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comme un outrage et une malédiction : « Pour toi, sois son disciple[1] » ; tant le peuple avait de mépris pour moi.
8. « Tous ceux qui me voyaient, m’insultaient[2] ». j’étais la dérision de tous ceux qui me voyaient. « Ils parlaient des lèvres, et branlaient la tête ». Ils parlaient des lèvres, et non du cœur.
9. Car c’est par dérision qu’ils disaient, en branlant la tête : « Il a mis son espoir dans le Seigneur, que le Seigneur le délivre ; qu’il le sauve, s’il lui est cher[3] ». Telles étaient les paroles qui couraient sur leurs lèvres.
10. « C’est vous, Seigneur, qui m’avez tiré des entrailles maternelles[4] ». C’est vous qui n’avez tiré, non seulement du sein d’une vierge, car telle est la condition de tout homme, de naître en sortant du sein de sa mère ; mais vous m’avez tiré du sein de cette nation juive où est encore enveloppé dans les ténèbres, sans arriver à la lumière du Christ, celui qui met son salut dans l’observation extérieure du sabbat, dans la circoncision, et autres cérémonies. « Vous êtes mon espérance dès la mamelle de ma mère ». Seigneur, vous êtes mon espoir, non seulement depuis que j’ai sucé les mamelles de la Vierge, car vous l’étiez bien auparavant ; mais depuis que vous m’avez arraché aux mamelles, comme aux entrailles de la synagogue, afin de me soustraire au lait d’une coutume charnelle.
11. « Vous êtes mon ferme appui dès le sein de ma mère[5] ». Dès le sein de cette synagogue qui m’a rejeté au lieu de me porter, et si je ne suis point tombé, c’est que vous m’avez soutenu. « Dès le ventre de ma mère, vous êtes mon Dieu ». Oui, « dès le ventre de ma mère », car nonobstant cette enveloppe charnelle, je ne vous ai point oublié comme le petit enfant.
12. « Vous êtes mon Dieu ; ne vous éloignez pas de moi, parce que l’affliction est proche[6] ». Puisque vous êtes mon Dieu, ne vous éloignez pas de moi, aux approches de la tribulation, qui est déjà dans ma chair. « Car il n’y a personne qui me vienne en aide ». Qui me soutiendra, si ce n’est vous ?
13. « Voilà qu’une foule de jeunes taureaux m’ont environné[7] ». Les attroupements d’un peuple dissolu font cercle autour de moi. « Des taureaux puissants m’ont investi ». Et les chefs de ce peuple, joyeux de mon oppression, m’ont assiégé à leur tour.
14. « Ils ont ouvert leur bouche contre moi[8] ». Leur bouche a livré passage, non point aux paroles de vos saintes Écritures, mais aux cris de leurs passions. « Tel un lion saisit sa proie et rugit ». La proie de ce lion, ce serait moi que l’on saisit et que l’on amène, et son rugissement : « Crucifiez-le, crucifiez-le[9]
15. « Je me suis écoulé comme l’eau, tous e mes os se sont dispersés[10] ». Je me suis écoulé comme l’eau, quand mes persécuteurs sont tombés ; et mes disciples qui faisaient la solidité de l’Église ou de mon corps, se sont dispersés par la crainte. « Mon cœur s’est fondu comme la cire, au milieu de mes entrailles[11] ». Ces paroles que la Sagesse a consignées à mon sujet dans les livres saints, demeuraient incomprises, comme des paroles dures et cachées ; mais depuis qu’à la flamme de mes douleurs elles se sont comme liquéfiées, elles sont devenues évidentes, et se sont gravées dans la mémoire de mon Église.
16. « Ma vigueur s’est desséchée comme l’argile[12] ». Mes douleurs ont desséché mes forces, non comme l’herbe, mais comme l’argile que le feu rend plus dure. « Ma langue s’est attachée à mon palais ». Ceux par qui je devais parler ont gardé mes préceptes en eux-mêmes. « Vous m’avez réduit à la poussière de la mort ». Vous m’avez jeté entre les mains de ces impies destinés à la mort, et que le vent balayera de la surface de la terre.
17. « Des chiens sans nombre m’environnent[13] ». Voilà que j’étais environné de gens qui aboyaient, non plus au nom de la vérité, mais au nom de la coutume. « Le conseil des méchants m’a assiégé ; ils ont percé mes mains et mes pieds ». Ils ont percé de clous mes mains et mes pieds.
18. « Ils ont compté tous mes os[14] » compter tous mes os étendus sur la croix. « Pour eux, ils m’ont regardé, ils m’ont considéré attentivement ». Pour eux, c’est-à-dire dans la même aversion, ils m’ont regardé et considéré.
19. « Ils se sont partagé mes vêtements, et ont tiré ma robe au sort[15] ».

  1. Jn. 9,28
  2. Ps. 21,8
  3. Id. 9
  4. Id. 10
  5. Id. 11
  6. Id. 12
  7. Id. 13
  8. Ps. 21,14
  9. Jn. 19,26
  10. Ps. 21,15
  11. Id.
  12. Id. 16
  13. Id. 17
  14. Id. 18
  15. Id. 19