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de Dieu. C’est que toute l’humanité que s’est unit le Verbe, à savoir l’âme raisonnable et le corps, pour ne former qu’un même Christ, qu’une même personne divine, qu’un seul Fils de Dieu, tout en n’étant pas seulement le Verbe, mais le Verbe et son humanité, tout est en même temps Fils de Dieu le Père comme Verbe, et fils de l’homme comme homme. Comme Verbe, ; il est égal au Père ; comme homme, il lui est inférieur. Uni à son humanité il est Fils de Dieu, mais à cause du Verbe qui s’est uni à elle, et uni au Verbe il est fils de l’homme, mais à cause de l’humanité que le Verbe s’est uni. En considération de sa conception toute sainte dans le sein de la Vierge, conception qui n’a pas été due aux ardeurs de la concupiscence, mais à la ferveur d’une charité pleine de foi, nous disons encore qu’il est né du Saint-Esprit et de la Vierge Marie, l’un de ces deux noms désignant, non pas Celui qui a engendré, mais Celui, qui a sanctifié, et l’autre s’appliquant à Celle qui l’a conçu et mis au monde. « C’est pourquoi, disait l’ange, ce qui naîtra saint de vous sera appelé le Fils de Dieu ». Il est saint, voilà pourquoi : « Du Saint-Esprit » ; il naîtra de vous, voilà pourquoi : « De la Vierge Marie » ; il sera appelé le Fils de Dieu ; voilà pourquoi : « Le Verbe s’est fait chair[1] »

7. Il fallait qu’en se faisant homme, non-seulement l’invisible se montrât et que, coéternel au Père il naquit dans le temps ; il fallait encore que l’insaisissable fût saisi, que l’invincible fût suspendu au gibet, que là vie ; que l’immortalité même mourût sur la croix et fût ensevelie dans un tombeau : eh bien ! tout cela s’est vu dans le Fils de Dieu, dans Jésus-Christ Notre-Seigneur. Aussi devons-nous croire de cœur, pour être justifiés et confesser de bouche, pour être sauvés, que ce même Fils de Dieu, que ce même Jésus-Christ Notre-Seigneur n’est pas seulement né, comme homme, de sa Mère, mais encore qu’il a souffert jusqu’à sa mort et sa sépulture ce que peuvent endurer les hommes. Car ce Fils unique de Dieu, ce Jésus-Christ Notre-Seigneur étant à la fois le Verbe et son humanité, c’est-à-dire le Verbe, son âme et son corps, s’il est dit que son âme fut triste jusqu’à la mort[2], cette tristesse se rapporte à toute la personne ; et c’est le Fils unique de Dieu, c’est Jésus-Christ qui fut triste ; s’il est dit que comme homme seulement il fut crucifié, cela se rapporte à toute la personne aussi, et c’est le Fils unique de Dieu, c’est Jésus-Christ qui a été crucifié, s’il est dit que son corps seulement a été enseveli, cela se rapporte aussi à toute la personne. Depuis en effet que nous avons commencé à dire que nous croyons en Jésus-Christ, son Fils unique ; Notre-Seigneur, dans tout ce que, nous ajoutons ensuite relativement à lui, il ne faut jamais sous-entendre que ces mots ; Jésus-Christ, le Fils unique de Dieu, Notre-Seigneur. Pourquoi vous en étonner ? Ne pouvons-nous dire que le Fils unique de Dieu, que Jésus-Christ Notre-Seigneur a été enseveli, quoique sa chair seule l’ait été ; comme nous disons, par exemple, que l’Apôtre saint Pierre gît aujourd’hui dans son tombeau, bien que nous puissions affirmer aussi, conformément à la plus exacte vérité, qu’il jouit avec le Christ du repos et de la joie ? N’est-ce pas à nos yeux le même Apôtre ? Pierre n’est pas deux, il est un ; et c’est du même que nous disons qu’avec son corps seul il est dans le sépulcre pet qu’avec son seul esprit il partage le bonheur du Christ. Nous ajoutons : « Sous Ponce-Pilate », soit pour donner un moyen de s’assurer de l’époque, soit pour faire mieux ressortir l’humilité du Christ, qui a tant souffert pour avoir été jugé par un homme, lui qui doit venir avec tant à puissance pour juger les vivants et les morts,

8. Il est ressuscité ensuite le troisième jour, avec son corps véritable, mais pour être désormais et toujours exempt de la mort. Les disciples s’en sont assurés non-seulement en le regardant ; mais encore en le touchant ; la Bonté même n’a pas pu se jouer de leur bonne foi, ni la Vérité les induire en erreur. Pour être plus court on ajoute aussitôt qu’« il est monté au ciel » ; quoiqu’il ait demeuré quarante jours avec ses disciples, pour ne pas donner lieu, en les quittant trop tôt, de considérer comme une illusion cet important miracle de sa résurrection. Là maintenant « il est assis à la droite du Père ». Nous devons joindre ici la prudence à la foi et ne pas nous représenter le Fils de Dieu comme fixé sur un siège sans pouvoir faire aucun mouvement, sans pouvoir marcher ni même se tenir debout. Si saint Étienne a affirmé qu’il le voyait debout[3] ; il ne faut

  1. Jn. 1, 14
  2. Mat. 26, 38
  3. Act. 7, 55