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engageât la lutte et y reçût une multitude de blessures : quand il reviendrait triomphant, le roi le remercierait avec empressement et confierait le soin de le guérir aux plus habiles médecins ; mais si ces hommes de l’art lui disaient : Veux-tu que nous te guérissions de manière à laisser toujours paraître tes cicatrices ? il répondrait évidemment : Oui, je le veux ; car lorsque mes concitoyens me verront, ils me rendront grâces. Voilà, par comparaison, ce qu’il en est de Notre-Seigneur Jésus-Christ.

4. « Et ne sois plus incrédule, mais fidèle[1] ». La foi consiste à croire ce que tu n’as pas vu. La divinité du Fils de Dieu est invisible ; aussi Jean dit-il : « Personne n’a jamais vu Dieu[2] ». Quand Moïse, l’ami de Dieu, voulut le voir, il lui dit : « Seigneur, si j’ai trouvé grâce devant vous, faites que je vous voie clairement et que je vous connaisse[3] ». « Le Seigneur lui répondit : L’homme ne me verra point sans mourir[4] ». C’est-à-dire, je suis invisible pour tout homme mortel. Au dire d’un docteur, les anges eux-mêmes, bien qu’ils se trouvent en présence de Dieu, ne voient sa divinité qu’autant que cela est nécessaire à leur salut. Et Thomas lui dit : « Mon Seigneur et mon Dieu ![5] » Le bienheureux Thomas était un homme, et il voyait un Homme-Dieu : il a vu l’homme, et il a reconnu en lui un vrai Dieu. « Bienheureux ceux qui n’ont pas vu et qui ont cru[6] ». Nous voilà bien désignés dans ce passage, nous Gentils qui n’avons pas vu Notre-Seigneur Jésus-Christ incarné et mourant, et qui le reconnaissons, néanmoins, pour un vrai Dieu et un vrai homme. Pourquoi le Sauveur a-t-il employé le passé au lieu du futur ? Parce que ce qui est passé pour les hommes reste toujours présent devant Dieu. Voilà toujours comme s’exprime la sainte Écriture.

5. « Jésus a fait, en présence de ses disciples, plusieurs autres miracles qui ne sont pas écrits dans ce livre[7] ». Par ce livre, nous pouvons entendre le livre des quatre Évangiles. Pourquoi tous ces miracles n’ont-ils pas été écrits ? Parce que, s’ils l’avaient été, ils auraient semblé incroyables aux hommes et dépassé les bornes de leur intelligence. « Mais ceux-ci ont été écrits, afin que vous croyez que Jésus est le Christ, Fils de Dieu, et qu’en croyant vous ayez la vie en son nom[8] ». Tout homme qui possède la vraie foi, et qui en rehausse l’éclat par ses bonnes œuvres a-t-il la vie ? Quelle est cette vie ? C’est Notre-Seigneur Jésus-Christ ; car il a dit : « Je suis la voie, la vérité et la vie[9] ». Daigne le Seigneur nous faire parvenir à la contemplation de cette vie.

SOIXANTE-DEUXIÈME SERMON.
SUR L’ALLÉLUIA.

ANALYSE.—1. Le mot hébreu Alléluia a trois sens. Il signifie : —2. Premièrement : Chantez les louanges de Celui qu’est ; —3. Secondement : O Dieu, bénissez-nous tous ensemble comme ne faisant qu’un ; —4. Troisièmement : Louez le Seigneur.

1. Le mot hébreu qui retentit sans cesse dans l’Église, c’est-à-dire l’Alléluia, nous invite mes bien-aimés, à louer Dieu et à confesser la vraie foi. Dans notre langue, ce mot hébreu, Alléluia, signifie : Chantez les louanges de celui qui est ; ou bien : O Dieu, bénissez-nous tous ensemble comme ne faisant qu’un, ou plutôt. Louez le Seigneur. Autant de choses nécessaires à notre salut et à notre foi.

2. Nous devons chanter les louanges de

  1. Jn. 20, 27
  2. 1Jn. 4, 12
  3. Exo. 33, 12
  4. Id. 20
  5. Jn. 20, 28
  6. Jn. 20, 29
  7. Id. 30
  8. Id. 31
  9. Id. 14, 6