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ni os, comme vous voyez que j’en ai »[1]. Ils le touchent, ils sont dans la joie, dans l’étonnement. « Comme ils étaient encore dans le trouble de la joie », est-il écrit dans l’Évangile. Quelquefois on ne croit que difficilement ce qui donne de la joie, quelle qu’en soit la certitude. Un certain doute qui nous rend tardifs à croire assaisonne le bonheur qui nous vient alors. Plus nous avons désespéré de ce qui nous arrive, plus notre bonheur est grand ; et ce fut pour rendre leur bonheur plus doux et plus grand que le Sauveur ne voulut pas être connu tout d’abord. Il ferma les yeux de ces deux disciples qu’il rencontra parlant ensemble de leur peu d’espérance et se disant : « Nous espérions qu’il serait le Rédempteur d’Israël ». Ils l’avaient pensé, et ne le pensaient déjà plus. L’espérance n’était plus en eux, et le Christ était avec eux ; mais pour se rendre à eux, et leur ramener l’espérance. Ce fut donc seulement après, et quand ils l’eurent reconnu à la fraction du pain, qu’il se montra aux autres disciples qui le prenaient pour un esprit, qu’il leur dit : « Touchez et voyez, car un esprit n’a pas de chair et d’os, comme vous voyez que j’en ai ». Et comme la joie les troublait : « Avez-vous, ajouta-t-il, quelque chose à manger ? Il prit ce qu’ils présentèrent, le bénit, en mangea, et leur en donna ». Il parut alors qu’il avait réellement un corps, et toute crainte d’erreur disparut aussitôt. Que fit-il ensuite ? « Ne saviez-vous donc pas qu’il fallait que s’accomplît en moi tout ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes ? » Or, comme ils croyaient aux Prophètes et à Moïse ; car il est vrai de dire avec Abraham : « S’ils n’en croient point à Moïse et aux Prophètes, ils n’en croiront point à celui qui ressusciterait d’entre les morts » ; comme ils en croyaient à Moïse et aux Prophètes, et n’étaient point de ceux que reprend Abraham, ils écoutèrent ce que dit le Seigneur : « Ne saviez-vous pas qu’il fallait que s’accomplît en moi ce qui est écrit à mon sujet dans la loi de Moïse, dans les Prophètes et dans les Psaumes ? » Les voilà qui en croient à Moïse et aux Prophètes, voyez comment sur leur témoignage ils croient à celui qui est ressuscité d’entre les morts. « Alors il leur ouvrit l’intelligence, afin qu’ils comprissent les Écritures, et il leur dit : Il fallait, selon qu’il est écrit, que le Christ souffrit et qu’il ressuscitât d’entre les morts le troisième jour ».
18. Tu vois déjà l’Époux de l’Église. Ni Moïse, ni les Prophètes, n’ont gardé le silence à propos du Christ qui devait ressusciter le troisième jour, qui devait souffrir. On nous a décrit l’Époux afin de nous faire éviter toute erreur. Mais parce que nous n’avons aucune erreur à propos de l’Époux, il s’est trouvé certains hommes qui semblent croire ce que nous croyons au sujet de l’Époux, et qui nous viennent dire, pour nous séparer de ses membres : Sans doute, le même Époux que vous croyez est le même que nous croyons ; mais l’Épouse n’est point cette Église dont vous êtes les membres. Quelle est donc cette Épouse ? C’est le parti de Donat. Voilà ton affirmation, mais est-ce bien toi qui parles, ou bien est-ce l’Époux ? Est-ce toi qui le dis, ou Dieu qui l’a dit par Moïse ? Moïse me montre l’Église ; car Moïse a dit : « Toutes les nations seront bénies en ta postérité ». Est-ce toi qui le dis, ou l’Esprit de Dieu par les Prophètes ? Les Prophètes me montrent l’Église, car un Prophète m’a dit : « Toutes les nations de la terre se souviendront du Seigneur, et se tourneront vers lui ». J’ai donc pour moi le témoignage de la loi et des Prophètes ; écoutons encore celui qui est ressuscité d’entre les morts. Il montre qu’il est l’Époux, nous en avons la certitude. Il nous en a convaincus par des témoignages visibles. Car Moïse et les Prophètes avaient dit que de « Christ devait souffrir, et se lever d’entre les morts ». Ces paroles nous indiquent l’Époux à vous et à moi ; et dès lors ces paroles t’amèneront à croire à Moïse et aux Prophètes : croyons de même en celui qui est ressuscité d’entre les morts. Qu’il continue donc et dise : Seigneur, c’en est fait, je crois que le Christ est l’Époux. Que nul ne me sépare des membres de votre Épouse, car si je ne faisais partie de ses membres vous ne seriez point ma tête, Parlez-moi aussi de votre Épouse ; car je ne doute plus de l’Époux. Écoute ce qui est dit de l’Église ; voilà que l’Époux continue en disant que l’on doit « prêcher en son nom la pénitence et la rémission des péchés ». Rien de plus vrai ; la pénitence et la rémission des péchés sont prêchées en son nom. Mais où ? Ici, disent les uns ; là, disent les autres. Mais lui, que dit-il ? « Ne les croyez

  1. Lc. 24,19