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ABRAHAM.

illorum lectio et retentio Judæis interdicta est, nec ens apud se retinere audent, publicè saltem et palàm, propter metum christianorum[1].

  1. Idem, ibidem, pag. 878.

ABRAHAM[* 1], le père et la souche des croyans, était fils de Tharé. Il descendait de Noé par Sem, dont il était éloigné de neuf degrés. L’opinion, qui le fait naître l’an 130 de Tharé[a], me paraît plus vraisemblable que celle qui le fait naître l’an 70 du même Tharé. Il y a beaucoup d’apparence qu’il naquit dans la même ville d’où l’Écriture Sainte nous apprend que son père se retira pour aller au pays de Canaan [b]. C’était une ville de Chaldée qui s’appelait Ur. Abraham en sortit avec son père et s’arrêta avec lui à Charan jusqu’à ce que son père y fût mort. Après cela il reprit son premier dessein, qui avait été le voyage de la Palestine. On peut voir dans l’Écriture les diverses stations qu’il fit dans la terre de Canaan ; son voyage d’Égypte, où on lui enleva sa femme, qui était aussi sa sœur de père[c] ; son autre voyage en Guérar, où elle lui fut pareillement enlevée et puis rendue tout comme la première fois ; la victoire qu’il remporta sur quatre princes qui avaient pillé Sodome ; sa complaisance pour sa femme, qui voulut qu’il se servit d’Agar leur servante afin d’avoir des enfans[d] ; l’alliance que Dieu traita avec lui, scellée du signe de la circoncision ; son obéissance à l’ordre qu’il avait reçu de Dieu d’immoler son fils unique ; la manière dont cet acte fut empêché ; son mariage avec Kétura ; sa mort à l’âge de cent soixante-quinze ans, et sa sépulture auprès de Sara, sa première femme, dans la caverne de Macpela. Il serait inutile de s’étendre sur ces choses ; ceux de sa religion les savent sur le bout du doigt ; ils vont les prendre à la source dès leurs plus tendres années ; et pour ce qui est des catholiques romains, ils n’ont pas besoin qu’un nouveau dictionnaire les en instruise ; celui de M. Simon et celui de Moréri le font assez. Il serait plus du caractère de cette compilation de s’arrêter aux faussetés et aux traditions incertaines qui regardent Abraham ; mais le nombre serait capable de rebuter les plus infatigables écrivains ; car que n’a-t-on point supposé touchant les motifs de sa conversion (A) ! Quels exploits ne lui a-t-on pas fait faire contre l’idolâtrie (B), soit dans la Chaldée, soit dans la ville de Charan (C) ! Combien de sciences (D), et combien de livres (E) ne lui attribue-t-on pas ! Les Juifs lui attribuent le privilége d’être né circoncis[e] et la même âme qu’à Adam[f]. Ils croient que cette âme a été celle de David, et qu’elle sera celle du Messie, comme l’a remarqué Bartolocci dans sa Bibliothéque Rabbinique. Les mahométans se sont aussi mêlés de conter des rêveries concernant ce patriarche, com-

  1. * Chauſepié a cru devoir donner un supplément à cet article.
  1. C’est, selon les Hébreux, le 352e depuis le déluge, et le 2003e depuis la création du monde.
  2. Genèse. XI, 31.
  3. Voyez l’article de Sara.
  4. Voyez l’article d’Agar.
  5. Apud Hottingerii Historiam Oriental., lib. I, cap. VI.
  6. Entendez ceci de ceux qui, parmi les juifs, ont cru la métempsycose.