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ALCMÉON.

Achéloüs. Il s’y rendit après plusieurs courses vagabondes : il y reçut de nouveau les cérémonies de l’expiation ; il s’y maria avec Callirhoé, fille d’Achéloüs, et il s’établit dans un coin de terre que cette rivière avait formé (A) en accumulant des sables. Callirhoé lui déclara qu’elle ne coucherait point avec lui, s’il ne lui faisait présent du collier et de la robe d’Ériphyle. Cela le contraignit de retourner chez Phégéus, dont il obtint le collier après lui avoir fait accroire qu’il avait appris de l’oracle que la persécution des furies ne cesserait que lorsqu’il aurait offert ce collier à Apollon. Phégée sut ensuite qu’Alcméon avait destiné ce présent à Callirhoë ; c’est pourquoi il donna ordre à ses deux fils de le poursuivre et de le tuer ; ce qu’ils firent : et parce que Arsinoë s’en formalisa, ils la transportèrent à Tégée, dans un coffre, et lui imputèrent ce meurtre. Quelques-uns disent qu’Alcméon, pendant sa fureur, se divertit avec la prophétesse Manto, fille de Tirésias, et qu’il en eut deux enfans[a]. Voyez la suite de tout ceci dans l’article de Callirhoé. Les furies d’Alcméon ont fait un grand bruit sur le théâtre de l’ancienne Grèce[b] ; mais il ne nous reste aucune de ces tragédies (B). Ce qu’on a dit de son tombeau mérite d’être considéré (C). Les Oropiens, qui devancèrent tous les autres peuples à mettre Amphiaraüs au rang des Dieux, exclurent Alcméon des honneurs divins qu’ils conférèrent à son père et à son frère : ils l’en exclurent, dis-je, à cause de son parricide[c]. On remarque qu’un Perse nommé Oronte, lui ressemblait parfaitement[d].

Il y a des historiens qui disent qu’Alcméon, après la seconde guerre de Thèbes, s’en alla en Étolie, attiré par Diomède, qu’il l’aida à conquérir ce pays et l’Acarnanie, et qu’ayant été sommés de se trouver à l’expédition de Troie, Diomède s’y rendit ; mais qu’Alcméon s’arrêta dans l’Acarnanie, et, pour faire honneur à son frère[e], qu’il bâtit une ville qu’il nomma Argos d’Amphilochus[f]. Notez qu’il prophétisa dans l’Acarnanie[g].

  1. Tiré de la Bibliothéque d’Apollodore, liv. III, pag. 187 et suivantes. Voyez aussi Diodore de Sicile, liv. V, chap. VI.
  2. Alcmæon olìm tragicorum pulpita lassavit cum furore suo, nunc nullam sui nominis fabulam habet, Barthius in Statium, tom II, pag. 449.
  3. Pausan., lib. I, pag. 33.
  4. Plutarch. in Arato, pag. 1028.
  5. Il s’appelait Amphilochus : voyez les remarques de son article.
  6. Strabo, lib. VII, pag. 225. Voyez aussi lib. X, pag. 318.
  7. Clem. Alexandr. Stromat., lib. I, p. 334.

(A) Il s’établit dans un coin de terre que la rivière d’Achéloüs avait formé. ] Il ne sera pas mal d’éclaircir Apollodore par un passage de Pausanias, qui porte qu’Alcméon, après avoir tué sa mère, s’enfuit d’Argos à Psophis, où il épousa Alphésibée, fille de Phégéus[1]. Le mariage ne le guérit pas de sa fureur ; ainsi il recourut à l’oracle, qui lui ordonna de se retirer sur une terre toute neuve, et faite depuis le meurtre d’Ériphyle. On l’assura que les furies ne l’y poursuivraient point. Ayant donc rencontré aux embouchures de la rivière d’Achéloüs une terre que les flots avaient charriée, il y prit poste, et se maria avec Callirhoé.

(B) Il ne nous reste aucune des tragédies faites sur son sujet. ] Je ne doute point que les deux vers que Plutarque

  1. Pausan., lib. VIII, pag. 255.