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AGÉSIPOLIS.

nérale, que les Lacédémoniens procurèrent à la Grèce[a] par les négociations d’Antalcidas, leur ambassadeur à la cour de Perse, l’an 2 de la 98e. olympiade, fut bientôt suivie de la guerre particulière qu’ils déclarèrent aux habitans de Mantinée. Agésilaüs, ayant prié qu’on le dispensât du commandement des troupes, ce fut Agésipolis qui marcha contre l’ennemi. Il ravagea le territoire de Mantinée, et il subjugua enfin cette ville. L’expédient dont il se servit est trop curieux pour n’être pas rapporté (B). Il y a quelque apparence que ce fut dans cette guerre que Pélopidas et Épaminondas furent dégagés du péril (C) à quoi leur courage et leur amitié les exposèrent. Il fut envoyé quelques années après (D), avec une bonne armée, contre les Olynthiens[b]. Amyntas, roi de Macédoine, et Derdas, prince d’Élimée[c], le secondèrent vigoureusement. Il s’approcha d’Olynthe ; et, ne voyant point paraître l’armée ennemie qu’il voulait combattre, il ravagea le pays et se rendit maître de la ville de Torone. Mais, comme les grandes chaleurs de l’été ne l’empêchaient point de fatiguer extrêmement, il fut attaqué d’une fièvre continue qui l’emporta dans sept jours[d], l’an 14 de son règne [e]. Voyez ce que je critique à M. Moréri (E). Agésilaüs ne fut point aise de cette perte, comme on l’aurait cru (F) : il en pleura, et en eut un long regret, à ce que dit Xénophon[f]. Notez qu’Agésipolis ne laissa point de postérité[g], et que Cléombrotus, son frère et son successeur, fut père d’Agésipolis II[h], qui ne régna qu’un an[i], et de qui les apophthegmes ont été plus mémorables que les actions. Personne ne parle de celles-ci, et l’on trouve dans Plutarque[j] un petit recueil de ceux-là.

  1. Diodor. Sicul., lib. XIV, cap. CXI, pag. 650.
  2. Xenoph. de Reb. Græc., lib. V, pag. 329.
  3. Xenophon de Reb. Græc., lib. V. pag. 327, dit Ἐλεμίας ἄρχοντα ; mais apparemment c’est une faute de copiste, pour Ἐλιμείας.
  4. Id. ibid., pag. 329.
  5. Diodor. Sicul., lib. XIV, cap. CXI, pag. 650, et lib. XV, cap. XXIII, pag. 674, ad annum 1 Olymp. 100
  6. Voyez la remarque (F).
  7. Pausan., lib. II, pag. 86.
  8. Pausan., lib. II, pag. 86.
  9. Diod., lib. XV, cap. LX.
  10. Plut in Apophth. Lacon., pag. 215.

(A) Si le sentiment d’Apollon serait conforme à celui de Jupiter. ] Recueillons de ceci une vérité qui est d’ailleurs assez manifeste ; c’est que la religion des païens était fondée sur des idées de Dieu aussi fausses que l’athéisme. Je ne parle point des sentimens du commun peuple ; je ne parle point de l’abus de quelques particuliers, je parle du culte public pratiqué par les personnes les plus éminentes, et soutenu par la majesté de l’état. Voici un roi de Lacédémone qui, après les sacrifices que l’on offrait solennellement, et comme des préliminaires d’une expédition[1], et après même la réponse favorable du plus grand des dieux, va consulter une autre divinité, incertain si elle réfutera ou si elle confirmera cette réponse. Il croyait donc que les décisions de Jupiter n’étaient pas telles que l’on pût toujours les suivre en sûreté de conscience, et il supposait que les lumières d’Apollon n’étaient pas toujours conformes à celles de Jupiter. N’était-ce pas croire que tous les dieux, sans

  1. Ἔπει... τὰ διαϐατήρια θυομένῳ ἐγένετο, ἐλτὼν εἰς τὴς Ὀλυμπίας χρηςηριαζόμενος. Quùm pro felici transitu sacrificâsset, Olympiam oraculum consulturus proficiscitur. Xenoph. de Gestis Græc., lib. IV, p. 312.