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lapin[1], et à laquelle il a donné ce surnom de lapin parce qu’il l’a trouvée dans un trou fait dans la terre ; que cette espèce, dis-je, n’est qu’une variété de notre grande chevèche ou chouette des rochers d’Europe[NdÉ 1], car elle est de la même grandeur et n’en diffère que par la distribution des couleurs, ce qui n’est pas suffisant pour en faire une espèce distincte et séparée. Si cet oiseau creusait lui-même son trou, comme le P. Feuillée paraît le croire, ce serait une raison pour le juger d’une autre espèce que notre chevèche[2] et même que toutes nos autres chouettes ; mais il ne s’ensuit pas de ce qu’il a trouvé cet oiseau au fond d’un terrier, que ce soit l’oiseau qui l’ait creusé, et ce qu’on en peut seulement induire, c’est qu’il est du même naturel que nos chevèches d’Europe, qui préfèrent constamment les trous soit dans les pierres, soit dans les terres, à ceux qu’elles pourraient trouver dans les arbres creux[NdÉ 2].


LA CHEVÈCHE OU PETITE CHOUETTE[3]

La chevèche[NdÉ 3] et le scops ou petit duc sont à peu près de la même grandeur : ce sont les plus petits oiseaux du genre des hiboux et des chouettes ;

  1. Espèce de chevèche-lapin ou ulula cunicularia. Feuillée, Journal des observations physiques, p. 562. — La chouette de Coquimbo. Brisson, Ornithol., t. Ier, p. 525, où l’on peut en voir la description aussi bien que dans l’ouvrage du P. Feuillée.
  2. Le P. du Tertre, en parlant de l’oiseau nocturne appelé diable dans nos îles de l’Amérique, dit qu’il est gros comme un canard, qu’il a la vue affreuse, le plumage mêlé de blanc et de noir, qu’il repaire sur les plus hautes montagnes, qu’il territ comme le lapin dans les trous qu’il fait dans la terre, où il pond ses œufs, les y couve et élève ses petits…, qu’il ne descend jamais de la montagne que de nuit, et qu’en volant il fait un cri fort lugubre et effroyable. Hist. des Antilles, t. II, page 257. — Cet oiseau est certainement le même que celui du P. Feuillée, et quelques-uns des habitants de nos îles se trouveront peut-être à portée de vérifier s’il creuse en effet un terrier pour se loger et y élever ses petits. Tout le reste des indications que nous donnent ces deux auteurs, s’accorde à ce que cet oiseau soit de la même espèce que notre chevèche ou chouette des rochers.
  3. M. Edwards, M. Frisch et l’auteur de la Zoologie britannique ont chacun donné une planche coloriée de cet oiseau : la meilleure et la plus ressemblante à la nature est celle de M. Edwards ; elle représente la femelle de cette espèce. La planche de la Zoologie britannique et celle de M. Frisch représentent le mâle ; mais ce dernier auteur a fait une faute en donnant des yeux d’un bleu noirâtre à cet oiseau, car il les a d’un jaune pâle.
  1. Vieillard en a fait une espèce distincte sous le nom de Strix cunicularia qui doit se changer en Surnia cunicularia [Note de Wikisource : actuellement Athene cunicularia Molina, vulgairement chevèche des terriers].
  2. La grande chevèche est un oiseau utile ; elle se nourrit surtout de souris et autres petits mammifères destructeurs, d’insectes, et, dans une moindre proportion, de petits oiseaux. En Italie on la met, d’après Lévy, dans les jardins où elle détruit les limaces, les chenilles, les rongeurs. D’après Lévy, une chevèche peut détruire jusqu’à 1 460 rongeurs par an. Elle était autrefois employée pour la chasse à la pipée ; elle sert, paraît-il, encore à cet usage dans certaines parties de l’Italie, au moment du passage des alouettes.
  3. Surnia passerina Gmel. [Note de Wikisource : actuellement Athene noctua Scopoli, vulgairement chevêche d’Athéna ; il faut prendre garde que cette chouette a souvent partagé son ancien nom spécifique passerinus avec une espèce de chouette encore plus petite, actuellement dénommée Glaucidium passerinum Linnæus ou chevêchette d’Europe].