vous le ressentiez aussi. Voyez-vous quelle extension de charité l’apôtre réclame ? La charité entre fidèles ne lui suffit pas : il la veut envers tous et partout. C’est là, en réalité, le propre de l’amour selon Dieu, il embrasse tous les hommes ; aimer tel ou tel et non tel autre, ce n’est que de l’amitié à la manière des hommes. Notre amour, à nous, n’est pas de ce caractère. « Telle que notre charité est envers vous. Qu’il affermisse vos cœurs en vous rendant irréprochables, par la sainteté, devant Dieu notre Père, en la présence de Notre-Seigneur Jésus-Christ, venant avec tous ses saints (13) ». Il leur montre que c’est à eux que l’amour est utile, non à ceux qui sont aimés. Je veux, dit-il, que cette charité croisse, afin qu’il n’y ait aucun reproche parmi vous. L’apôtre ne dit pas : Qu’il vous affermisse, mais « Qu’il affermisse vos cœurs. Car c’est du cœur que partent les mauvaises pensées ». (Mat. 15,19) Il peut se faire, sans qu’on opère aucune action, que l’on soit un pervers : ainsi, l’homme qui est envieux, qui ne croit à rien, le perfide, le méchant qui se réjouit du mal d’autrui, qui ne connaît pas l’affection, dont toutes les pensées sont mauvaises, tout cela vient du cœur ; la sainteté consiste à s’en purifier. À proprement parler, la sainteté c’est la chasteté parfaite, puisque l’impureté est surtout la fornication et l’adultère ; maintenant, en général, tout péché est impureté, toute vertu au contraire est pureté. En effet, « Bienheureux », dit le Seigneur, « ceux qui ont le cœur pur ? » (Mat. 5,8) Les cœurs purs, dont parle ici le Seigneur, sont ceux qui le sont tout à fait.

4. Je sais bien, en effet, que les autres vices ne souillent pas moins l’âme. Voulez-vous une preuve que la malice en ternit l’éclat ? Écoutez le Prophète : « Purifie ton cœur de la malice, Jérusalem » (Jer. 4,14) ; et encore : « Lavez-vous, purifiez-vous, enlevez la malice de vos âmes ». (Isa. 1,16) Il ne dit pas : La fornication ; donc ce n’est pas la fornication seulement, mais les autres vices aussi qui souillent l’âme. « Qu’il affermisse », dit-il, « vos cœurs, en vous rendant irréprochables, par la sainteté, devant Dieu, notre Père, en la présence de Notre-Seigneur Jésus-Christ, venant avec tous ses saints ». Le Christ sera donc alors notre juge, mais ce n’est pas seulement en sa présence, mais aussi en présence du Père que nous serons jugés. Ou bien encore, l’apôtre dit que nous devons être tout à fait irréprochables devant Dieu : c’est ce que je répète sans cesse, nous devons l’être en présence de Dieu (car c’est en cela que consiste la vertu sincère) et non seulement, en