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COMMENTAIRE HISTORIQUE

silence le voyage de Galland à Croixval et a reporté dix pages plus loin cette émouvante entrevue, comme ayant eu lieu à St-Cosme, la veille même de la mort du poète.

Il est vraisemblable que le récit de Binet (les troix textes) et celui de Du Perron (la deuxième rédaction) se complètent : que, d’une part, Galland a bien rejoint Ronsard à Montoire le 30 octobre et passé une partie de novembre avec lui à Croixval ; que, d’autre part, il revint le voir à St-Cosme à la fin de décembre, la veille de sa mort, assez à temps pour recevoir au milieu des larmes son dernier adieu. Mais le vraisemblable n’est pas toujours le vrai. (V. ci-après p. 191, au mot « regrettée »).

P. 33, l. 16. — S. Cosme. Sur ce prieuré, situé au bord de la Loire, tout près du château de Plessis-lez-Tours, voir Blanchemain, éd. des Œuvres de Ronsard, VII, 341 et suiv. ; abbé Chevalier, Rapport sur la recherche des restes de Ronsard au prieuré de Saint-Cosme, dans le Bulletin de la Société archéol. du Vendômois, t. IX, 1870, p. 170 ; Louis Chollet, article du Mois littéraire et pittoresque de novembre 1902 ; André Hallays, Journal des Débats du 10 octobre 1902, art. reproduit avec illustrations dans les Annales Fléch. d’avril 1903.

P. 33, l. 21. — âgé de lxxv ans. Cet aumônier, du nom de Jacques Desguez, faisait valoir le bénéfice de St-Cosme en l’absence de Ronsard. Il était son « procureur spécial » (Arch. dép. d’Indre-et-Loire, G. 497 ; Froger, Ronsard eccl., p. 33). Outre l’aumônier, il y avait à St-Cosme un sous-prieur, un sacristain, un hostellier et deux religieux profès, dont nous connaissons les noms par un acte du 25 novembre 1575 (Arch. d’Indre-et-Loire, G. 507 ; Froger, op. cit., p. 45), et par un autre du 21 novembre 1581, que j’ai publié dans les Annales Fléch. de février 1904, p. 74.

Le nom de Desguez figure encore parmi les témoins de la résignation faite par Ronsard de trois de ses bénéfices le 22 décembre 1585 (Froger, op. cit., pp. 69 et 70).

P. 33, l. 41. — foiblesses grandes. Ce dernier voyage de Croixval à Saint-Cosme, sur lequel Binet ne donne aucun détail en A B et se contente de ces trois lignes en C, a été longuement raconté par Du Perron en février 1586 : « ... il se fit vestir et habiller tout perclus et estropié comme il estoit : et se fit porter dans son coche, comme un tronc et comme une statue, sans se mouvoir, sans se remuer, et sans avoir plus aucun acte de vie que le sentiment de sa douleur. Or estoit le temps si mauvais qu’il n’y avoit aucun ordre de se mettre par les champs quand c’eust esté l’homme du monde qui se seroit le mieux porté : tellement qu’il luy fallut differer son voyage jusques à une autre fois, et attendre que le mauvais temps fust passé. Ce fut là la catastrophe de la Tragedie : car il ne voulut jamais permettre qu’on le despouillast, pour l’apprehension qu’il avoit du mal qu’il luy faudroit souffrir quand ce viendroit à remettre ses habillements : de sorte qu’il fallut qu’il demeurast par l’espace de trois jours et de trois nuits ainsi vestu et habillé. Au quatriesme ne pouvant plus avoir la patience d’attendre d’avantage, il commanda que l’on luy attelast son coche des deux heures devant le jour : et s’estant mis aux champs par le vent et par la pluye, fit tant de ceste premiere traitte, qu’il alla coucher à une