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ne parle-t-il point d’un signe pareil ? « Comme Moïse a élevé le serpent au milieu du désert, ainsi doit être élevé le fils de l’homme, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle [1]. » Ce qui signifie : Quiconque est blessé par le péché comme par un serpent, doit regarder le Christ, et il recouvrera la santé avec le pardon de ses fautes. Voilà, mes frères, comment le Seigneur s’est revêtu de notre mortalité. Son corps mystique, dont le chef divin est un homme dans le ciel, doit la porter aussi. Cette mortalité est pour l’Église comme la blessure causée par le serpent trompeur ; car si nous mourons, c’est par la faute du premier homme, et toutefois, par les mérites de Jésus-Christ Notre-Seigneur, la mort nous fait passer à l’éternelle vie. Mais à qu’elle époque l’Église rentre-t-elle dans la vie et retourne-t-elle dans son royaume ? À la fin du siècle. Aussi pour ramener le serpent à son état primitif, Moïse le prit par la queue, c’est la fin.
8. Que signifie sa main ? Elle désigne certainement son peuple. Et qu’est-ce que le sein de l’homme ? Le sein de Moïse est le sanctuaire de Dieu. Quand nous étions dans ce divin sanctuaire, nous avions santé et bonne couleur. Nous en sommes sortis, Adam a quitté le paradis après avoir offensé son Créateur et il s’est couvert de vices ; la main est devenue lépreuse. Mais elle est rentrée dans le sein de Dieu, dans le, sein de Notre-Seigneur Jésus-Christ, elle y a repris sa couleur. Et cette eau ? Elle est le symbole, de la sagesse ; car l’Écriture désigne souvent la sagesse sous la figure de l’eau, ce qui a fait dire au Sauveur : « Elle deviendra en lui une fontaine d’eau jaillissante jusque dans la vie éternelle [2]. » Or cette eau ou cette sagesse, qui sur la terre s’est changée en sang, ne nous rappelle-t-elle pas le Verbe qui s’est fait chair et qui habite parmi nous ? Sans aucun doute. Tout est donc, pour le peuple chrétien, signe et mystère relatif à Notre-Seigneur Jésus-Christ. S’il est d’autres sacrements dans les anciennes Écritures, qu’on les comprenne ou qu’on ne les comprenne pas, il faut les étudier, non les mépriser. Pour obtenir qu’ils nous soient découverts, demandons, cherchons et frappons. Ces sacrements étaient pour les Juifs des prédictions, ils sont pour nous dans l’Église la réalité même.


SERMON VII. MOÏSE ET LE BUISSON ARDENT[3].

ANALYSE. – Ce discours, plus étendu que le précédent, est un développement beaucoup plus long de ce qui en faisait simplement la première partie. Évidemment saint Augustin a ici en vue les Ariens et il s’attache à réfuter les objections qu’attiraient, contre la divinité de Jésus-Christ, de ce qu’ici il est parlé d’un Ange. Les trois circonstances de l’apparition, déjà expliquées précédemment, font comme les divisions de ce deuxième discours.

1. Pendant qu’on faisait la divine lecture, nous avons considéré de tout notre cœur l’étonnant miracle qui avait déjà rendu si attentif Moïse, le serviteur de Dieu. Nous aussi nous nous demandions comment le buisson paraissait tout en feu sans se consumer. Nous avons remarqué encore que d’après un autre livre sacré l’Ange du Seigneur s’était montré d’abord à Moïse dans ce buisson[4] ; et Moïse toutefois ne converse pas avec un Ange, mais avec le Seigneur même. Nous avons remarqué, en troisième lieu, que Moïse ayant demandé à, connaître le nom de Dieu, afin de pouvoir répondre aux fils d’Israël lorsqu’ils lui adresseraient cette question, et lui demanderaient qui l’a envoyé, il lui fut répondu : « Je suis, l’Être. » Cette réponse ne fut pas faite comme en passant ; afin d’en mieux faire sentir l’importance, elle fut renouvelée : « Tu diras donc aux fils d’Israël : c’est l’Être qui m’a envoyé vers vous. » Enfin, après avoir ainsi fait connaître son nom, le Seigneur ajouta : « Tu leur diras : Le Seigneur Dieu de vos pères, Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac et Dieu de Jacob,

  1. Jn. 3, 14-15
  2. Jn. 4, 14
  3. Ex. III
  4. Act. 7, 30