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du Seigneur : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux, et, sur la terre, paix aux hommes de bonne volonté ; » car l’Enfant nouveau-né n’apportait qu’un joug doux et un fardeau léger ; d’ailleurs, comme s’exprime l’Apôtre : « Dieu est fidèle, il ne souffre pas que nous soyons tentés au-dessus de nos forces ; mais il nous fait tirer profit de la tentation même, afin que nous puissions persévérer[1]. »


SERMON LXXI. DU PÉCHÉ CONTRE LE SAINT-ESPRIT[2].

ANALYSE. – Saint Augustin explique d’abord que le péché contre le Saint-Esprit, déclaré irrémissible par Notre-Seigneur lui-même, n’est autre chose que l’impénitence finale ; il expose ensuite pour quel motif l’impénitence finale est nommée spécialement péché contre le Saint-Esprit. – I. Saint Augustin explique d’abord les paroles de Notre-Seigneur qui précédent la phrase relative au péché irrémissible contre l’Esprit-Saint. Il constate ensuite que par ce péché irrémissible il, est impossible d’entendre tous les péchés commis contre le Saint-Esprit. Il faut donc, continue-t-il, y voir quelque péché particulier commis contre l’Esprit-Saint, ce qui s’accorde parfaitement avec le texte des Évangélistes et avec le langage ordinaire de l’Écriture. Or le Saint-Esprit étant le lien qui unit les fidèles entre eux, comme il est l’Esprit commun et au Père et au Fils, c’est lui qui efface les péchés par, la pénitence, et qui répand la charité dans les cœurs, et pécher contre lui d’une manière irrémissible c’est s’obstiner dans l’impénitence finale ; mais ce n’est pas, comme l’ont imaginé quelques hérétiques, une preuve que le Saint-Esprit soit plus grand que le Père ou que le Fils. – II. Mais le Père et le Fils ne remettent-ils pas les péchés comme le Saint-Esprit ? Ils y contribuent sans aucun doute, comme le Fils et l’Esprit-Saint contribuent aux actes particulièrement attribués au Père, comme le Père et le Saint-Esprit contribuent aux actions propres du Fils. Si donc, la rémission des fautes est spécialement l’œuvre du Saint-Esprit, c’est que l’Esprit-Saint anime l’Église qui seule a reçu ce pouvoir. Aussi les textes sacrés relatifs à cette grave question contribuent tous à démontrer que le péché irrémissible coutre le Saint-Esprit n’est autre chose que l’impénitence finale.


1. Cette lecture de l’Évangile soulève une grande question. Nous sommes, pour ce qui nous concerne, incapables de la résoudre, mais nous en deviendrons capables si nous pouvons recevoir ou saisir le secours de Dieu. Considérez donc d’abord, l’importance de ce sujet, et lorsque vous enverrez le fardeau peser sur nos épaules, vous unirez vos prières à nos efforts, et en venant à notre aide, la grâce divine portera l’édification dans vos âmes. On verrait de présenter au Seigneur un démoniaque aveugle et muet : le Seigneur l’avait guéri ; il parlait, il voyait, tout le monde était saisi d’admiration et on disait : « N’est-ce point là le Fils de David ? Or les Pharisiens, entendant cela, répliquaient : Celui-ci ne chasse les démons que par Béelzébud, le prince des démons. Mais Jésus, connaissant leurs pensées, leur dit : Tout royaume divisé contre lui-même sera ruiné, a et toute ville ou maison divisée contre elle-même ne subsistera plus. Que si Satan est divisé contre Satan, comment subsistera-t-il ? » Ce raisonnement avait pour but de montrer que, d’après leur propre aveu, les Pharisiens, en ne croyant pas au Sauveur, avaient pris le parti de rester dans le royaume de Satan, et que ce royaume divisé contre lui-même, ne pouvait que tomber. Choisissez, Pharisiens, ce que vous voudrez. Si Satan ne peut chasser Satan, vous ne sauriez trouver à dire quoi que ce soit contre le Seigneur ; et si Satan peut chasser Satan, prenez plus vite encore vos précautions et quittez cet empire, menacé de tomber, par ses divisions mêmes.
2. Par qui donc le Christ Notre-Seigneur chasse-t-il les démons ? Écartez ici toute idée du prince des démons, soyez attentifs aux paroles suivantes « Et si moi, dit Jésus, je chasse les démons par Béelzébud, par qui vos enfants les chassent-ils ? Aussi seront-ils eux-mêmes vos juges. » Il appliquait ceci à ses disciples, issus de ce peuple ; ah ! Ces disciples de Notre-Seigneur savaient parfaitement que ce bon Maître ne leur avait point enseigné des actes coupables pour chasser les démons au nom du prince des démons. « Aussi, poursuit-il, seront-ils eux-mêmes vos juges. »Eux-mêmes, observe-t-il, eux-mêmes, ce qu’il y a de bas et de méprisable en ce monde, eux en qui se révèle, non pas la fourberie et la méchanceté, mais la simplicité sainte de ma vertu, ils sont mes témoins et ils seront vos juges. Il ajoute : « Mais si je chasse les démons par l’Esprit de Dieu, le royaume de Dieu est donc parvenu jusqu’à vous. » Qu’est-ce à dire ? « Si

  1. 1 Co. 10, 13
  2. Mat. 12, 22-32