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ce précepte fut la turbulence dans ces mouches nées de la pourriture, et qui s’en prenaient aux yeux. Or, les magiciens succombèrent à ce troisième signe, parce que les ennemis de l’unité n’ont point l’Esprit-Saint, tel est le châtiment qu’il leur inflige. L’Esprit-Saint a des faveurs et des châtiments les premières, c’est devenir en nous ; les seconds, de nous abandonner. Enfin, pour comprendre plus clairement, par l’aveu des mages de Pharaon, quel nom reçut l’Esprit-Saint, voyons comment il est nommé dans l’Évangile. Comme les Juifs jetaient au Sauveur ces outrageantes paroles : « Celui-ci ne saurait chasser les démons que par Béelzébub, prince des démons », il répondit : « Si c’est par l’Esprit de Dieu que je chasse les démons, assurément le royaume de Dieu est venu vers vous[1] » ; ce qu’un autre évangéliste nous raconte ainsi : « Si c’est par le doigt de Dieu que je chasse les démons ». Ainsi, ce qu’un évangéliste appelle : « Esprit de Dieu[2] », un autre l’appelle « Doigt de Dieu » ; donc l’Esprit de Dieu est aussi doigt de Dieu. C’est pourquoi la loi fut écrite par le doigt de Dieu, loi qui fut donnée sur le mont Sinaï, le cinquantième jour après l’immolation de l’agneau, après que le peuple juif, eut célébré la pâque. Quand s’accomplit le nombre de cinquante jours après l’immolation de l’agneau, la loi est donnée écrite par le doigt de Dieu ; et quand s’accomplit le nombre de cinquante jours après la mort du Christ, le Saint-Esprit descend. Béni soit le Seigneur qui se cache providentiellement, pour apparaître avec douceur. Voyez encore les mages de Pharaon faire cet aveu si clair ; succombant au troisième signe, ils s’écrièrent : « Le doigt de Dieu est ici[3] ». Bénissons le Seigneur qui donne l’intelligence et qui donne le verbe. S’il n’y avait sur tout cela un voile mystérieux, on le rechercherait avec moins d’avidité ; et si on le recherchait avec moins d’avidité, on goûterait, en le trouvant, moins de douceur.

DEUXIÈME SERMON. SUR LA NAISSANCE DE SAINT AUGUSTIN[4].

Le Codex manuscrit, num. 17, dont nous avons parlé plus haut, indique comme détachés de celui-ci les sermons CCCXXXIX et 40, de l’édition de Saint-Maur. Comme j’étais à me demander d’où vient qu’en France on ne trouve ce sermon que disloqué et mutilé dans les catalogues à l’aide desquels Amerbach, Erasme, les éditeurs de Paris, de Louvain, de Saint-Maur, ont ajusté leurs éditions, il m’est venu cette pensée assez croyable, savoir : que, de l’aveu des Bénédictins de Saint-Maur (Praef, tom. V), saint Césaire d’Arles, accablé d’années, avait coutume de faire lire par ses prêtres et ses diacres, non-seulement ses propres serinons, mais aussi ceux de saint Augustin, parfois mutilés, souvent avec un nouvel exorde ou une nouvelle péroraison. Quelqu’un put alors séparer les principaux arguments de ce sermon, selon qu’il le jugeait nécessaire, en admettant ce qui rattachait une partie prêchée à une partie omise. Or, comme cela ne s’est point fait avec toute la sagacité désirable, il nous reste des indices appuyant l’autorité de notre catalogue, réunissant ainsi les membres épars. En attendant, le sermon découpé à Arles, et ainsi jeté dans le public, s’est glissé dans tous les catalogues français, puis dans les autres contrées où saint Césaire, comme on le lit dans sa vie, liv. 1, transmettait par ces mêmes prêtres ce qu’ils devaient faire prêcher dans leurs églises. De là vient l’importance de rendre son ancienne intégrité à un sermon qui a manqué jusqu’alors dans nos bibliothèques.

ANALYSE.— 1. Avertir son peuple, c’est pour le pasteur alléger sa responsabilité. – Notre saint a toujours averti les pécheurs.— Illusion de ceux qui comptent sur la divine miséricorde pour retarder leur conversion. – Fidélité de Dieu à tenir compte des bonnes œuvres.—2. Prêcher à son peuple, c’est le nourrir. – Amener à la conversion, c’est faire valoir le

  1. Mat. 12, 24
  2. Luc. 10, 20
  3. Exo. 8, 10
  4. On trouve dans une édition cette inscription : « Pour le jour de son ordination n. On appellerait sa tête l’anniversaire de sa consécration épiscopale, jour qui était très-solennel, comme l’attestent saint Paulin, épit. à Delph, le pape Sixte, épit. à Cyril. En 430, saint Léon le Grand, le pape Hilaire, épit. à l’év. de Tarrag, et saint Augustin lui-même, épit.255, et ailleurs.