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de l’Esprit, alors seulement tu marcheras dans la voie de Dieu et tu imiteras l’humilité du Christ. Il est si élevé au-dessus des anges que, « ayant la forme de Dieu, il a pu sans usurpation s’estimer son égal, et qu’il s’est néanmoins anéanti en prenant la forme d’esclave, en se rendant semblable aux hommes ; et, reconnu pour homme par tout ce qui a paru de lui, il s’est humilié lui-même et il est devenu obéissant jusqu’à la mort » ; et pour que tu n’imagines pas un genre de mort digne d’envie, il ajoute : « Et jusqu’à la mort de la croix[1] ». Il était attaché à la croix, et on l’insultait. Il pouvait descendre de la croix, mais il différait de le faire, afin de sortir glorieux du sépulcre. Comme maître, il a supporté l’insolence de ses serviteurs ; comme médecin, il a supporté celle de ses malades. Si telle a été sa manière d’agir, quelle doit être celle des hommes, pour qui c’est une obligation de naître du Saint-Esprit ? Comment doivent-ils se conduire, quand le maître, non seulement des hommes, mais des anges, leur a donné un pareil exemple ? En effet, ce que savent les anges, ils l’ont appris du Verbe de Dieu cherchez à savoir qui est-ce qui les a instruits, et l’Évangile vous dira : « Au commencement était le Verbe, et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu[2] ». Voilà qui ôte à l’homme sa tête, mais sa tête dure et rebelle, pour lui en donner une qui se courbe sous le joug du Christ, joug dont il est dit : « Mon joug est doux et mon fardeau est léger[3] ».

7. Le Sauveur ajoute : « Si lorsque je vous ai dit des choses de la terre, vous ne m’avez pas cru, quand je vous dirai des choses du ciel, comment me croirez-vous ? » Mes frères, quelles choses terrestres le Sauveur leur a-t-il dites ? « Si quelqu’un ne naît une seconde fois » ; est-ce là une chose de la terre ? « L’Esprit souffle où il veut, et tu entends sa voix, et personne ne sait ni d’où il vient, ni où il va » ; est-ce là une chose de la terre ? Voulait-il parler du vent, comme quelques-uns l’ont déclaré lorsqu’on leur demandait ce que le Sauveur avait pu dire de terrestre d’après ces paroles : « Si lorsque je vous ai dit des choses de la terre vous ne m’avez pas cru, quand je vous dirai des choses du ciel, comment me croirez-vous ? » En effet, quand on a demandé à certains hommes ce que le Sauveur a pu dire de terrestre, ils se sont trouvés embarrassés et ils ont prétendu qu’il avait fait allusion au vent dans ces paroles : « L’esprit souffle où il veut, et tu entends sa voix ; mais tu ne sais ni d’où il vient, ni où il va ». Dans son entretien avec Nicodème, qu’a-t-il dit qui ait trait à la terre ? Il parlait de la naissance spirituelle ; puis il a ajouté : « Ainsi en est-il de tout homme qui est né de l’esprit ». En outre, mes frères, lequel d’entre nous ne s’aperçoit point, par exemple, que le vent se dirige du Midi à l’Aquilon, ou qu’il va de l’Orient à l’Occident ? Dès lors, comment peut-il se faire que nous ne sachions ni d’où il vient, ni où il va ? Qu’a donc dit le Christ en fait de choses terrestres, que les hommes ne voulaient pas croire ? Est-ce l’allusion qu’il a faite à son corps, à ce temple qu’il devait rétablir en trois jours ? Ce corps, en effet, il l’avait reçu de la terre, et c’était cette terre qu’il avait prise dans un corps terrestre qu’il se disposait à ressusciter. Or, cette résurrection de la terre, on ne croyait pas qu’il l’opérerait. « Si, lorsque je vous ai dit des choses de la terre, vous ne m’avez pas cru, quand je vous dirai des choses du ciel, comment me croirez-vous ? » C’est-à-dire, si vous ne croyez pas que je puisse relever le temple de mon corps quand vous l’aurez détruit, comment croirez-vous que les hommes puissent être régénérés par le Saint-Esprit ?

8. Il ajoute : « Et personne n’est monté au ciel, sinon celui qui est descendu du ciel, le Fils de l’homme qui est au ciel ». Ainsi, Jésus-Christ était sur la terre et il était au ciel ; sur la terre par son corps, au ciel par sa divinité, ou plutôt en tous lieux par sa divinité. Il était sorti du sein de sa mère, sans quitter celui de son Père. Car il y a deux naissances en Notre-Seigneur, l’une divine et l’autre humaine, l’une qui nous donne la vie, l’autre qui nous la rend : naissances également admirables, puisque l’une s’effectue sans mère, et l’autre sans père. Comme il tenait son corps d’Adam, vu que Marie venait d’Adam ; comme, d’ailleurs, c’était le même corps qu’il devait ressusciter, il avait dit quelque chose de terrestre en prononçant ces paroles : « Détruisez ce temple, et je le rétablirai dans l’espace de trois jours[4]. Mais il avait dit quelque chose de céleste,

  1. Phil. 2, 6-8
  2. Jn. 1, 1
  3. Mt. 11, 30
  4. Jn. 2, 19