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leur est réservé pour après eux, puisque le nom de postérité, ou ceux d’après, désigne ordinairement les enfants.
20. Mais si par enfants vous voulez entendre des hommes, il faut leur appliquer aussi ces paroles : « Si tes enfants gardent mon alliance et les préceptes que je leur enseignerai », en sorte que tel serait le sens : « Si tes enfants gardent mon alliance et les préceptes que je leur enseignerai, ainsi que leurs enfants », s’ils les gardent également ; en sorte qu’il y aurait une distinction, et que la promesse de s’asseoir sur le trône serait pour les enfants de David, et les enfants de ces enfants, mais à la condition que tous garderont ces préceptes. Qu’arrivera-t-il donc, s’ils ne les gardent point ? La promesse de Dieu sera-t-elle donc nulle ? Point du tout. Le Prophète n’a parlé de la sorte, n’a fait cette promesse, que dans la prévision de Dieu ; et qu’est-ce qu’a prévu Dieu, sinon qu’ils croiront ? Et afin que nul ne crût qu’il pouvait se soulever contre les promesses de Dieu, comme s’il dépendait de lui que cette promesse divine fût accomplie ou non, voilà que le Prophète nous dit que Dieu a promis avec serment, ce qui montre que l’accomplissement est infaillible. Pourquoi néanmoins dire : « S’ils gardent ? » Afin que la promesse de Dieu ne te donne aucune présomption, et ne te porte à négliger son alliance. La garder, c’est être fils de David ; la négliger, c’est n’être plus fils de David ; et Dieu n’a rien promis qu’aux fils de David. Tu ne saurais dire : Je suis fils de David, si tu es dégénéré. Les Juifs ne sauraient s’appeler ainsi, quoique nés de sa race. Ils le font, il est vrai, mais c’est une folie. Car le Seigneur leur a porté ce défi : « Si vous êtes les enfants d’Abraham, faites les œuvres d’Abraham[1] ». Il leur en refusait le nom, parce qu’ils n’en imitaient pas les œuvres. Comment nous appeler fils de David, nous qui ne sommes point de sa lignée selon la chair ? Nous ne pouvons être ses fils qu’en imitant sa foi, qu’en servant Dieu comme il l’a servi. Si donc tu ne veux acquérir par de saintes actions ce que tu ne saurais espérer par la naissance, comment s’accomplira pour toi la promesse de t’asseoir sur le trône de David ? Et si elle n’est accomplie en toi, crois-tu qu’elle sera sans effet ? Comment Dieu trouvera-t-il sa demeure dans les campagnes boisées ? Comment ses pieds pourront-ils demeurer fermes ? Quel que tu sois, cette maison subsistera.
21. « Car le Seigneur a choisi Sion, il l’a choisie pour en faire son habitation[2] ». Sion, c’est l’Église, c’est la Jérusalem d’en haut, la cité de la paix, à laquelle nous nous hâtons d’arriver, qui est encore dans l’exil, non pas dans les anges, mais en nous, et dont la partie meilleure attend l’arrivée de l’autre, De là nous sont venues les saintes lettres qu’on lit chaque jour. Telle est la cité, telle est Sion que le Seigneur a choisie.
22. « C’est le lieu de mon repos dans les siècles des siècles[3] ». C’est Dieu qui parle et qui dit : C’est mon repos, c’est là que je me repose. Quel amour de Dieu pour nous, mes frères ! il repose, dit-il, quand nous reposons. Dieu n’est jamais dans l’agitation, et n’a pas besoin de reposer comme nous, mais il dit qu’il se repose, parce que nous trouvons en lui notre repos. « C’est là que j’habiterai, parce que je l’ai choisie »[4].
23. « Je comblerai ses veuves de bénédictions, et ses pauvres je les rassasierai de pain3 ». Toute âme est veuve dès qu’elle se voit dénuée de tout secours autre que celui de Dieu. Quelle peinture, en effet, l’Apôtre nous fait-il de la veuve ? « Celle qui est vraiment veuve et désolée », nous dit-il, « a mis sa confiance dans le Seigneur ». Or, il parlait de ces veuves que nous appelons tous ainsi dans l’Église. Car il avait dit : « Celle qui vit dans les délices est morte, quelque vivante qu’elle soit », et il ne la compte pas au nombre des veuves. Mais que dit-il à propos des veuves saintes ? « Celle qui est vraiment veuve et désolée a mis son espérance dans le Seigneur, et persévère nuit et jour dans les prières et les saintes supplications ». Puis il ajoute « Pour celle qui vit dans les délices, elle est morte, quelque vivante qu’elle soit[5] ». Pourquoi donc l’autre est-elle veuve ? Parce qu’elle n’a d’autre secours que celui de Dieu. Des femmes qui ont leurs maris, tirent des secours de ces maris une certaine vanité ; une femme veuve paraît abandonnée, et son appui n’en est que plus solide. Toute l’Église n’est donc qu’une seule veuve. Elle est veuve dans les hommes, veuve dans les femmes, veuve dans les personnes mariées, veuve dans les femmes qui ont un Époux,

  1. Jn. 8,39
  2. Ps. 131,13
  3. Id. 14
  4. Id. 13
  5. 1 Tim. 5,5-6