Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome X.djvu/661

Cette page n’a pas encore été corrigée

puisque sa mort était réelle, et elle devait l’être pour que sa résurrection le fût aussi, il était donc enfermé dans le tombeau sans son âme, et pourtant le Christ a été enseveli. Donc son corps, même séparé de son âme, qui ne fut pas même ensevÉlie avec lui, portait le nom de Christ. J’en trouve une nouvelle preuve dans les paroles suivantes de l’Apôtre : « Soyez dans les mêmes dispositions que Notre-Seigneur Jésus-Christ, lui qui, étant Dieu, n’a pas cru que ce fût pour lui une usurpation de s’égaler à Dieu ». N’est-il pas ici question de Jésus-Christ, en tant que Verbe, Dieu en Dieu ? Écoute ce qui suit. « Mais il s’est humilié lui-même en prenant la forme d’esclave, en se rendant semblable à un homme, et reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui ». Et tout cela, qui est-ce qui l’a fait, si ce n’est le même Jésus-Christ ? Ici, nous trouvons tout ce qui concerne et le Verbe dans la forme de Dieu, qui s’est revêtu de la forme d’esclave, et l’âme et le corps dans la forme d’esclave, dont s’est revêtue la forme de Dieu. « Il s’est a humilié lui-même, en se faisant obéissant jusqu’à la mort [1] ». Au moment de sa mort, son corps seul a été attaché à la croix par les Juifs ; car s’il a dit à ses disciples : « Ne craignez point ceux qui tuent le corps et ne peuvent tuer l’âme[2] », les Juifs ont-ils pu faire plus que tuer son corps ? Pourtant le Christ a été mis à mort, parce que son corps a été tué. Ainsi, lorsque son corps a quitté son âme, le Christ l’a quittée, et quand, pour ressusciter son corps, il l’a reprise, il l’a reprise lui-même. Cela ne s’est pas fait en raison de la puissance du corps, mais en vertu du pouvoir de celui qui s’était revêtu de ce corps et de cette âme pour accomplir toutes ces choses.
14. Et le Sauveur dit : « J’ai reçu ce commandement de mon Père ». Le Verbe n’a point reçu verbalement ce commandement ; mais tout précepte se trouve dans le Verbe unique du Père. Puisqu’on dit que le Fils reçoit du Père ce qu’il possède en vertu de sa substance divine, comment le Sauveur a-t-il pu dire : « Comme le Père a la vie en lui-même, ainsi a-t-il donné au Fils d’avoir la vie en lui-même [3] ? » Dès lors que le Fils lui-même est la vie, ces paroles n’amoindrissent aucunement sa puissance, tuais elles prouvent sa génération divine. En effet, le Père n’a point agi comme s’il ajoutait quelque chose à sa substance pour lui donner un degré de perfection qui lui manquerait. Mais comme il l’a engendré avec toutes les perfections, il lui a tout donné en l’engendrant. Ainsi l’a-t-il engendré son égal, parce qu’alors il ne l’a point établi dans un état d’infériorité. Toutefois, au moment où le Sauveur parlait, et parce que la lumière luisait dans les ténèbres, et que les ténèbres ne la comprenaient point[4], « une nouvelle dispute s’éleva entre les Juifs à cause de ces paroles, et plusieurs d’entre eux disaient : Il est possédé du démon, il est fou, pourquoi l’écoutez-vous ? » Voilà une preuve que les ténèbres les plus épaisses régnaient en eux. « Les autres disaient : Ces paroles ne sont point d’un démoniaque, le démon peut-il ouvrir les yeux d’un aveugle ? »

  1. Phil. 2, 6-8
  2. Mt. 10, 28
  3. Jn. 5, 26
  4. Id. 1, 5