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yeux et le reconnurent. Au dire du Sauveur, qu’est-ce qui était écrit de lui dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et les Psaumes ? « Il fallait que le Christ souffrit et ressuscitât ». S’il n’avait ajouté : « et ressuscitât », ces hommes dont les yeux étaient fermés se seraient chagrinés justement ; mais il avait été prédit « qu’il ressusciterait ». Pourquoi cela ? Pourquoi fallait-il que le Christ souffrît et ressuscitât ? A cause du psaume que nous avions si particulièrement recommandé à votre attention mercredi, jour de la semaine dernière où nous nous sommes réunis pour la première fois : « Les peuples les plus éloignés se souviendront du Seigneur et se tourneront vers lui ; toutes les nations se prosterneront devant lui et l’adoreront[1] ». Sachez qu’il fallait « que le Christ souffrît et ressuscitât ». En effet, après nous avoir parlé de l’époux, en quels termes nous parle-t-il de l’épouse ? Qu’ajoute-t-il ? « Et qu’on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés à tous les peuples, en commençant par Jérusalem ». Vous avez entendu, mes frères ; n’oubliez pas. Personne ne peut douter qu’il soit ici question de l’Eglise, puisqu’elle se trouve dans tous les pays ; encore une fois, le doute n’est permis à personne, puisqu’elle a pris naissance à Jérusalem, et que de là elle s’est répandue par toute la terre. Nous savons en quel champ la vigne a été plantée ; mais depuis qu’elle est devenue grande, nous ne la distinguons plus des autres, car on la voit partout. Où l’Eglise a-t-elle commencé ? « A Jérusalem ». Jusqu’où s’est-elle étendue ? « Jusqu’aux extrémités du monde ». Des peuples en petit nombre sont encore en dehors de son domaine ; plus tard, ils lui appartiendront tous. En attendant qu’elle exerce sur eux tous sa puissance, le maître de la vigne voyant que certains sarments étaient inutiles, a jugé à propos de les couper ; de là des hérésies et des schismes. Puissent ces malheureux sarments, retranchés du cep, ne point vous entraîner avec eux ; car vous en seriez aussi séparés ; exhortez plutôt ces branches mortes à se regreffer sur le pied de vigne auquel elles n’appartiennent plus. Il est évident que le Christ a souffert, qu’il est ressuscité et monté au ciel ; l’Eglise a paru, puisqu’on prêche en son nom la pénitence et la rémission des péchés parmi tous les peuples. Où a-t-elle commencé ? « En commençant par Jérusalem ». L’insensé entend, l’homme léger ne voit rien ; pourrais-je lui donner un autre nom que celui d’aveugle, puisqu’il n’aperçoit point cette immense montagne, puisqu’il ferme les yeux pour ne pas contempler le flambeau placé sur le candélabre ?


3. Quand nous leur disons : Si vous êtes chrétiens catholiques, mettez-vous donc en communion avec cette Église qui évangélise toute la terre ; vivez en accord avec cette Jérusalem ; quand nous leur parlons ainsi, ils nous répondent : Nous ne communiquons pas avec cette ville où notre roi a.été. mis à mort, où Notre-Seigneur a été assassiné comme s’il était question de la cité déicide où est mort notre Sauveur ! Les Juifs ont crucifié Jésus pendant qu’il vivait sur la terre ; ceux-ci le maudissent, maintenant qu’il règne dans les cieux. Quels sont les plus méchants ? Ceux qui l’ont méprisé parce qu’ils le croyaient un pur homme, ou ceux qui rejettent ses sacrements, quoiqu’ils reconnaissent sa divinité ? Mais oui, ils détestent la ville témoin du meurtre de leur Dieu. Les hommes pieux et pleins de tendresse ! Ils pleurent amèrement sur la mort violente du Christ, et ils ne craignent pas de le tuer dans le cœur des hommes ! Pour lui, il a aimé cette ville, et il en a eu pitié ; il a dit que la prédication de son Evangile y prendrait naissance : « En commençant par Jérusalem ». Il a établi à Jérusalem le berceau de la prédication de son nom, et tu as horreur de vivre en communion avec cette ville ! Ah ! je ne m’étonne plus que tu la détestes ; tu en as été arraché comme de ta racine ! Qu’est-ce que Jésus dit encore à ses disciples ? « Demeurez dans la ville, parce que je vous enverrai bientôt celui que je vous ai promis[2] ». Voilà quelle ville ils haïssent. Peut-être l’aimeraient-ils, si les meurtriers du Christ, si les Juifs l’habitaient encore. Or, il est de notoriété publique que tous les assassins de Jésus, c’est-à-dire. les Juifs ; en ont été chassés, et la cité qui abrita jadis les bourreaux du Sauveur n’a plus aujourd’hui, pour habitants, que des adorateurs de l’Homme-Dieu. Si donc les hérétiques la détestent, c’est qu’elle ne renferme que des chrétiens. Jésus a voulu que ses disciples y demeurassent, et que l’Esprit-Saint y descendît sur eux. En quel lieu l’Eglise a-t-elle prisnaissance,

  1. Ps. 21, 28
  2. Lc. 24, 13-49