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DANTE.

vingts ans, le 29 de novembre 1634, n’est pas d’un historien qui a quelque exactitude.

(C) Je laisse les autres éloges que le père Simon lui donne. ] Le père Dandini, dit-il[1], « tâcha de se dépouiller de tous les préjugés qu’il attribue à ceux qui avaient été avant lui au mont Liban. Il ne s’en rapporta pas tout-à-fait aux bulles des papes qui faisaient pourtant la meilleure partie de ses instructions, parce qu’il ne jugea pas qu’elles fussent infaillibles dans les faits dont il s’agissait. Mais il écouta avec bien de la patience le patriarche et les principaux maronites, qui se plaignaient de quelques jésuites qui l’avaient précédé dans le même emploi ; et toutes ces précautions sont des preuves convaincantes de sa sage conduite. Aussi semble-t-il n’avoir eu autre chose devant les yeux, que de découvrir la véritable créance des maronites. Cependant, comme l’on verra dans les remarques que j’ai jointes à ma traduction, toute la pénétration de son esprit et tous les efforts de sa prudence ne purent empêcher qu’il ne se laissât surprendre. »

(D) On ne peut pas en user plus librement envers un auteur, que le père Simon en a usé envers le père Dandini. ] Les dernières paroles de la citation précédente le font sentir. Disons le jugement qu’il a fait du style de ce jésuite. Son style, dit-il[2], est quelquefois si négligé et si rempli de mots superflus, d’épithètes inutiles, et d’exagérations, que j’ai cru qu’il était plus à propos de m’appliquer à rendre son sens que ses paroles, quoique d’ailleurs je garde presque partout quelque chose de son caractère. Pour écrire aussi avec plus de netteté, j’ai été souvent obligé à faire deux ou trois périodes d’une des siennes.

(E) La traduction du père Simon... ne contient point le Voyage à Jérusalem. ] La raison que le traducteur en donne est que comme nous avons un grand nombre de semblables relations, il a cru qu’il pouvait se dispenser de donner celle-ci au public, parce qu’elle ne contient presque rien qui n’ait été déjà remarqué par d’autres voyageurs.

  1. Simon, préface de la traduction française du Voyage du mont Liban.
  2. Idem, ibid.

DANTE, l’un des premiers poëtes d’Italie, naquit à Florence le 27 de mai[a] 1265[b]. Il était de bonne maison (A), et il fut élevé aux belles-lettres avec un grand soin[c]. Il eut entre autres maîtres le fameux Brunetti [d], qui était l’un des plus habiles hommes de ce temps-là. Il fit bientôt éclater l’inclination que la nature lui avait donnée pour la poésie[e] ; et comme il devint amoureux dès que l’âge le lui permit (B), il versifia beaucoup dans sa jeunesse. Ce fut à des vers d’amour qu’il consacra les premiers fruits de sa muse[f] ; mais ensuite il entreprit un ouvrage plus sérieux. Il le commença en vers latins, et l’acheva en vers italiens. La cause de ce changement fut qu’il sentait trop de lenteur dans les mouvemens de sa veine poétique quand il employait la langue de l’ancienne Rome. Il fit bien de se tourner vers sa langue maternelle, puisqu’il excella dans la poésie toscane[g]. Il aurait été plus heureux, s’il ne s’était mêlé d’autre chose ; car ayant eu de l’ambition, et étant même parvenu aux plus belles charges de la république, il fut accablé sous les ruines de la faction qu’il embrassa. La ville de Florence divi-

  1. Reusner., in Diario, pag. 81.
  2. Volaterranus, Commentar. Urbanor., lib. XXI, pag. m. 770.
  3. Idem, ibidem.
  4. Michael Pocciant., de Scriptor. Florentinis, pag. 33 et 44. Voyez la remarque (K).
  5. Volaterranus, Comment., lib. XXI pag. 771.
  6. Papyr. Masso, Elogior. tom. II, pag. 28.
  7. Idem, ibidem.