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conservera, c’est l’eau de l’aspersion, elle purifie. » Dieu déclare ensuite avec plus de clarté la manière dont on faisait avec cette cendre l’eau d’aspersion, qui effaçait l’impureté contractée au contact des morts : image assurément de la purification des iniquités qui se commettent dans cette vie toujours morte ou mourante.
9. Ce qui vient ensuite est surprenant : « Et celui, dit l’Écriture, qui ramassera la cendre de la génisse, lavera ses vêtements, et il sera impur jusqu’au soir. » Comment l’action de cet homme, qui était pur auparavant, le rendra-t-elle impur ? N’est-ce point une figure de ce qui se passe dans la foi chrétienne, où ceux-mêmes qui se croient à l’abri de toute souillure apprennent à se connaître, car « tous ont péché et ont besoin de rendre gloire à Dieu, parce qu’ils ont été justifiés gratuitement par le sang du Christ[1] ? » Cet homme n’est cependant pas tenu de laver son corps, mais seulement ses habits : je crois que la démarche qu’il accomplit en ramassant la cendre et la plaçant dans un lieu pur, entendue dans le sens spirituel, signifie qu’il était déjà purifié intérieurement : c’est ainsi que Cornélius, entendant Pierre et croyant à sa prédication, fut purifié d’une manière si parfaite, que le Saint-Esprit lui fut donné, même avant le baptême visible, ainsi qu’à tous ceux qui étaient là [2]. Il ne négligera point cependant de recevoir le sacrement qui se donne sous une forme sensible ; ce fut pour lui la purification extérieure, une sorte d’ablution de ses vêtements. « Et ce sera, dit le texte sacré, une loi éternelle pour les enfants d’Israël et pour les prosélytes qui se sont joints à eux. » Qu’est-ce que ces paroles nous font voir, si ce n’est que le baptême, figuré symboliquement par l’eau d’aspersion, profitera également aux Juifs et aux Gentils, c’est-à-dire, aux enfants d’Israël et aux prosélytes, les uns étant comme les rameaux naturels de l’arbre, et les autres, une sorte d’olivier sauvage greffé sur le tronc vigoureux [3] ? Mais qui ne serait étonné de voir qu’il est dit de l’un et de l’autre, après qu’ils se sont lavés : « Il sera impur jusqu’au soir ? » Et ce n’est pas seulement dans cette circonstance, mais dans toutes ou presque toutes les purifications semblables, que l’Écriture se sert des mêmes expressions. Je ne sache pas qu’on puisse donner à cette particularité une interprétation différente de celle-ci : c’est que tout homme, après la rémission la plus entière de ses fautes, contracte, en demeurant dans cette vie, les imperfections qui le rendent impur, jusqu’à la fin de cette même vie ; qui est pour lui comme le soir d’un jour.
10. L’Écriture décrit ensuite la manière dont doit se faire, avec l’eau d’aspersion, la purification des hommes devenus impurs : « L’âme, dit-elle, de quiconque aura touché un mort, sera impure pendant sept jours ; cet homme se purifiera le troisième et le septième jour, et il sera pur. » Ici encore je ne vois pas ce qu’on peut entendre par le contact d’un mort, sinon l’iniquité de l’homme. L’impureté qui dure sept jours se rapporte, je pense, à l’âme et au corps ; à l’âme, pour le nombre ternaire ; du corps pour le nombre quatre. Le motif pour lequel il en est ainsi demanderait de longs développements. C’est en ce sens que j’interprète ces paroles du Prophète : « Je ne montrerai pas d’aversion après trois et quatre impiétés[4]. » Viennent ensuite ces mots : « S’il n’est pas purifié le troisième et le septième jour, il ne sera pas pur. Quiconque aura touché le corps mort d’un homme, et sera mort, et n’aura pas été purifié » c’est-à-dire, sera mort avant d’avoir été purifié de ce contact, « souillera le tabernacle du Seigneur : cette âme sera retranchée d’Israël. » Il est extrêmement difficile de trouver dans les livres de Moïse quelque chose de plus formel en faveur de la vie de l’âme après la mort. Ici, en effet, l’Écriture nous dit que si cet homme est mort avant d’être purifié, son impureté demeure, et que cette âme est retranchée d’Israël, en d’autres termes, de la société du peuple de Dieu. Or, que veut-elle nous faire entendre par là, sinon que le châtiment pèse sur cette âme, même après la mort, quant au temps de la vie elle n’a pas été purifiée par ce sacrement qui est la figure du baptême chrétien ? « Il sera impur, dit le texte sacré, parce que l’eau d’aspersion n’a pas été répandue sur lui ; son impureté est encore en lui. » Encore, c’est-à-dire, même après la mort. Quant à ces mots, cités plus haut : « Il a souillé le temple du Seigneur » comprenez : autant qu’il était en lui de le faire. C’est ainsi que l’Apôtre dit : « N’éteignez point l’Esprit[5] » quoiqu’il soit impossible à l’homme de réaliser ce crime. Si le tabernacle eût été réellement souillé, Dieu n’aurait pas manqué d’ordonner qu’on le purifiât.
11. Dieu prescrit ensuite la manière dont

  1. Rom. 3, 23-24
  2. Act. 10, 44-48
  3. Rom. 11, 16-24
  4. Amo. 1,3
  5. 1Th. 5, 19