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Ils devaient au contraire lui en rendre grâces afin d’êtres guéris par lui et de pouvoir conserver les connaissances qu’il leur avait accordées. En agissant ainsi ils auraient pratiqué l’humilité, ils auraient pu se purifier et s’attacher inséparablement à la beauté suprême qui aurait fait leur bonheur. Mais comme ils étaient orgueilleux, ils furent séduits par cet esprit faux, trompeur et superbe qui leur promit de purifier leurs âmes par je ne sais quelles pratiques d’orgueil, et ils en vinrent ainsi à adorer les démons. Telle est l’origine de tous les usages religieux des païens, représentés comme devant leur communiquer la pureté de l’âme. Aussi remarque comment l’Apôtre enseigne ensuite que c’est pour eux un juste châtiment de leur orgueil, d’avoir été ainsi punis pour n’avoir pas glorifié Dieu comme il doit l’être. « Et ils ont échangé la gloire du Dieu incorruptible contre l’image d’un homme corruptible ». Nous voilà déjà aux idoles, aux idoles des Grecs et des autres peuples qui adorent des images d’hommes.

Mais de tous les genres d’idolâtrie, il n’y en a point de plus accentué ni de plus superstitieux que celui des Egyptiens, car c’est l’Egypte qui a couvert le monde des vains simulacres dont parle ensuite l’Apôtre. Après avoir dit : « Contre l’image d’un homme corruptible », il ajoute en effet : « Des oiseaux, des quadrupèdes et des reptiles ». Dites-moi, mes frères, avez-vous vu dans d’autres temples des statues avec des têtes de chien ou de bœuf, et d’autres représentations d’animaux sans raison ? Ces idoles sont toutes égyptiennes, et l’Apôtre parle des unes comme des autres dans le passage suivant : « Contre l’image représentant un homme corruptible, et des oiseaux, et des quadrupèdes, et des reptiles. Aussi Dieu les a livrés au désir de leurs cœurs, à l’impureté, au point qu’ils déshonorent leurs propres corps en eux-mêmes ». Ces péchés viennent de leur impiété orgueilleuse. Or, en tant qu’ils viennent de l’orgueil, ils sont des châtiments aussi bien que des péchés. Voilà pourquoi ces expressions : « Dieu les a livrés » elles désignent la vengeance de quelque crime, et cette vengeance consiste à laisser commettre ces honteux désordres à ces hommes « qui ont transformé la vérité de Dieu en mensonge ». Qu’est-ce à dire : « Qui ont transformé la vérité de Dieu en mensonge ? » C’est-à-dire qu’ils l’ont « échangée contre l’image représentant un homme corruptible, et des oiseaux, et des quadrupèdes et des reptiles ». Quelqu’un de ces païens aurait pu dire : Moi, je n’adore pas la statue, mais ce qu’elle représente. L’Apôtre dit donc immédiatement ; « Ils ont adoré et servi la créature plutôt que le Créateur[1] ». Appliquez ici toute votre attention. Ils adorent la statue même ou l’ouvrage de Dieu. Adorer la statue, c’est transformer la vérité de Dieu en mensonge. En effet, on peut considérer la mer comme étant une vérité, et Neptune comme en mensonge, puisque la met est l’ouvrage de Dieu, tandis que la statue de Neptune est de création humaine. C’est aine encore que Dieu ayant fait le soleil, l’homme qui fabrique l’idole du soleil change en mensonge la vérité de Dieu. Afin donc que l’on n’ait pas même le prétexte de dire : Ce n’est pas l’image du soleil, c’est le soleil que j’adore, saint Paul a écrit : « Ils ont servi la créature plutôt que le Créateur »…

2. Ne pourrait-on pas faire cette objection ; Sans doute il est né dans l’humilité, mais il a prétendu mettre sa gloire dans l’honneur de ses disciples ? Or, il n’a choisi ni des rois, ni des sénateurs, ni des orateurs ; il a préféré des hommes du peuple, des pauvres, des ignorants, des pêcheurs. Le pêcheur Pierre a devancé Cyprien l’orateur ; et si le pêcheur ne s’était montré fidèle d’abord, l’orateur ne serait pas devenu un humble disciple. Que nul donc ne désespère, si petit qu’il soit ; qu’on s’attache au Christ et on ne sera point déçu dans son espoir…

3. À quoi prétendait Simon ? N’est-ce pas à la gloire de faire des miracles, à l’élévation que donne l’orgueil ? C’est l’orgueil effectivement qui le porta à croire ; qu’on pouvait acheter à prix d’argent le don de l’Esprit-Saint[2]. Ah ! que l’Apôtre était loin de cet orgueil quand avec une humilité si constante, une ferveur spirituelle si brûlante et une prudence si éclairée, il disait : « Ce n’est ni celui qui plante, ni celui qui arrose qui sont quelque chose, mais Dieu, qui donne l’accroissement ». C’est qu’il venait d’écrire ces mots : « J’ai planté, Apollo a arrosé ; mais l’accroissement a été donné par Dieu[3] » ; et ces autres : « Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous ! Est-

  1. Rom. 1, 18-25.
  2. Act. 8, 18.
  3. 1Co. 3, 7-6.