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DISCOURS SUR LE PSAUME 97

SERMON AU PEUPLE.

LA CONVERSION DES GENTILS.

Ce cantique nouveau est celui de l’homme, renouvelé en Jésus-Christ, qui chante les merveilles de Dieu. Or, ces merveilles sont celles que Dieu a faites pour sa gloire, c’est-à-dire en attirant à son service ceux qu’il guérit et qu’il sauve par le Christ. Ainsi s’accomplit sa promesse envers Jacob, sa vérité envers Israël. Car il a promis à Jacob, et il s’acquitte envers Israël ou envers le voyant de Dieu, en se manifestant à lui tel qu’il est. Or, cet Israël qui doit voir le Seigneur, vient de toutes les nations ; non d’une partie, comme le prétendent les Donatistes, mais de toute la terre. Chantons le Seigneur, avec la trompette d’airain, ou par les œuvres de la patience, et avec la trompette de corne, ou par des œuvres supérieures de l’humanité. C’est alors que les montagnes applaudiront des mains ou des œuvres saintes, et applaudiront en appelant le règne de Dieu.


1. « Chantez au Seigneur un nouveau cantique[1] ». L’homme nouveau connaît ce cantique, le vieil homme ne le connaît pas. Le vieil homme, c’est la vieille vie, l’homme nouveau, c’est la vie nouvelle : cette vieille vie nous vient d’Adam, la vie nouvelle est formée en nous par Jésus-Christ. C’est la terre entière que notre psaume invite à chanter un cantique nouveau. Car il dit plus clairement encore dans un autre passage : « Chantez au Seigneur un nouveau cantique, que la terre entière chante au Seigneur[2] ». Que les hommes séparés de la communion du monde entier comprennent enfin qu’ils ne peuvent chanter un cantique nouveau, parce que le cantique nouveau se chante dans le monde enlier, et non dans une partie. Or, remarquez et voyez que tel est le sens de notre psaume, et qu’en invitant l’univers entier à chanter un nouveau cantique, on signifie que c’est la paix qui entonne ce chant nouveau ; « Chantez au Seigneur un cantique nouveau, parce que le Seigneur a fait des merveilles ». Quelles merveilles ? Tout à l’heure, à la lecture de l’Évangile, nous avons entendu les merveilles du Seigneur. On portait un mort, fils unique de sa mère, et celle-ci était veuve : le Seigneur touché de pitié fit arrêter le convoi ; et quand il fut arrêté, il dit : « Jeune homme, je te le commande, lève-toi. Et celui qui était mort s’assit, et commença à parler, et Jésus le rendit à sa mère[3] ». Voilà les merveilles du Seigneur. Mais il y a une merveille bien plus grande à tirer de la mort éternelle l’univers entier, qu’à ressusciter le fils unique d’une veuve. « Chantez donc au Seigneur un nouveau cantique, parce que le Seigneur a fait des merveilles ». Quelles merveilles ? Écoute encore : « Sa droite et la sainteté de son bras ont fait pour lui d’admirables guérisons ». Quel est ce bras saint du Seigneur ? C’est Notre-Seigneur Jésus-Christ. Écoute Isaïe : « Qui croira à notre parole, et à qui le Seigneur a-t-il montré son bras[4] ? » Il est donc tout à la fois son bras saint et sa droite. Jésus-Christ donc est le bras de Dieu et la droite de Dieu : c’est pour cela qu’« elle a guéri pour lui ». Il n’est pas dit seulement que sa droite a guéri l’univers entier, mais qu’« elle l’a guéri pour lui ». Beaucoup en effet sont guéris pour eux, et non pour lui. Combien désirent la santé du corps, la reçoivent de sa miséricorde, et dès lors sont guéris par lui, et non pour lui ? Comment sont-ils guéris par lui, et non pour lui ? C’est qu’ayant recouvré la santé, ils se livrent au péché ; malades, ils étaient chastes ; guéris, ils deviennent adultères : pendant leur maladie, ils ne blessaient personne ; une fois en santé ils subjuguent et oppriment l’innocence. Ils sont guéris, mais non pour lui. Qui est guéri pour lui ? Celui qui est guéri intérieurement, Qui est guéri intérieurement ? Celui qui croit en Jésus-Christ, en sorte que, une fois qu’il est guéri intérieurement, et reformé sur l’homme nouveau, cette langueur même d’une chair mortelle qui est passagère, recouvre enfin sa santé la plus parfaite. Guérissons-nous donc

  1. Ps. 97,1
  2. Id. 95,1
  3. Lc. 7,12-15
  4. Isa. 53,1