Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome IX.djvu/351

Cette page n’a pas encore été corrigée

l’entremise d’un médiateur[1]. « Rappelez-vous quelle est ma substance. Car ce n’est pas en vain que vous avez créé tous les enfants des hommes ». Voilà que tous les hommes sont tombés dans la vanité, et cependant ce n’est point pour la vanité que vous les avez créés. Et quand ceux que vous n’avez pas créés en vain tombent ainsi dans la vanité, ne vous êtes-vous donc rien réservé pour les en purifier ? Ce que vous vous êtes réservé pour purifier les hommes de la vanité, ce saint qui est le vôtre, c’est en lui qu’est ma substance. C’est en lui que sont purifiés de leur propre vanité tous ceux que vous n’avez pas créés en vain, eux à qui il est dit : « Enfants des hommes, jusques à quand vos cœurs seront-ils appesantis ? pourquoi aimer la vanité et rechercher le mensonge[2] ? » Peut-être que, devenus soucieux, ils se détourneraient de la vanité ; et, s’en voyant souillés, ils chercheraient à s’en purifier. Venez à leur secours, et rassurez-les. « Et sachez que le Seigneur a glorifié son saint[3] ». Il a rendu son saint admirable, et par lui, il a purifié les hommes de leur vanité. C’est là qu’est ma substance, dit le Prophète, souvenez-vous de lui. « Ce n’est donc pas en vain que vous avez établi les enfants des hommes ». Vous avez conservé de quoi les purifier. Quel est celui que vous avez conservé ? « Quel est l’homme qui vivra sans voir la mort[4] ? » Donc cet homme qui vivra, et qui ne verra pas la mort, c’est lui qui nous purifie de la vanité. Car ce n’est pas inutilement que Dieu a établi les enfants des hommes ; et celui qui les a faits ne saurait les mépriser au point de ne pas les convertir en les guérissant.
10. « Quel est l’homme qui vivra, et ne verra point la mort ? » Car, en se levant d’entre les morts, il ne meurt plus, la mort n’a plus d’empire sur lui[5]. Enfin, comme il est écrit dans un autre psaume : « Vous ne laisserez point mon âme dans l’enfer, et vous n’abandonnerez point votre saint à la corruption[6] » voilà que les Apôtres s’emparent de ce témoignage, pour s’en servir dans les actes contre les infidèles, en disant : « Mes frères, nous savons que le patriarche David est mort, et que sa chair a éprouvé la corruption ». Ce n’est donc point de lui qu’il est dit : « Vous n’abandonnerez point votre saint à la corruption[7] ». Si donc cette parole ne le concerne point, de quel homme est-il dit : « Quel est l’homme qui vivra et ne verra point la mort ? » Peut-être n’y a-t-il personne. Cette parole, au contraire, « quel est l’homme », n’est que pour vous le faire chercher, et non pour faire désespérer d’en trouver un. Mais peut-être est-il un homme « qui vivra, et ne verra point la mort » ; et toutefois cela ne s’applique point au Christ, qui est mort. Il est certain, au contraire, que « nul homme ne vivra sans voir la mort », sinon celui qui est mort pour les mortels. Et afin de voir que cette parole s’applique à lui, vois la suite : « Quel homme vivra sans voir la mort ? » Jamais donc il n’a vu la mort ? Il l’a vue. Comment donc vivra-t-il sans voir la mort ? Il délivrera son âme de la puissance de l’enfer. C’est vraiment lui seul, et seul sans exception, qui « vivra et ne verra point la mort, qui délivrera son âme de la puissance de l’enfer » ; car si tous les fidèles se lèvent d’entre les morts, s’ils vivent aussi dans l’éternité et ne voient plus la mort ; ils ne peuvent toutefois délivrer leurs âmes de la puissance de l’enfer. Celui-là qui délivre son âme des puissances de l’enfer, en délivre aussi les âmes de ses fidèles, car ils ne peuvent se délivrer eux-mêmes. Montrez, diras-tu, qu’il a délivré son âme. « J’ai le pouvoir », dit-il, « de donner mon âme et aussi le pouvoir de la reprendre ; nul ne peut me l’ôter, car c’est moi qui ai dormi[8], « c’est donc moi qui donne ma vie, et moi qui la reprends[9] » ; ainsi c’est lui qui a délivré son âme de la puissance de l’enfer.
11. Cette foi en Jésus-Christ, néanmoins, a subi de longues persécutions, et longtemps les nations ont dit : « Quand mourra-t-il, quand son nom périra-t-il[10] ? » C’est donc pour ceux qui croiront en Jésus-Christ, mais qui doivent souffrir pendant quelque temps, que le psaume a dit : « Où sont, ô mon Dieu, vos anciennes miséricordes[11] ? » Déjà nous savons que le Christ nous purifie, nous possédons celui en qui vous accomplissez vos promesses : donnez-nous en lui ce que vous avez promis. C’est lui qui vivra et ne verra point la mort ; lui qui

  1. Gal. 3,19
  2. Ps. 4,3
  3. Id. 4
  4. Id. 88,49
  5. Rom. 6,9
  6. Ps. 15,10
  7. Act. 2,27-31
  8. Ps. 3,6
  9. Jn. 10,17-18
  10. Ps. 40,6
  11. Id. 88,50