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campagnes, ni parmi les oiseaux du ciel, ni parmi ces poissons de la mer toujours parcourant les sentiers de l’abîme. Toutefois ces animaux n’ont pas qu’une seule signification, et pourraient s’expliquer autrement ; cela dépend du lieu où ils se trouvent, et ailleurs ils ont une autre signification. Il est de règle que, dans les symboles, il faut examiner, d’après la pensée du texte, la signification d’une figure. Tel est l’enseignement du Christ et des Apôtres. Répétons donc le dernier verset, par lequel déjà le Prophète avait commencé, et disons : « Seigneur, notre Dieu, que votre nom est admirable sur toute la terre ! » Car, après avoir exposé le texte du psaume, il est bon d’en redire le premier verset qui en contient toute la pensée.


DISCOURS SUR LE PSAUME 9

LES ACTES MYSTÉRIEUX DE JÉSUS-CHRIST.

Ces actes secrets consistent dans son avènement, tellement humble que les Juifs ne l’ont point connu, et dans cette sagesse mystérieuse qui lui fait abandonner aux impies les prospérités temporelles ; piège funeste auquel ils seront, pris ! tandis qu’il attire à lui les justes en les châtiant dès ici-bas.


1. Ce psaume a pour titre : « Pour la fin, psaume de David, pour les secrets du Fils[1] ». On peut se demander quels sont ces mystères du Fils : mais comme ce Fils n’est point précisé, nous devons comprendre que c’est le Fils unique de Dieu. En effet, le psaume qui porte en inscription : Pour le fils de David, ajoute : « Quand il fuyait devant son fils Absalon[2] ». Nominer celui-ci, c’était ne laisser aucun doute sur le fils dont il était question ; et toutefois il n’est pas dit seulement : « Devant la face du fils Absalon », mais bien : « De son fils ». Or, ici comme il n’est pas dit : « Son fils », et comme d’ailleurs beaucoup de passages regardent les Gentils, le psaume ne peut s’entendre d’Absalon ; et d’ailleurs la guerre que ce fils de perdition fit à son père, n’a aucun rapport avec les Gentils, puisque le peuple seul d’Israël se divisa contre lui-même[3]. Ce psaume est donc le chant des mystères du Fils unique de Dieu. Car le Sauveur se veut désigner lui-même, quand il dit simplement : Le Fils, sans rien ajouter ; ainsi dans ce passage : « Si le Fils vous délivre, vous aurez la vraie liberté[4] », il ne dit pas : « Le Fils de Dieu », mais simplement : Le Fils, laissant à juger de qui il est fils. Cette expression ne convient qu’à ce Fils par excellence, que l’on peut reconnaître dans notre langage, quand même il ne serait pas désigné plus spécialement. C’est ainsi que nous disons : Il pleut, il fait beau, il tonne, – et autres manières de parler, sans préciser qui fait ces choses, parce que l’auteur par excellence s’offre de lui-même à notre esprit, sans être plus désigné. Quels sont donc les mystères du Fils ? D’abord cette expression nous fait comprendre que le Fils a des actes connus, dont on distingue ceux que l’on appelle secrets ou mystérieux. Or, comme nous croyons à deux avènements du Sauveur, l’un accompli et que les Juifs n’ont pas compris ; l’autre à venir, que nous attendons tous ; comme le premier, ignoré des Juifs, a été avantageux aux Gentils, on peut fort bien entendre par les mystères ou les secrets du Fils, ce premier avènement, où l’aveuglement a frappé une partie d’Israël, jusqu’à ce que la plénitude des nations entrât dans l’Église[5]. Pour l’homme attentif, l’Écriture insinue aussi deux jugements, l’un occulte, et l’autre évident. Le jugement occulte se fait actuellement, selon cette parole de saint Pierre : « Voici le temps où Dieu va commencer le jugement par la maison du

  1. Ps. 9,1
  2. Id. 3,1
  3. 2 Sa. 15,1 ss
  4. Jn. 8,36
  5. Rom. 11,25