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souffrît et ressuscitât le troisième jour ». À ces mots, je reconnais, disent-ils, notre chef ; c’est bien là l’Époux. Reconnais donc aussi avec moi l’Épouse, car vois ce qui suit : « Et que l’on prêchât en son, nom la pénitence et la rémission des péchés parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem ». – Viens ici, viens ici. – Voilà l’Église répandue « parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem » : aussi je ne dis pas : Viens ici, puisqu’elle vient elle-même à toi. Mais ils restent sourds et demeurent en opposition avec l’Évangile ; ils ne nous permettent pas de leur lire la parole de Dieu ; et, tandis qu’ils se vantent de l’avoir préservée des flammes, ils s’efforcent de l’effacer avec leur langue ; ils parlent en leur nom et ils ne disent que des choses vaines. Tel et tel, s’écrient-ils, ont livré les saints livres. Je le dis plus liant qu’eux, et je dis ce qui est : Oui, tel et tel sont des traditeurs. Mais que m’importe ? Ceux que tu viens de citer, tu ne peux trouver leurs noms dans l’Évangile : je ne pourrais davantage t’y montrer les noms de ceux dont je parle. Ôtons nos livres, n’ayons en main que celui de Dieu. Écoute : c’est Jésus-Christ qui te parle, c’est la vérité qui te dit : « Il fallait qu’on prêchât en son nom la pénitence et la rémission des péchés parmi toutes les nations, en commençant par Jérusalem »[1]. – Non, répondent-ils, nous n’écouterons pas : c’est plutôt à vous d’écouter ce que nous vous disons : ce que dit l’Évangile, nous ne consentons pas à l’entendre. « Les pécheurs se sont éloignés dès le sein de leur mère : ils se sont égarés avant d’en sortir ; ils ont dit des faussetés ». Pour nous, disons la vérité, puisque nous l’avons entendue : c’est Dieu, et non pas un homme qui nous a parlé. Un homme peut mentir ; il est impossible que la vérité nous trompe. Si je reconnais le Christ, qui est la vérité même, c’est la vérité qui m’apprend à le connaître : c’est encore elle qui m’aide à connaître l’Église, cette Église à qui Dieu a donné communication de la vérité. Qu’on ne vienne point me dire des faussetés. Quand on a été formé dans les entrailles de l’Église pour s’égarer dès son sein, et qu’on veut me dogmatiser, j’ai le droit de savoir d’abord ce qu’on a l’intention de m’enseigner. Vous vous êtes éloignés dès le sein de votre mère, vous vous êtes égarés même avant d’en sortir : je le vois, et j’écouterais vos enseignements ? Mais vous ne pouvez me dire que des faussetés ! « ils se sont égarés dès le sein de leur mère ; ils ont dit des faussetés »[2].
7. « Leur fureur est pareille à la fureur d’un serpent ». Vous allez entendre quelque chose d’important. « Leur fureur est pareille à celle d’un serpent ». Comme si nous l’avions interrogé sur le sens de ces paroles, le Prophète ajoute : « D’un aspic qui est sourd » ; pourquoi est-il sourd ? « Et qui se bouche les oreilles ». Sa surdité vient donc de ce qu’il se bouche les oreilles. « Il se bouche donc les oreilles, et n’écoute ni la voix de l’enchanteur, ni celle du remède que lui prépare le sage ». Ce que nous disons ici, nous l’avons entendu dire à d’autres ; nous disons ce que les hommes, appliqués à l’étude de ces choses, ont pu y comprendre, ce que l’Esprit-Saint connaît bien mieux que personne. Le Prophète s’est exprimé ainsi, sans doute, parce qu’il peut se faire que ce que nous avons entendu dire soit l’exacte vérité. Lorsqu’un marse enchanteur a commencé à exercer son influence sur l’aspic, par la récitation de quelques formules particulières, comme en emploient les magiciens, savez-vous ce que fait ce reptile ? Veuillez avant tout, mes frères, faire une remarque ; je vous préviens d’avance, afin qu’aucun d’entre vous n’éprouve de scrupule à écouter ce que je vais dire ; quelles que soient les comparaisons dont elle se sert, jamais la sainte Écriture ne donne d’importance et d’estime à l’objet même de la comparaison ; elle ne fait qu’en tirer une similitude. Ainsi, le Sauveur n’a pas donné son approbation à ce juge inique, dépourvu de toute crainte de Dieu et des hommes, qui ne voulait point écouter la veuve de l’Évangile ; il ne s’est servi de son exemple que pour faire une comparaison[3]. Jésus-Christ n’a pas non plus prétendu louanger l’homme indolent, qui a donné trois pains à son ami, plutôt pour échapper à ses importunités que pour lui témoigner son affection ; néanmoins, il a utilisé son exemple et en a fait le sujet d’une comparaison. Des objets très peu dignes de louanges servent donc parfois à établir, dans certaines limites, d’utiles similitudes. Parce que les divines Écritures vous

  1. Luc. 24,46-47
  2. Ps. 57,5-6
  3. Lc. 18,2