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peine été dignes que tu y prêtes une oreille favorable, bien que j’aie voulu aider à guérir les plaies de mes frères. À toi maintenant d’accomplir la tâche dont tu es redevable, comme pasteur, à l’égard de toutes tes brebis sans exception : à toi de céder aux aveux des coupables, aux gémissements des justes, aux supplications de tous. Daigne le Seigneur notre Dieu faire ce qu’il a promis, recevoir, comme un sacrifice agréable, le repentir de ces malheureux, ne point mépriser leur cœur contrit et humilié, écouter miséricordieusement leurs gémissements et leurs supplications, les épargner dans l’avenir, puisque, dans le présent, ils reviennent au bien, et les délier dans le ciel, puisque tu les auras déliés sur la terre.

TRENTE-DEUXIÈME SERMON. POUR LA RÉCONCILIATION DES PÉCHEURS.

ANALYSE. —1. Motifs pour lesquels l’évêque doit donner l’absolution aux pécheurs. —2. Trompés d’abord par le diable, ils confessent maintenant leurs fautes et demandent leur pardon. —3. Prières et gémissements des justes en leur faveur.
1. « Voici le temps favorable, voici les jours de salut[1] ». Puissent t’émouvoir, vénérable pape, les larmes des pénitents qui désirent obtenir, par ton intermédiaire, le pardon de celui qui habite en toi ! Ils viennent, ils se prosternent et ils pleurent devant le Dieu qui les a créés, afin qu’il anéantisse leurs œuvres et répare en eux la sienne. Puisse-t-il détourner ses regards, non pas de leurs personnes, mais de leurs iniquités ! Qu’il ne jette plus ses yeux sur eux, comme sur des pécheurs, pour effacer de la terre jusqu’à leur souvenir[2], mais comme sur des pénitents qui ont soif de la justice, pour prêter l’oreille à leurs supplications[3]. C’est leur corps qui a été, pour eux, l’instrument du péché ; aussi le châtient-ils sévèrement. Après avoir tiré vengeance de leur méchanceté, ils demandent au Dieu clément leur pardon. Pour l’apaiser, ils s’irritent contre eux-mêmes ; ils se punissent, afin qu’il ne les punisse pas. Ils lui offrent en sacrifice un esprit repentant : ainsi lui font-ils agréer leur cœur humilié et contrit[4] ; car il résiste aux superbes, et aux humbles il accorde sa grâce[5]. Le baptême avait fait d’eux des hommes nouveaux ; mais, puisqu’ils se sont blessés, poissent-ils trouver leur guérison dans la pénitence. Devenus infidèles à leurs promesses, puissent-ils ne point éprouver plus fard les supplices qu’ils ont fait profession de croire. Ils n’ont étendu sur personne leur bras vengeur : Dieu doit-il se venger d’eux ? Puisqu’ils se sont montrés miséricordieux, ne méritent-ils pas d’obtenir miséricorde ? Ils ont pardonné, qu’on leur pardonne donc ; ils ont été généreux, qu’on se montre tel à leur égard. À la voix du Christ s’est fendu le rocher de leurs instincts pervers, qui écrasait de son poids leurs ténébreuses consciences ; et, par la vertu de leur confession, ils semblent sortir d’un tombeau et paraître au grand jour. Délie-les donc et laisse-les aller, car tu as les clefs, et tout ce que tu délieras sur la terre sera délié dans le ciel[6]. Autrefois le péché régnait en maître sur leurs membres ; aujourd’hui que la justice a triomphé d’eux, ils reviennent à elle. Ne vois-tu pas un torrent

  1. 2Co. 6, 2
  2. Psa. 33, 17
  3. Id. 16
  4. Id. 1,19
  5. Mat. 18, 18
  6. Mat. 18, 18