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munié d’une façon aussi intense. Je pense souvent à tous ceux qui t’entourent en ce moment d’une affection si tendre et t’aident à supporter vaillamment la lourde contribution du pays que je t’ai imposée ainsi qu’à moi-même. Être de ceux qui auront contribué directement à te rendre ton berceau natal sera pour moi une bien douce joie et comme un complément à notre vie si unie et si tendre. Quel bel anniversaire de nos vingt ans de ménage, la « rue de la Mésange » redevenue française ! quel plus beau cadeau pourrai-je rêver de l’apporter ! Et Lauterbourg, Niederbronn, Bionville, tout cela sous nos trois couleurs ! Tu dois comprendre pourquoi je voulais et devais partir, toute la tradition familiale n’est-elle pas avec moi ? Pouvoir emmener toi et nos chéris en Alsace-Lorraine et leur dire : Papa a aidé dans la mesure de ses forces à rendre ces deux beaux pays à la France, quelle plus belle récompense pour moi ?

(15) Note de la page 118. — « Beaucoup de socialistes sont à la fois pareils et différents… »

Enfant du Paris ouvrier, le fusilier marin Luc Platt est socialiste. Il va pour la première fois en permission et à son retour écrit sur son carnet :

25 septembre 1915. — … Je serais chef de quelque chose, je ramasserais tous ceux qui trouvent que c’est long, qui veulent signer la paix, et les amènerais ici à coups de trique. Je leur ferais passer trois semaines dans les tranchées et leur collerais le nez dans les boyaux pour qu’ils apprennent au moins ce que c’est. Ils parle-