Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ou le chaud les incommode, ils méditent leur retraite ; d’abord ils semblent se rassembler de concert pour entraîner leurs petits et leur communiquer ce même désir de changer de climat, que ceux-ci ne peuvent encore avoir acquis par aucune notion, aucune connaissance, aucune expérience précédente. Les pères et mères rassemblent leur famille pour la guider pendant la traversée, et toutes les familles se réunissent, non seulement parce que tous les chefs sont animés du même désir, mais parce qu’en augmentant les troupes ils se trouvent en force pour résister à leurs ennemis.

Et ce désir de changer de climat, qui communément se renouvelle deux fois par an, c’est-à-dire en automne et au printemps, est une espèce de besoin si pressant, qu’il se manifeste dans les oiseaux captifs par les inquiétudes les plus vives. Nous donnerons à l’article de la caille un détail d’observations à ce sujet, par lesquelles on verra que ce désir est l’une des affections les plus fortes de l’instinct de l’oiseau ; qu’il n’y a rien qu’il ne tente dans ces deux temps de l’année pour se mettre en liberté, et que souvent il se donne la mort par les efforts qu’il fait pour sortir de sa captivité ; au lieu que dans tous les autres temps il paraît la supporter tranquillement, et même chérir sa prison, s’il s’y trouve renfermé avec sa femelle dans la saison des amours : lorsque celle de la migration approche, on voit les oiseaux libres, non seulement se rassembler en famille, se réunir en troupes, mais encore s’exercer à faire de longs vols, de grandes tournées avant que d’entreprendre leur plus grand voyage. Au reste, les circonstances de ces migrations varient dans les différentes espèces ; tous les oiseaux voyageurs ne se réunissent pas en troupes, il y en a qui partent seuls, d’autres avec leurs femelles et leur famille, d’autres qui marchent par petits détachements, etc. Mais, avant d’entrer dans le détail que ce sujet exige[1], continuons nos recherches sur les causes qui constituent l’instinct et modifient la nature des oiseaux.

L’homme, supérieur à tous les êtres organisés, a le sens du toucher, et peut-être celui du goût, plus parfait qu’aucun des animaux, mais il est inférieur à la plupart d’entre eux par les trois autres sens ; et, en ne comparant que les animaux entre eux, il paraît que la plupart des quadrupèdes ont l’odorat plus vif, plus étendu que ne l’ont les oiseaux ; car, quoi qu’on dise de l’odorat du corbeau, du vautour, etc., il est fort inférieur à celui du chien, du renard, etc. : on peut d’abord en juger par la conformation même de l’organe ; il y a un grand nombre d’oiseaux qui n’ont point de narines, c’est-à-dire point de conduits ouverts au-dessus du bec ; en sorte

    cinq pieds, il ne peut disparaître qu’à la distance de dix-sept mille cent quatre-vingts pieds ou deux mille huit cent soixante-trois toises, ce qui fait une hauteur bien plus grande que celle des nuages, surtout de ceux qui produisent les orages.

  1. Nous donnerons dans un autre discours les faits qui ont rapport à la migration des oiseaux.