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1635. octobre.

liberté fut remise sur le tapis, monsieur le cardinal ayant dit au gouverneur de la Bastille que l'on m'en alloit faire sortir.

Le jeudy 25me ledit gouverneur estant allé trouver le roy a Saint Germain, le nonce Massariny luy dit que le mardy precedent, en soupant avec monsieur le cardinal, il luy avoit dit qu’il m’alloit faire sortir, et qu’il me le pouvoit dire de sa part. Cela m'obligea d’envoyer ma niece de Beuvron trouver monsieur le cardinal a Ruel le mardy 30me, pour le solliciter de ma part. Elle le vit, et luy avec un visage rude luy demanda a quy elle en vouloit. Elle luy respondit qu’elle le venoit, en toute humilité, supplier de moyenner ma liberté de laquelle depuis cinq années j’estois privé. Elle ne peut jamais tirer de luy autre chose sinon qu’il en parleroit au roy, ce qu’il luy reitera par quattre fois, puis la quitta. Elle me vit le lendemain et me dit le peu d'apparence qu’elle trouvoit de ma sortie, a quoy je ne m’attendis plus.

Novembre. — Ma cousine d’Espinal, abbesse[1], a

    défaveur à cause de ses relations avec Mme du Fargis, venait d’accompagner le roi dans sa courte campagne ; il avait profité de cette occasion pour lui parler contre le cardinal de Richelieu : celui-ci, averti par le roi lui-même, résolut de faire subir au comte de Cramail le même traitement qu'au maréchal de Bassompierre. Dans un mémoire adressé au roi pour justifier cette arrestation, le cardinal accuse le comte de Cramail d’être un esprit fort, et il ajoute que « le premier président de Toulouze, Mazuyer, luy vouloit faire son procez comme compagnon de Lucile. » (Lettres du cardinal de Richelieu, t. V, p. 333.) Ce Lucile était, non pas le duc de Montmorency, comme le suppose M. Avenel, mais bien Lucilio Vanini, l’ancien aumônier de Bassompierre, brûlé vif à Toulouse pour avoir professé des doctrines d’impiété.

  1. Claude de Cussigny, cousine germaine du maréchal de Bassompierre. Voir t. I, p. 18, note 3, et p. 146, note 3.