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SIXIÈME SERMON. ENCORE SUR LE SACREMENT DE L’AUTEL AUX ENFANTS[1].

ANALYSE. —1. Le corps du Seigneur est sur l’autel, et nous sommes ce corps. —2. L’Eucharistie est un symbole d’unité. —3. Exposé de la liturgie eucharistique.

1. Ce que vous voyez, mes bien-aimés, sur la table du Seigneur, c’est du pain, c’est du vin ; mais qu’advienne la parole, et ce pain et ce vin sont le corps et le sang du Verbe. Car, ce même Seigneur, qui était « au commencement le Verbe, et le Verbe qui était en Dieu, et le Verbe qui était Dieu[2] », est devenu, comme vous le savez, « le Verbe fait chair, habitant parmi nous », par cette grande miséricorde qui l’a porté à ne point mépriser ce qu’il a créé à son image ; car le Verbe s’est revêtu de l’homme, c’est-à-dire d’une âme et d’une chair humaine, et il est devenu homme, tout en demeurant Dieu. Aussi, par cela même qu’il a souffert pour nous[3], il a recommandé à notre adoration, dans ce sacrement, son corps et son sang, et c’est ce qu’il nous a faits nous-mêmes, par sa grâce. Car nous sommes devenus son corps, et par sa miséricorde nous sommes ce que nous recevons[4]. Souvenez-vous que cette créature fut un jour dans les champs, comment elle sortit du sein de la terre, fut nourrie par la pluie, qui en fit un épi ; comment elle fut transportée dans la grange par le travail de l’homme, puis battue, vannée, remise au grenier, retirée, moulue, pétrie, cuite, et devint enfin du pain. Souvenez-vous aussi de vous-mêmes. Un jour vous n’étiez point, et vous avez été créés, puis apportés dans la grange du maître et triturés par le travail des bœufs, c’est-à-dire des prédicateurs de l’Évangile. Quand on vous maintenait catéchumènes, on vous conservait dans le grenier. Puis, vous avez inscrit vos noms pour être broyés par les jeûnes et les exorcismes. Puis, vous êtes arrivés au baptême, on vous a pétris, ramenés à l’unité ; au feu de l’Esprit-Saint vous avez dû cuire, pour devenir ainsi le pain du Seigneur.

2. Voilà ce que vous avez reçu. Et comme vous voyez l’unité dans ce qui a été fait pour vous, soyez un aussi vous-mêmes, en vous aimant les uns les autres, en vous attachant à la même foi, à la même espérance, à la même charité. En recevant ce sacrement, les hérétiques reçoivent un témoignage contre eux-mêmes, puisqu’ils cherchent la division, tandis que ce pain nous prêche l’unité. De même le vin était répandu en plusieurs raisins, et maintenant il est un. Il est un avec ses parfums dans le calice, mais seulement après la violence du pressoir. Et vous aussi, après ces jeûnes, après ces labeurs, après vous être humiliés et brisés par la douleur, vous êtes arrivés au nom du Christ, au calice du Seigneur, et voilà que c’est vous qui êtes sur cette table, vous qui êtes aussi dans le calice. Vous êtes cela conjointement avec nous ; car c’est ensemble que nous sommes cela[5], et nous le buvons ensemble, parce que nous vivons ensemble[6]. Vous entendrez ce que vous entendiez hier, mais aujourd’hui on vous expose, et ce que vous avez entendu, et ce que vous avez répondu, et si vous avez gardé le silence quand on répondait, vous avez du moins appris aujourd’hui ce qu’il fallait répondre.

3. Après la salutation que vous connaissez,

  1. On trouve dans fol.7, cette inscription : « Du sacrement de l’autel, Sermon de saint Augustin pour le même jour. » C’est une courte instruction, semblable au sermon 3, pour ceux qui reçoivent la première fois la sainte communion. Nous donnons tout entier le fragment tiré de Bède et de Florus, inséré par les bénédictins sous le titre de sermon CCXXIX. Voir tom. 7, p. 249-250.
  2. Jn. 1, 1
  3. C’est ici que commence le fragment dont nous venons de parler.
  4. La coupure suivante, jusqu’à ces paroles : « Souvenez-vous aussi de vous-mêmes », ne se trouve point dans le fragment édité.
  5. On dirait mieux : nous le prenons ensemble.
  6. Ici finit le fragment.