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d’avoir en soi la vie ». Que ceux qui entendent, comprennent : qu’ils croient pour comprendre, qu’ils obéissent pour vivre. Qu’ils écoutent encore ce qui suit, afin de ne pas croire que c’en est fini avec la résurrection : « Et il lui a donné le pouvoir même de rendre le jugement ». Qui est-ce qui a donné ce pouvoir ? Le Père. À qui l’a-t-il donné ? Au Fils, car le pouvoir même de rendre les jugements a été donné par lui à celui à qui il a donné d’avoir la vie en soi, « parce qu’il est le Fils de l’homme ». Ce Christ est en même temps Fils de Dieu et Fils de l’homme. « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu : il était, au commencement, avec Dieu ». Voilà comment le Père a donné au Fils d’avoir la vie en soi ; mais parce que « le Verbe s’est fait chair et qu’il a habité parmi nous[1] », parce qu’il est né homme de la Vierge Marie, il est le fils de l’homme. De ce qu’il est le Fils de l’homme, qu’a-t-il reçu ? Le pouvoir même de rendre le jugement. Quel jugement ? Le dernier, à la fin du monde : alors aura lieu la résurrection des morts, c’est-à-dire, des corps. Le Seigneur ressuscite donc les âmes par le Christ, en tant que Fils de Dieu : pour les corps, il les ressuscite par le même Christ, en tant que fils de l’homme. « Il lui a donné le pouvoir ». Ce pouvoir, il ne l’aurait pas, s’il ne l’avait reçu, et il serait un homme sans pouvoir. Mais s’il est fils de l’homme, il est, en même temps, Fils de Dieu. Le fils de l’homme s’étant attaché au Fils de Dieu en union de personne, il s’est formé une seule personne, qui est, tout à la fois, Fils de Dieu et fils de l’homme. Il faut voir de quels éléments se compose cette personne, et pourquoi. Le fils de l’homme a une âme et un corps : le Fils de Dieu a notre humanité, comme l’âme a le corps. De même que l’âme, unie au corps, fait, avec lui, non pas deux personnes, mais un seul homme ; ainsi, le Verbe, uni à notre humanité, forme avec elle, non deux personnes, mais un seul Christ. Qu’est-ce que l’homme ? Une âme raisonnable revêtue d’un corps. Qu’est-ce que le Christ ? Le Verbe de Dieu revêtu de notre humanité.
16. Maintenant, je ne vous dirai pas : Écoutez-moi, mais : écoutez le Seigneur vous parler de la résurrection de la chair ; il va le faire pour ceux qui sont ressuscités et sortis des bras de la mort en s’unissant à la vie. À quelle vie ? À celle qui ne connaît point la mort. Et quelle est la vie qui ne connaît pas la mort ? C’est celle qui ne subit aucune vicissitude. Pourquoi n’est-elle sujette à aucun changement ? Parce qu’elle est la vie en soi. « Et il lui a donné le pouvoir même de rendre le jugement, parce qu’il est le fils de l’homme ». Quel est ce jugement ? De quelle nature est-il ? « Ne vous étonnez pas » que je vous aie dit : « Il lui a aussi donné la puissance même de rendre le jugement, parce que l’heure vient ». Il n’a pas ajouté : « Et elle est déjà venue ». Il veut évidemment nous parler d’une certaine heure, de la fin du monde. C’est maintenant, pour les morts, l’heure de ressusciter : ce sera à la fin des temps, pour les morts, l’heure de revenir à la vie. C’est maintenant, pour eux, le moment de ressusciter d’une manière spirituelle : ce sera, plus tard, celui de la résurrection de leurs corps ; qu’ils ressuscitent aujourd’hui spirituellement par la puissance du Verbe, Fils de Dieu ; à la fin des temps, leur chair reviendra à la vie par la puissance du Verbe fait chair et devenu Fils de l’homme. Car ce n’est point le Père qui viendra juger les vivants et les morts, quoiqu’il soit inséparable du Fils. En quel sens donc ne viendra.-t-il pas lui-même ? Parce qu’il n’apparaîtra pas à l’heure du jugement : « Ils verront quel est celui qu’ils ont percé [2] ». Il apparaîtra comme juge avec la forme qu’il avait au moment où il a été jugé : elle a subi un jugement inique, elle rendra un jugement juste. La forme de l’esclave viendra donc, et ce sera elle qui se fera voir alors. Quant à la forme de Dieu, comment pourrait-elle se manifester aux bons et aux méchants ? Si le jugeaient n’avait lieu qu’à l’égard des justes, la forme de Dieu se montrerait à eux en raison de leur justice ; mais parce que le Seigneur jugera en même temps les justes et les pécheurs, et que ceux-ci ne méritent pas de voir Dieu, « Bienheureux ceux qui ont le cœur pur, parce qu’ils verront Dieu[3] », le souverain Juge apparaîtra de telle manière qu’il puisse être contemplé et par ceux qu’il couronnera et par ceux qu’il condamnera. On verra donc alors la forme d’esclave ; celle de Dieu demeurera cachée aux regards des hommes dans la personne de l’esclave, le Fils de Dieu

  1. Jn. 1, 9, 1-2, 14
  2. Jn. 19, 37
  3. Mt. 5, 8