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Citons encore, dans la catégorie des roches vitrifiables sédimentaires, les gneiss, dont la majorité ne sont que des granits dissous par l’eau, puis déposés en couches souvent stratifiées.

Origine des éléments des roches sédimentaires siliceuses. D’où proviennent les éléments de toutes ces roches ? Avec Buffon, tous les géologues modernes sont d’accord pour en chercher la source dans les matériaux qui ont constitué la surface primitive du globe, matériaux d’abord incandescents, puis refroidis par le rayonnement de la terre dans l’espace, ou bien fondus dans les foyers souterrains et projetés à la surface par une poussée de dedans en dehors. Exposés à l’action incessante de l’eau, ils ont été dissociés, dissous, charriés par l’eau, puis déposés dans le fond des fleuves, des lacs ou des mers où ils se sont agrégés en masses solides. Leur histoire n’a pas toujours été terminée par ce premier dépôt. Un très grand nombre de ces roches ont dû être amenées à la surface de la terre par le soulèvement des lits des mers, reprises par l’eau des pluies et des torrents, redissociées, redissoutes, agitées et transportées, puis de nouveau déposées par l’eau. Il n’est donc pas étonnant qu’un grand nombre de ces roches ne contiennent plus que de rares débris d’animaux. Mais leur formation n’exige aucun autre phénomène que ceux auxquels nous assistons tous les jours.

Il me paraît important, dans cette étude, de faire remarquer que la théorie générale de la formation de ces roches a été formulée avec la plus grande netteté, il y a plus de cent ans, par Buffon. « Je conçois, dit-il[1], que la terre, dans le premier état, était un globe, ou plutôt un sphéroïde de matière vitrifiée, de verre, si l’on veut, très compacte, couvert d’une croûte légère et friable, formée par les scories de la matière en fusion, d’une véritable pierre ponce : le mouvement et l’agitation des eaux et de l’air brisèrent bientôt et réduisirent en poussière cette croûte de verre spongieuse, cette pierre ponce qui était à la surface ; de là les sables qui, en s’unissant, produisent ensuite les grès et le roc vif, ou, ce qui est la même chose, les cailloux en grande masse, qui doivent, aussi bien que les cailloux en petite masse, leur dureté, leur couleur ou leur transparence et la variété de leurs accidents, aux différents degrés de pureté et à la finesse du grain des sables qui sont entrés dans leur composition.

» Ces mêmes sables, dont les parties constituantes s’unissent par le moyen du feu, s’assimilent et deviennent un corps dur très dense, et d’autant plus transparent que le sable est plus homogène ; exposés au contraire longtemps à l’air, se décomposant par la désunion et l’exfoliation de petites lames dont ils sont formés, ils commencent à devenir terre, et c’est ainsi qu’ils ont pu former les glaises et les argiles. Cette poussière, tantôt d’un jaune brillant, tantôt semblable à des paillettes d’argent dont on se sert pour sécher l’écriture, n’est autre chose qu’un sable très pur, en quelque façon pourri, pres-

  1. Sur la production des couches ou lits de terre, t. Ier, p. 116.